Le microcrédit : les Fonds de la dignité


Par Mohamed BOUAMOUD



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II – ENDA Tunisie

 

ENDA (abréviation anglaise pour Action pour l’environnement et le
développement) est un concept né à Stockholm (Suède) lors de la Conférence
des Nations unies sur l’environnement en 1972. Lors de cette même
Conférence, le forum des ONG a fait remarquer que sans développement dans
les pays du Sud il ne saurait y avoir d’environnement. Ainsi est né en 1974
un programme de formation ‘‘Environnement et développement’’ dit ENDA. En
1985, est née au Sénégal ENDA Tiers-monde pour l’Afrique avec 60 unités
spécialisées, chacune, dans un domaine quelconque (santé, sida,
environnement, désertification, etc.).

 

ONG, ENDA inter arabe est, elle, née en 1995 pour devenir la première
institution en Tunisie à avoir importé le modèle international de la
microfinance.

En fait, ENDA Tunisie est créée en 1990 par le couple Michael Philip
Cracknell (Britannique) et Essma Ben Hamida (Tunisienne) dont la première
activité fut le projet d’aménagement du parc Euchkel, un projet financé par
l’U.E. à hauteur de 350 mille dinars.

 

En 1993, le duo réalise l’absence d’association de développement économique
dans les quartiers populaires du grand Tunis, et que les femmes sont
capables de faire bien des choses mais sans moyens réels. Le constat était
précis à la Cité Ettadhamen où, après Mnihla, le couple allait opérer une
bonne dizaine d’années. En somme, les promoteurs de ENDA Tunisie y
reconnurent des cas de microcrédit. Attendu la forte demande qu’ils y
rencontrèrent, et après moult activités diverses, ils se spécialisèrent dans
le soutien des micro-entrepreneurs par le microcrédit et la formation. Nous
sommes là en 2001.

 

1) Le microcrédit et ses conditions

Etant entendu que le microcrédit est destiné aux personnes non bancables
(qui ne peuvent avoir recours normal à la banque), il est attribué à toute
personne ayant un projet, du moins ayant une idée claire de ce qu’elle
voudrait faire, soit une activité génératrice de revenus viables. Sans
garantie, le microcrédit, que l’on peut obtenir en 24 heures, va
progressivement de 200 dinars jusqu’à 5 mille dinars.

 

Cette condition de la progression (car on ne peut sauter les étapes) vise
trois buts : ne pas enfoncer le client dans l’endettement qu’il pourrait ne
plus savoir gérer, limiter donc le risque du non recouvrement par ENDA, et
surtout habituer le client au remboursement, ce qui ferait de lui un client
fidèle ayant la possibilité de prétendre, au terme de chaque remboursement à
temps de son crédit, à un deuxième, puis un troisième, etc., crédit.

 

Chez ENDA, le microcrédit est remboursé sur 6-7 mois à un taux d’intérêt de
2 % fixes par mois (chaque mois on paie le principal et le coût du prêt, les
2 %).

En fait, il y a une autre condition pour le bénéfice d’un microcrédit mais
qui ne constitue plus un vrai obstacle : c’est d’être dans une région
couverte par ENDA. Or, celle-ci est pratiquement présente à travers ses 40
antennes dans maintes régions (lire plus bas).



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2) Les clients de ENDA

 

a) Le commerce (acheter pour vendre) étant la chose la plus aisée à faire,
60% des clients de ENDA sont donc de petits commerçants (produits
d’entretien, épiciers, pâtissiers, etc.). A cette catégorie, on apprend à
tenir une comptabilité pour ne pas confondre capital, charges et besoins
propres). Les autres 40 % sont constitués par les services (coiffeur, petit
photographe…) et notamment les artisans. A cette catégorie, est dispensée
une formation spécifique pour l’amélioration de la qualité à dessein de
pouvoir exporter selon les normes internationales.

 

b) A la date du 30 novembre 2007, les clients actifs de ENDA (actif : qui
dispose d’un crédit en cours de remboursement) sont au nombre de 62 mille
personnes. Avec le cumul (depuis sa création), ENDA a octroyé 270 mille
crédits pour un montant global cumulé de 128 millions de dinars. L’Organisation
estime à 95% le taux de remboursement à terme, ce qui n’est pas
catastrophique. En fait, entre ENDA et ses clients, il y a comme un message
de père à enfants : «Tant que vous me remboursez à temps, vous grandirez pas
à pas, et vous me permettez de venir en aide aux autres ; si vous ne
remboursez pas, je disparais à vos risque et péril, et au grand dam des
autres qui attendent d’être appuyés à leur tour ». Un message sans ambages
qui a permis la fidélisation de plus de 95% des clients de ENDA.

