[16/04/2008 16:06:29] BRUXELLES (AFP) L’inflation a été encore plus forte que prévu le mois dernier dans la zone euro, renforçant les craintes d’un emballement de la hausse des prix mondiaux poussés par l’envolée du pétrole et des produits alimentaires. Dans les quinze pays de la zone euro, l’inflation s’est établie en mars à 3,6% sur un an, a indiqué mercredi l’Office européen des statistiques Eurostat. En un mois, les prix ont bondi de 1%. C’est encore un peu plus que les 3,5% prévus dans une première estimation publiée fin mars. Il s’agissait alors déjà d’un record, après 3,3% en février et 3,2% en janvier. La publication de ce chiffre a entraîné une forte poussée de l’euro, qui a touché mercredi un nouveau sommet à 1,5970 dollar. Il y a un an, l’inflation était de seulement 1,9%. Mais elle ne cesse de s’emballer. “C’est un phénomène mondial, général. Il n’y a pas un seul pays aujourd’hui qui échappe à ces tensions inflationnistes”, souligne Nicolas Bouzou, économiste chez Asterès. Aux Etats-Unis, où les chiffres ont également été publiés mercredi, les prix à la consommation ont connu une hausse encore plus prononcée, de 4% sur un an en mars. Et en Chine, ils ont bondi de 8,3% le mois dernier.
Les prix de l’énergie sont en cause, avec un baril qui désormais est proche de 115 dollars. Mais pour Sylvain Broyer, économiste chez Natixis, c’est “principalement l’alimentation” qui pousse l’inflation aujourd’hui, grevant le budget des ménages et donc leur pouvoir d’achat. En Chine, la hausse des coûts des produits alimentaires a atteint 21% au premier trimestre. “Ce qu’on voit sur les deux ou trois derniers mois, et qui est relativement nouveau, c’est l’inflation alimentaire”, y compris dans les pays industrialisés, qui “est entre 5 et 6% aux Etats-Unis et en zone euro”, explique Sylvain Broyer. Dans la zone euro, elle s’est établie à 6,2% en mars sur un an, contre seulement 1,9% il y a un an. Elle est aussi élevée que lors de la crise de la vache folle, en 2001-2002, souligne l’économiste. Pour lui, ce phénomène “va durer longtemps”, et s’explique par la forte demande de matières premières au niveau mondial, mais aussi par une “bulle spéculative”. “Avec la crise financière, les matières premières servent actuellement de valeur refuge aux investisseurs, qui fuient les actifs risqués comme les actions”, explique-t-il. De ce fait, le prix des produits alimentaires pourrait être en 2008 supérieur d’environ 20% à ce qu’il était l’année dernière, selon lui. Ce phénomène cependant, frappe beaucoup moins l’Europe que les pays émergents, comme la Chine, plus dépendants de l’alimentation. Celle-ci représente en effet seulement quelque 12% du panier de consommation des ménages en Europe, contre 60% en Inde et 30% en Chine. Reste qu’en Europe comme ailleurs, cette forte inflation, qui pèse sur le pouvoir d’achat des ménages, alimente les revendications de hausses salariales. La Banque centrale européenne s’en inquiète. Elle redoute qu’elles n’entraînent une “spirale inflationniste”, les hausse de prix se répercutant sur les salaires puis sur l’ensemble de l’économie. Pour Nicolas Bouzou, la grève récente à l’usine Dacia (Renault) en Roumanie, qui s’est terminée par un accord pour une majoration salariale, est “très symptomatique” d’un “nouveau facteur inflationniste” que l’on voit “dans beaucoup de pays émergents” et pourrait se développer aussi en Europe centrale. “La convergence des salaires est à la hausse dans les pays émergents”, mais la modération salariale devrait cependant “durer chez nous”, en Europe de l’Ouest, estime pour sa part Sylvain Broyer. |
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