Siemens paye la débâcle de gros contrats industriels et chute en Bourse
Le patron de Siemens Peter Loescher le 24 janvier 2008 à Munich (Photo : Oliver Lang)
[18/03/2008 12:43:57] BERLIN (AFP)
Siemens
n’en finit pas de payer les erreurs du passé:
déjà empêtré dans un scandale de
corruption, le géant allemand a annoncé lundi
qu’il va perdre 900 millions d’euros à cause de la
débâcle de grands projets industriels.
Le groupe a fait savoir dans un communiqué qu’il devra
passer au deuxième trimestre de son exercice fiscal
décalé 2007/2008 (janvier à fin mars) cette
très lourde charge négative liée à la
“réévaluation de gros contrats”.
En clair, le poids lourd industriel, qui fabrique aussi bien
des trains que des turbines ou des ampoules
électriques, peine à suivre le rythme de commandes
passées ces dernières années, quand il ne
subit pas la défection de certains clients.
Par conséquent, Siemens renonce à ses objectifs
financiers pour l’exercice en cours, et s’abstient dans
l’immédiat d’en fixer de nouveaux.
Pour l’exercice en cours, Siemens tablait au départ sur
une croissance du chiffre d’affaires cette année deux
fois supérieure à celle de l’économie
mondiale. Et une progression du bénéfice
opérationnel au moins deux fois supérieure à
celle du chiffre d’affaires.
L’annonce a choqué à la Bourse de Francfort,
où l’action était en chute libre: vers 12h30 GMT,
elle perdait plus de 16%, bonne dernière de l’indice
vedette Dax.
“Tous les signaux sont au rouge chez Siemens”,
s’alarmait un courtier.
Dans le détail, Siemens a surtout eu les yeux plus gros
que le ventre dans son activité de construction de
centrales électriques “clé en main”, qui a
accumulé les gros contrats depuis 2004 mais a du mal
à suivre en raison de pénurie de main d’oeuvre et
de matière première.
Dans les transports, le groupe allemand fait face à des
retards dans l’attribution de gros contrats, par exemple la
prolongation d’une ligne du train à sustentation
magnétique Transrapid en Chine, et peine à
résoudre les problèmes de son tramway Combino, qui
présente de gros défauts techniques.
Autre écueil: l’annulation en Grande-Bretagne d’un
contrat passé par le ministère du Travail pour la
mise en place d’un nouveau système informatique.
“Il était grand temps” de donner ce coup de
balai dans le carnet de commandes, a estimé lors d’une
conférence téléphonique le patron de Siemens,
Peter Löscher.
M. Löscher, recruté l’an dernier auprès d’un
concurrent de Siemens pour faire le grand ménage dans
une entreprise pétrie de traditions, qui choisissait
jusque là toujours ses patrons en interne, a
assuré que “la lumière était faite”.
Le passage au peigne fin du carnet de commandes n’est
toutefois pas bouclé, et devrait durer jusqu’à la
fin du premier trimestre, autant dire que de nouvelles
mauvaises surprises ne sont pas exclues.
Cette opération vérité sur l’état des
contrats du groupe vient ternir encore un peu plus l’image
de Siemens, passé en quelques mois du statut de
fierté de l’industrie allemande à celui de vilain
petit canard.
Le principal chantier de M. Löscher est de solder enfin
une affaire de corruption sans précédent, qui a
mis à jour des caisses noires d’un montant d’au moins
1,3 milliard d’euros.
Ces fonds ont servi à faciliter l’obtention par Siemens
de gros contrats internationaux.
En plus de cela, Siemens est accusé d’avoir corrompu un
petit syndicat soi-disant indépendant, dans l’espoir
d’affaiblir un peu la puissante centrale IG Metall, qui
domine dans l’entreprise.
Comme si cela ne suffisait pas, le directeur financier du
groupe met en garde dans une interview à paraître
mercredi contre les risques liés au ralentissement
économique mondial. Siemens “a intérêt
à se préparer à des coups d’arrêt”,
a dit Joe Kaeser au magazine Euro.