[24/04/2008 13:56:10] BRUXELLES (AFP) Le gouvernement italien est loin d’avoir sauvé Alitalia: la Commission européenne a fait état jeudi de “doutes sur la nature de l’aide” de Rome à la compagnie aérienne au bord de la faillite, laissant augurer d’un premier conflit avec le futur gouvernement Berlusconi. Le chef de gouvernement sortant Romano Prodi a décidé, en concertation avec son successeur désigné, d’accorder un prêt d’urgence de 300 millions d’euros à Alitalia. Les autorités italiennes ont fourni à la Commission européenne, lors d’une réunion mercredi après-midi, des documents que Bruxelles est en train d’examiner. “Mais il est déjà clair que dans les prochains jours, nous allons écrire aux autorités italiennes pour exprimer un certain nombre de doutes sur ces mesures (de soutien à Alitalia) et réclamer davantage d’explications”, a dit jeudi le porte-parole de la Commission pour les transports, Michele Cercone. Les Italiens “maintiennent que les mesures ne sont pas une aide d’Etat parce que le prêt est accordé à des conditions commerciales”, a-t-il ajouté. “Nous avons des doutes sur la nature des mesures.”
Il a souligné que même “un prêt aux taux d’intérêt du marché peut constituer une aide d’Etat si un prêteur commercial ne considère pas le bénéficiaire comme suffisamment sûr pour lui accorder un prêt”. Et Johannes Laitenberger, porte-parole du président de la Commission José Manuel Barroso, de résumer: “Y a-t-il aide d’Etat ou pas aide d’Etat ? Là est la question”. Une question cruciale: Rome a déjà volé au secours d’Alitalia lors de difficultés dans le passé. Les derniers versements remontent à 2001, la compagnie n’a donc plus le droit à des aides d’Etat jusqu’en 2011, martèle Bruxelles depuis plusieurs jours. Côté italien, “nous avons l’esprit très tranquille”, a assuré Maurizio Lupi, un responsable du parti de Silvio Berlusconi. “Le prêt d’urgence était selon lui un acte de responsabilité” du gouvernement. Rome joue la montre: Alitalia, qui perd au moins un million d’euros par jour, est plus que jamais au bord du précipice depuis le retrait lundi soir d’une offre de rachat par sa concurrente Air France-KLM. Mais beaucoup sont bien décidés à arrêter les frais. La compagnie aérienne irlandaise à bas coûts Ryanair a déjà annoncé une plainte auprès de la Commission pour empêcher l’octroi du prêt. Et “la patronne des patrons” italiens, Emma Marcegaglia, a aussi estimé que le prêt n’était acceptable que s’il débouchait sur un projet de reprise valable. Un haut responsable d’un grand pays européen a jugé qu’Alitalia avait un avenir, mais davantage “comme une partie” d’une alliance aérienne comme Air France-KLM ou Lufthansa-Swiss “que comme une compagnie indépendante, subventionnée par un Etat”. M. Berlusconi s’est fortement impliqué dans l’affaire Alitalia pendant la campagne législative italienne, en demandant notamment au président russe Vladimir Poutine une reprise des contacts avec Aeroflot. La polémique pourrait aussi empoisonner les débuts du prochain commissaire européen aux Transports, un Italien pas encore nommé mais déjà soupçonné de se montrer trop clément envers son pays d’origine. Même si Bruxelles réfute tout conflit d’intérêt. Cet Italien remplacera le Français Jacques Barrot, qui va passer à la Justice pour succéder à Franco Frattini, futur ministre des Affaires étrangères du gouvernement Berlusconi. Ce conflit potentiel n’empêche pas M. Berlusconi de se réjouir de récupérer le portefeuille européen des Transports: “Il est beaucoup plus intéressant pour nous de nous occuper d’infrastructures et de transports que d’homosexualité”, a-t-il déclaré à une chaîne de télévision italienne mercredi soir. |
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