La Banque mondiale réhabilite la petite agriculture

La Banque mondiale réhabilite la petite agriculture

Par Abou SARRA

La Banque mondiale estime que la croissance économique provenant de
l’agriculture est de deux à quatre fois plus efficace pour la réduction de
la pauvreté que la croissance économique générée par d’autres secteurs.

 

Dans son rapport thématique annuel 2008, consacré cette année à
«l’agriculture au service du développement», la Banque mondiale reconnaît,
sans ambages, que l’agriculture est essentielle pour réduire la pauvreté.

 

Il s’agit d’une importante réhabilitation de ce secteur, voire d’une avancée
majeure dans la pensée développementale de l’institution de Brettons Wood
qui n’a pas fait de rapport sur l’agriculture depuis 25 ans. C’est pour dire
qu’il s’agit bien d’un tournant qui ne manque pas d’enjeux.

 

Présenté, mercredi 2 avril 2008, à Tunis, par le professeur Alain de Janvry
(université de Californie), le rapport, dont il est le co-auteur, traite de
trois grandes questions : Quelles contributions l’agriculture peut–elle
faire au développement ? Par quels moyens peut-on efficacement mettre
l’agriculture au service du développement ? Comment mettre en œuvre une
stratégie de développement agricole qui soit au service du développement ?

 

Le principal message du rapport est que l’agriculture reste un instrument
clé pour atténuer la pauvreté en milieu rural, réduire les disparités
villes-campagnes, créer des emplois et diversifier l’économie des pays. «Une
stratégie agricole dynamique au service du développement peut profiter à 900
millions de ruraux qui vivent avec moins d’un dollar par jour, et dont la
plupart vivent de l’agriculture», souligne Robert B. Zoellick, résident du
Groupe de la Banque mondiale.

 

En dépit de ce potentiel indéniable, le rapport fait remarquer que les
investissements des gouvernements et des bailleurs de fonds n’ont pas été
toujours en rapport avec ce potentiel au cours des vingt dernières années.

 

Pis, relève le rapport «alors que 75% des pauvres vivent en milieu rural et
que pour la plupart d’entre eux l’agriculture est la source principale de
revenu, 4% seulement de l’aide au développement vont à l’agriculture dans
les pays en développement».

 

Le rapport ajoute que plusieurs nouveaux facteurs à l’origine de la
précarisation de la vie rendent impératif la réhabilitation de la petite
agriculture.

 

Parmi ces facteurs figurent l’accroissement de la demande des denrées
alimentaires, des aliments pour bétail et des biocarburants. Autres
difficultés structurelles : la flambée des prix de l’énergie, la rareté
accrue de la terre arable et l’eau, les effets du changement climatique…

 

Toujours selon le rapport, tous ces éléments se conjuguent pour accroître la
pression sur la disponibilité et l’approvisionnement en produits
alimentaires, contribuer à l’incertitude des prix, et aggraver la
vulnérabilité des consommateurs les plus pauvres.

 

Le rapport, un consensus entre gouvernements et Organisations non
gouvernementales (ONG), ne se limite pas à se poser des questions et à faire
des constats, il apporte aussi des réponses.

 

Globalement, le rapport appelle à investir plus dans l’agriculture dans les
pays en voie de développement et conditionne la réalisation des objectifs du
millénaire au développement de la petite agriculture familiale. Une des
principales conclusions du rapport va jusqu’à souligner que l’objectif de
réduire de moitié la pauvreté extrême et la faim à l’horizon 2015 ne sera
jamais atteint que si on donne plus d’intérêt au secteur agricole dans les
stratégies de développement.

 

Il s’agit également d’exploiter à bon escient les voies de sortie de la
pauvreté qu’offre l’agriculture. Parmi celles-ci figure l’orientation des
petits et moyens exploitants agricoles vers des filières à haute valeur
ajoutée : horticulture, aviculture, aquaculture, produits laitiers et
services liés à la petite agriculture.

 

Le rapport présente une stratégie en quatre points pour développer
l’agriculture sur des bases solides. La démarche à suivre consiste à
identifier le potentiel existant et d’élaborer un échéancier pour sa
réalisation, à mettre en place un environnement incitatif à l’investissement
dans le secteur, à proposer des projets viables et réalisables, et enfin, à
évaluer la capacité de production des uns et des autres (gouvernements,
producteurs…).

 

Seule zone d’ombre dans ce rapport, les Organismes génétiquement modifiés (OGM)
sont présentés comme un potentiel à réaliser pour les pauvres.

 

Autre proposition plus concrète : la Banque mondiale va mettre la main à la
poche. Elle entend augmenter son soutien à l’agriculture et au développement
rural après un déclin de ses prêts pour ce secteur dans les années 80 et 90.

 

Une bonne nouvelle …… non !