L’intégration de la Tunisie, à compter du 1er janvier 2008, dans
la zone de libre-échange euroméditerranéenne des produits manufacturés est
déjà un souvenir.
Tunis est mise sous pression par Bruxelles pour entamer, dans les meilleurs
délais, les négociations sur la libéralisation des échanges des produits
agricoles et des services.
Les départements ministériels concernés, en l’occurrence, les ministères du
commerce et de l’agriculture, sont à pied d’œuvre pour préparer ces
négociations.
L’enjeu socio-économique est de taille pour la Tunisie. En effet, le secteur
agricole emploie à lui seul environ 22% de la main d’œuvre et contribue pour
16% au PIB et 12% des recettes totales d’exportation .
La population rurale, qui tire le principal de son revenu des activités
liées directement ou indirectement à l’agriculture, représente à elle seule
environ 40% de la population totale.
Pis, le Maroc, pays comparateur de la Tunisie et son concurrent , est en
train de lui piquer sa première place en matière de partenariat avec l’Union
Européenne (UE). Il s’agit, désormais, de faire vite d’autant plus que la
commission européenne estime, sans ambages, que le Maroc fait mieux que la
Tunisie pour intégrer l’espace européen.
Ce pays serait selon la commission, « en avance » dans des négociations
«ambitieuses » en matière de libéralisation du commerce des produits
agricoles et de la pêche et de libéralisation des services et de
l’investissement.
La commission va plus loin dans l’éloge du Maroc. Pour elle, « le Maroc a
fait le choix stratégique de l’intégration dans le marché européen » dans
plusieurs secteurs structurants (énergie, transport).
En récompense de cette bonne volonté marocaine, la Commission serait sur le
point d’accorder au Maroc « un stade avancé » qui consisterait entre autres
en « la mise en place d’un partenariat pour développer les échanges humains
et obtenir des mesures de facilitation des visas ».
Les pouvoirs publics tunisiens sont conscients de ces pressions, mais il
n’est pas question de tomber dans la précipitation en dépit des enjeux.
Lors d’une conférence de presse tenue, fin janvier2008, à Tunis, le ministre
du commerce, M.Ridha Touiti a déclaré que la libéralisation des échanges des
produits agricoles se fera progressivement et prendra en considération
l’écart de développement entre les deux parties.
Le ministre a tenu à préciser qu’une liste de produits dits sensibles seront
exclus de la libéralisation.
Il s’agit essentiellement de veiller à garantir une concurrence loyale aux
produits locaux face à des produits européens subventionnés et d’instituer
des mesures d’accompagnement.
Néanmoins, la question majeure qui se pose, à la veille de l’ouverture des
frontières aux produits agricoles concurrents, est de savoir si
l’agriculture tunisienne est capable de réaliser concomitamment deux
objectifs.
Le premier, économique, implique une amélioration de la compétitivité des
produits locaux face à la concurrence. Le second, social, consiste à
maintenir les emplois agricoles dans les zones rurales en leur assurant à
travers des programmes et des actions spécifiques un revenu adéquat.
Concernant le premier volet, la Tunisie s’est inscrite, depuis 1995, dans le
libre échangisme. A cette date, la Tunisie avait adhéré aux accords de
l’Uruguay Round, plus précisément, à sa composante l’accord agricole.
En signant cet accord, la Tunisie s’est engagée dans le domaine de
l’agriculture à réduire le soutien interne de 13% sur une période de 10 ans
à partir de 1995, à éliminer toutes les mesures non tarifaires et à réduire
le tarif douanier de 24% pour la même période sur les produits agricoles.
En outre, l’accord d’association conclu en 1995 avec l’Union Européenne
prévoit à son tour une libéralisation quasi-totale des échanges des produits
industriels entre la Tunisie et ce groupe de pays.
Cette libéralisation fera l’objet, en 2008, de plusieurs rounds de
négociations qui dureront probablement deux ans. M. Touiti a annoncé, à
cette occasion, la mise en place d’une commission interministérielle qui,
sous l’égide du Ministère de l’agriculture, des ressources hydrauliques et
de la pêche, sera chargée d’entamer la négociation sur la libéralisation des
échanges de produits agricoles, agroalimentaires et de la pêche.
Ces négociations devraient s’ouvrir, la dernière semaine le de ce mois. Une
délégation de la commission européenne sera dépêchée, à cette fin, à Tunis.
Concernant les négociations sur la libéralisation des échanges des services,
la recherche de concessions équilibrées est souhaitée de part et d’autre.
La Tunisie a mis à profit les premiers contacts, à ce propos, au mois de
décembre dernier, pour suggérer qu’une attention particulière soit accordée
à la facilitation de la circulation des prestataires de services (ingénierie
conseil, informatique, services de santé, comptabilité…).
Pour la Commission européenne l’objectif est de faire progresser en
parallèle l’évolution du cadre réglementaire régissant les échanges de
services et l’ouverture effective des marchés, aussi bien pour les
prestations que pour l’installation des opérateurs.
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