La Fed garde sa priorité à la croissance et continuera à baisser ses taux
Façade de la Réserve fédérale américaine (Fed), le 30 janvier 2008 à Washington (Photo : Nicholas Kamm)
[19/03/2008 07:18:25] WASHINGTON (AFP)
Malgré
des inquiétudes accrues sur l’inflation, la
Réserve fédérale américaine (Fed) a
clairement dit lors de sa dernière réunion mardi
qu’elle plaçait toujours la croissance en tête de
ses priorités, ce que les analystes interprètent
comme la promesse de futures baisses de taux.
La banque centrale américaine a baissé de trois
quarts de point son taux directeur pour le ramener à
2,25%, et d’autant son taux d’escompte, qui est un taux
d’urgence, pour le fixer à 2,50% seulement.
Elle a, en commentaire, peint un tableau assombri de
l’économie. “Les perspectives se sont encore
affaiblies pour l’activité”, a-t-elle noté en
soulignant les tensions croissantes sur les marchés et
l’aggravation de la crise de l’immobilier.
Pour contrer ces risques, elle a répété
qu’elle agirait “en temps voulu, et si besoin est”
pour contrer les risques pesant sur la croissance, envoyant
un message sans ambiguïté.
“Le ton général du communiqué laisse
penser qu’il y a d’autres baisses des taux à
venir”, note Charmaine Buskas du groupe TD Bank.
“Le point-clef est de débloquer les marchés du
crédit et de relancer la machine. L’économie
finira naturellement par toucher un plancher, et en la
stimulant suffisamment la Fed peut adoucir
l’atterrissage”, ajoute l’économiste, qui
prévoit des baisses de taux
“considérables” à court terme.
Après la décision de la Fed, certains
économistes voyaient le taux directeur descendre
jusqu’à 1,50%, voire 1% d’ici la fin de l’année.
Les marchés ont sans doute compris la même chose,
qui ont terminé en nette hausse mardi à New York,
alors qu’ils espéraient une baisse des taux d’un point.
“Ce qui a fait réagir positivement les marchés,
c’est que la Fed a répondu très résolument
à l’escalade des risques économiques et de la
crise financière ces six derniers mois”, note Brian
Bethune du cabinet Global Insight.
Le président de la Fed Ben Bernanke, le 14 mars 2008 à Washington (Photo : Brendan Smialowski)
La banque
centrale américaine a tenu à répéter
qu’elle restait aux aguets et prête à agir avec la
rapidité et l’innovation dont elle a fait preuve ces
dernières semaines, en réduisant ses taux en
urgence, en lançant des lignes de financement
inédites et en organisant le sauvetage d’une banque en péril.
“La prochaine baisse des taux pourrait se produire
n’importe quand, pas uniquement lors de la prochaine
réunion qui est prévue les 29 et 30 avril”,
note l’économiste indépendant Joel Naroff.
Les analystes soulignent aussi que la décision de mardi
a été d’autant plus spectaculaire qu’elle s’est
faite sur fond de fortes réticences au sein même
de l’institution monétaire.
Deux gouverneurs ont voté contre la baisse des taux, du
jamais vu depuis 2002, en invoquant les risques de
dérapage de l’inflation. Le communiqué souligne
d’ailleurs amplement la hausse des incertitudes pesant sur
les prix.
“Cela signifie sans doute que dès qu’elle le pourra,
la Fed agira rapidement pour éponger les fortes baisses
de taux et l’ajout de liquidités afin de garder
l’inflation sous contrôle”, note M. Naroff.
Mais on n’en n’est pas là, d’autant que, si le
scénario de la Fed se déroule comme prévu, la
menace inflationniste se résorbera d’elle même
sous le coup du ralentissement de la croissance.
Pour l’instant, l’inflation ne fait tout simplement pas le poids.
“Pour la Fed, le choix n’est plus l’inflation contre la
croissance”, affirme Stephen Gallagher de la
Société Générale.
“Le dilemme, c’est l’inflation contre un écroulement
beaucoup plus sérieux du système financier, et le
risque financier pâlit en comparaison”, ajoute-t-il.