Il bout. Il bouillonne. Il trépigne sans cesse. A 40 ans, et malgré deux
petites entreprises, l’une à Mégrine, l’autre à Paris, il enrage de ne pas
faire autre chose, de ne pas se surpasser. Chez lui, la passion, ou plutôt
l’obsession, de toujours changer de créneau est très forte, morbide. Comme
une dynamite malade de ne pas exploser, comme une bombe à retardement qui a
beaucoup tardé à éclater. Des idées plein la tête, il ne se sent pas
vraiment les coudées franches pour agir dans certaines directions qui lui
tiennent à cœur. A telle enseigne que, pour rire, il parle déjà de sa
retraite imminente, une manière à peine cachée d’exprimer sa déception.
Syndicaliste à son heure et à sa manière, il est resté cette fougue de la
jeunesse que rien n’apaise ou satisfait.
Mourad Ghattas est l’homme de la sécurité en Tunisie. La sécurité des
établissements publics et privés, c’est lui. Gabéssien de souche né en 1968,
il s’est exporté très tôt en France (à l’âge de 20 ans) pour poursuivre des
études de chimie-plastique. Il reviendra au bout de cinq ans à Gabès pour y
monter une petite entreprise d’emballage avec pour principal client le
Groupe chimique tunisien mais également le ministère de l’Agriculture.
Durant cinq années, son activité le mènera à composer avec l’usine
d’explosifs de Gafsa. Et c’est là que se produit chez lui une espèce de
révélation : la sécurité, à savoir celle des hommes à uniformes, et celle
des établissements. Ainsi naît fin 2002 Navy Planet, Société internationale
des équipements maritimes et de sécurité. La gamme des produits va de la
casquette jusqu’aux coffres-forts, en passant par la caméra de détection,
les portes de sécurité, le mécanisme des empreintes digitales, les scanners
des aéroports, et le transport des fonds, lui qui est déjà spécialiste dans
toutes sortes d’emballages de sécurité. D’ailleurs, la sécurité nécessaire
au transport des fonds est un créneau né bien après la création de Navy
Planet.
En gros, son activité consiste en l’installation et la maintenance des
produits de sécurité pour laquelle il emploie une petite vingtaine
d’ingénieurs et de techniciens spécialisés. Mais pour clients, il a les
institutions de l’Etat, tels que les ministères de l’Intérieur et de la
Défense pour ne citer que les plus importants.
Or, bien que la seule entreprise arabe spécialisée en la matière, Navy
Planet n’est pas l’unique en Tunisie. Mais cette concurrence, loin de le
malmener, l’a agrandie. Navy a su se faire un petit nom en Afrique du Nord
où elle compose notamment avec les Etats algérien, libyen, marocain et même
mauritanien. Sans parler de Navy dans la région parisienne.
A la fois consultant et conseiller en matière de sécurité, Mourad Ghattas
assiste ses clients pour le choix des offres de meilleurs qualité-prix et
surtout pour les termes des appels d’offres.
Sur le bureau de sa secrétaire, il est écrit : «Prière ne pas insister : M.
Ghattas ne reçoit jamais sans rendez-vous préfixé». Et de toute manière,
l’on n’a pas intérêt à lui tomber dessus à l’improviste : la bombe à
retardement risque de trouver un prétexte idoine pour exploser.
Il bout. Il bouillonne. Il trépigne sans cesse. A 40 ans, et malgré deux