 

c) Contrairement à la BTS, les clients de ENDA sont des femmes à concurrence
de 80%, et des hommes pour le reste.

 

d) A fin 2007, l’expérience a montré que sur les 62 mille clients de ENDA,
environ 20 mille ont réellement la capacité d’évoluer vers la petite
entreprise, ce qui, une fois réalisé le rêve, serait le plus grand merci
qu’on puisse dire à ENDA. Sur les 40 mille restants, 85% semblent se
contenter de leur situation, cependant que 15% se sont montrés des ‘‘élèves
un peu paresseux’’ pour ne pas avoir avancé d’un centimètre.

 

3) Les autres produits ENDA

Le suivi et le contrôle de ses clients a permis à ENDA de constater que ses
‘‘enfants’’ en arrivent, devant un imprévu d’ordre familial ou à l’occasion
d’un Aïd quelconque, d’effectuer l’argent du crédit à d’autres besoins qui
n’ont rien à voir avec l’activité principale. Aussi, l’Organisation a-t-elle
créé d’autres produits : le prêt rapide (ramadan, aïd, etc.) remboursable
sur 3-4 mois ; le prêt logement (amélioration ou entretien quelconque du
logement) remboursable jusqu’à 36 mois ; et les prêts pour des occasions
ponctuelles (rentrée scolaire ou autre) : 100 dinars par enfants
remboursables sur dix mois. Mieux : en cas de décès ou d’incapacité du
client, ENDA prend en charge le reliquat du prêt en plus d’une indemnité
pour la famille.

 

4) Qui finance ENDA ?

Jusqu’à 2003, année lors de laquelle ENDA est devenue autonome
financièrement et n’a plus donc recours aux subventions, l’Organisation, qui
emploie 360 personnes à fin 2007, a bénéficié au départ de dons
(coopération, bailleurs de fonds, etc.) s’élevant à 4 millions de dinars : 2
MD pour les crédits, et 2 MD pour le fonctionnement. Depuis 2005, elle a
recours à des prêts commerciaux pour augmenter le capital nécessaire à
l’expansion de ses activités. Pour schématiser, on va dire que ENDA est une
banque qui emprunte de l’argent chez les banques pour octroyer des crédits à
ses clients non bancables.

 

5) Les antennes de ENDA

ENDA est présente à : Ettadhamen, El Omrane, Ariana, Douar Hicheri, Oued
Ellil, Tébourba, Hrairia, Ezzouhour, Sidi Hassine, Medina, Kabaria, La Marsa,
Le Kram, Mhamdia, Ben Arous, Bizerte, Grombalia, Nabeul, Jendouba, Béja, Le
Kef, Tejerouine, Siliana, Kairouan, Akouda, Sousse, Msaken, Moknine, Sfax,
Jbeniana, Sidi Bouzid, Bir Leh’fay, Kasserine, Feriana, Gafsa, Metlaoui,
Gabès, Tozeur et Jerba.

 

6) Petit comparatif

A titre d’exemple, ENDA-Maroc compte 1 million de clients ; ENDA-Egypte en
compte 700 mille ; et ENDA-Tunisie en compte 63 mille (dès janvier 2008).
Cela ne veut pas dire que tel pays est plus pauvre que l’autre, mais que
ENDA-Tunisie a encore du travail à faire dans notre pays.

 

7) La micro-finance dans le monde

 

• 3 milliards de personnes (50% de la population mondiale) vivent avec moins
de 2 dollars/jour

• 80% de personnes sont exclues des systèmes bancaires et financiers ;

• 10 mille institutions de micro-finance ;

• 150 millions de personnes sont bénéficiaires d’un microcrédit (ils étaient
10 millions en 1997) ;

• 84% des emprunteurs sont des femmes ;

• 30 milliards de dollars : c’est le montant du portefeuille global des
emprunteurs ;

• 335 dollars : c’est le montant du microcrédit moyen ;

• 90% : c’est le taux moyen de remboursement ;

• 30% : c’est le taux de la croissance annuelle de la micro-finance.

 

 

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