[17/04/2008 17:11:27] WASHINGTON (AFP) La banque d’affaires américaine Merrill Lynch a encore affiché de lourdes pertes au premier trimestre, dues à la nécessité de procéder à de nouvelles dépréciations massives d’actifs invendables, hérités de sa folle aventure sur le marché du “subprime”. Sa perte nette trimestrielle a atteint 1,9 milliard de dollars, alors qu’elle avait été bénéficiaire de 2,1 milliards de bénéfice un an plus tôt. Par action, la perte s’affiche à 2,19 dollars, nettement plus lourde que celle de 1,99 dollar attendue par les analystes. C’est son troisième trimestre consécutif dans le rouge, après des pertes de 2,2 milliards au 3e trimestre 2007 et de 9,8 milliards au 4e trimestre. Comme lors des trimestres précédents, la perte annoncée jeudi s’explique largement par des dépréciations massives d’actifs. Pour 6,6 milliards, ces ajustements portent sur la valeur de titres adossés à des créances (CDO), de crédits accordés aux fonds d’investissement et d’actifs garantis par des rehausseurs de crédit. La banque a aussi passé environ 3 milliards de dépréciations supplémentaires dans son bilan sur les titres liés à des crédits hypothécaires. Elle avait déjà effectué des dépréciations colossales depuis 6 mois, de 7,9 milliards au 3e trimestre, puis encore 11,5 milliards au 4e trimestre, portant le total des dépréciations d’actifs depuis 9 mois à près de 29 milliards. Merrill compte ainsi pour une bonne part des quelque 200 milliards de dépréciations des banques américaines depuis le début de la crise. C’est d’ailleurs pour l’instant la grande banque américaine la plus touchée par la crise du crédit, devant l’autre grande perdante de Wall Street, Citigroup, qui a déprécié près de 21 milliards d’actifs en 2007. Merrill est aussi la 2e banque mondiale la plus touchée après la suisse UBS. Ses pertes contrastent avec les bénéfices annoncés au 1er trimestre par ses grandes rivales Goldman Sachs, JPMorgan, Lehman Brothers et Morgan Stanley, mêmes si leurs bénéfices ont diminué en moyenne de moitié. Même Bear Stearns, qui a frôlé la faillite sur une crise de liquidités début mars et a dû se vendre à un prix bradé à JPMorgan, a affiché un résultat positif, quoique divisé par cinq, à 115 millions. Pour redresser ses finances, Merrill Lynch a annoncé encore 4.000 suppressions d’emplois par rapport à ses effectifs de fin 2007 (-10%). Ces coupes seront réalisées dans la division de banque d’investissement, ainsi que les fonctions supports. La banque de Wall Street avait déjà réduit ses effectifs d’environ 1.000 au début du trimestre, notamment dans sa filiale de crédit hypothécaire Franklin. La banque attend de ces suppressions d’emplois des économies de 800 millions en année pleine, mais il lui faudra aussi passer une charge de restructuration de 350 millions au 2e trimestre. Ses ennuis ne sont pas terminés: suite à ces résultats bien plus mauvais que prévu, l’agence Moody’s a annoncé jeudi réfléchir à un possible abaissement de sa note long terme, estimant que la banque risquait d’annoncer de nouvelles dépréciations de 6 milliards de dollars dans les prochains trimestres. “C’est l’un des trimestres les plus difficiles que j’ai vu en 30 ans à Wall Street,” a commenté son nouveau PDG John Thain qui a remplacé San O’Neal, débarqué en novembre quand a été révélée l’ampleur des pertes. “Nous nous attendons à encore (…) deux trimestres, plus lents et plus difficiles, mais nous avons aussi de l’espoir pour nos résultats de l’ensemble de 2008”, a-t-il dit lors d’une conférence téléphonique. M. Thain a aussi souligné que le niveau des liquidités de la banque avait augmenté depuis la fin 2007 pour atteindre 82 milliards, et qu’il n’avait donc pas besoin de lever de nouveau fonds, ce qui a rassuré les marchés. Il a rappelé que par des appels de fonds notamment en Asie, la banque avait levé ces derniers mois plus de 12 milliards, davantage que les pertes cumulées de 2007 et du 1er trimestre (9,8 milliards). Le produit net bancaire de Merrill Lynch a dégringolé pendant le trimestre de 69%, à 2,9 milliards, bien en dessous des 3,7 milliards attendus par les marchés, à cause d’un effondrement dans la branche obligataire. |
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