Grâce à ses 27 laboratoires, l’industrie pharmaceutique tunisienne
assure déjà une autosuffisance en médicaments à concurrence de 47%. Mieux :
la Tunisie exporte aujourd’hui sur des pays naguère nos propres
fournisseurs.
Les patrons des laboratoires pharmaceutiques de Tunisie ont eu récemment
comme une prise de conscience : ils ont investi des milliards, construit des
bâtiments selon les normes internationales (et même un peu plus), ramené une
technologie de pointe, fait leur preuves sur le marché local et extérieur
avec des médicaments de grande qualité, mais négligé de communiquer
l’information, le consommateur tunisien n’étant pas au fait de tout ce
qu’ils font ni, encore moins, de la réputation qu’ils sont parvenus à se
faire sur maints marchés étrangers. Deux d’entre eux ont agi dans ce sens.
Il s’agit des labos Médis et Unimed qui ont invité la semaine dernière les
médias à apprécier de visu et de tout près le degré de maturité et de
professionnalisme qu’ils ont atteint dans un domaine resté jusqu’à il y a
une petite vingtaine d’années le propre des Européens et des Occidentaux.
Bon an mal an, le marché tunisien du médicament consomme pour 400 millions
de dinars. Une enveloppe qui, à 1989, était entièrement déboursée en
devises, le médicament étant totalement importé. Avec l’arrivée progressive
des laboratoires tunisiens, aujourd’hui au nombre de 27 dont 3 étrangers,
c’est environ 65% des médicaments qui sont fabriqués dans notre pays et
représentant 47% de l’enveloppe globale. Malgré le contrôle drastique du
ministère de la Santé Publique qui intervient en amont, en aval et durant
tout le processus de fabrication, les laboratoires tunisiens ne vont pas
s’arrêter en si bon chemin, leur objectif visant l’autosuffisance du pays.
Mais une autosuffisance qui n’atteindra pas les 100%. Déjà que la totalité
des matières premières est importée (et ce n’est pas seulement le cas de la
Tunisie, il n’y a que trois ou quatre pays dans le monde qui les
fabriquent), l’on juge irraisonnable d’investir des dizaines de millions de
dinars pour quelques médicaments dont le marché ne consommera que pour
quelques milliers de dinars. Et c’est ce qu’on pourra qualifier
d’autosuffisance intelligente. Car l’industrie pharmaceutique tunisienne est
en train de fabriquer des médicaments onéreux pour des prix de vente
publique à 30% moins chers. Et c’est là tout l’avantage : la même qualité
(efficacité, s’entend) pour des prix nettement moins chers.
Or, en s’attaquant à des médicaments généralement très chers, les labos
tunisiens sont parvenus, non seulement à mettre un terme à leur importation,
mais, mieux, à les exporter sur des marchés autrefois nos propres
fournisseurs, tels la Jordanie. C’est le cas, probablement entre autres, de
Médis et Unimed qui exportent sur une bonne dizaine de pays africains et la
Jordanie. Et ce n’est pas tout. Médis, présente également sur le Maroc, la
Libye et l’Algérie, est en passe d’être certifiée au Canada pour y
commercialiser certains de ses produits, tout comme en Tchéquie. Sur le
marché local, Médis, à elle seule, est parvenue à épargner au pays une
enveloppe de 18 millions de dinars (c’est-à-dire : leur équivalent en
devises). Autrement dit, elle a une part de marché qui avoisine les 5%. Même
chose, ou presque, pour Unimed qui en accapare quelque 2%.
Médis, à Nabeul, présente à Annaba (Algérie) avec INPHA Médis, produit les
formes stériles, à savoir : les ampoules, les petits flacons, les formes
lyophilizées, les carpules dentaires, les collyres, les grands flacons et
les seringues. En d’autres termes, elle agit dans les domaines de
l’anesthésiologie, la diabétologie, la dermatologie, la cardiologie,
l’allergologie, etc. Son site de production sera, d’ici fin 2008, conforté
par Médis 2 et Médis 3 en vue de s’attaquer aux gélules et comprimés.
Unimed, à Kalaâ Kébira, vient pour sa part d’élargir sa gamme en adjoignant
les solutions Ophta, ORL, les liquides injectables, les poudres pénicillines
et les céphalosporines injectables.
MM. Lassaâd Boujbel (Médis) et Ridha Charfeddine (Unimed) ne cachent pas
leurs ambitions : s’attaquer dans les petites années qui viennent aux
marchés européens et occidentaux, certes grâce au partenariat, mais avec un
esprit de gagnant-gagnant et d’égal à égal, le produit tunisien n’ayant à se
reprocher mais, plutôt, tout à gagner.