L’une de nos lectrices, particulièrement intéressée par l’actuelle crise de
la titrisation qui pourrait être la plus grave depuis la seconde guerre
mondiale, vient de demander notre opinion sur le sujet, avec une question
directe : ‘’Selon vous, faut-il interdire la titrisation?’’
Cette question est délicate car, en vérité, on ne peut y répondre par
l’affirmative, ni par la négative. Tout dépend de la manière dont ces
produits (forts simples en principe) sont maniés.
Il faut d’abord savoir que la titrisation est une technique financière qui
consiste classiquement à transférer à des investisseurs des actifs
financiers tels que des créances (par exemple des factures émises non
soldées, ou des prêts en cours…) en transformant ces créances, par le
passage à travers une société ad hoc, en titres financiers émis sur le
marché des capitaux.
Vendre ce genre d’actifs pour se financer n’est pas une technique financière
complexe mais c’est l’enveloppe en jeu qui rend les choses très délicates.
Imaginez, 500 millions d’euros est un montant ordinaire sur ce marché. De
plus, il faut se poser la question de la capacité de l’acheteur à analyser
les risques du portefeuille.
Ceci étant dit, c’est la crise des subprimes d’août 2007 qui, la première, a
mis en lumière certaines dérives dans l’utilisation de la titrisation des
créances immobilières aux États-Unis. Le marché des subprimes en particulier
a gonflé à des niveaux jamais vus grâce à l’utilisation de la titrisation
car plus les organismes de crédits titrisaient leurs prêts déjà octroyés,
plus ils avaient de finance pour en octroyer de nouveaux.
De plus, les subprimes titrisés ont été mélangés à d’autres produits et re-titrisés
plusieurs fois successives à l’échelle mondiale, de sorte qu’il soit devenu
très difficile de savoir qui détient de produits liés à des subprimes et en
quelle quantité. Ont été mis en cause dans cette crise des subprimes tant la
qualité des créances amalgamées dans les portefeuilles titrisés que la
liquidité de ces titres sur le marché et le travail des agences de notation
financières.
Vous l’avez compris, alors que les produits et les structures deviennent de
plus en plus complexes, le danger le plus grave réside dans le fait de
détourner ces produits de leur usage premier et d’en faire des ‘’mutants’’
dont il est impossible de prédire le comportement à venir !
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