[09/05/2008 10:17:46] BUENOS AIRES (AFP) Le gouvernement argentin, en rejetant cette semaine tout compromis avec les agriculteurs en colère, a une nouvelle fois prouvé qu’il n’était pas prêt à renoncer à son “modèle” économique de contrôle des prix, pourtant de plus en plus critiqué. La présidente argentine Cristina Kirchner l’a encore souligné jeudi en affirmant être “totalement convaincue” de suivre “le chemin nécessaire à la transformation du pays” qu’elle a résumé par la formule suivante: “travail et dignité, et que ceux qui ont plus, apportent plus”. Les agriculteurs argentins, grands bénéficiaires de la hausse des prix internationaux des matières premières agricoles, sont particulièrement visés par cette politique. La taxe à l’exportation de soja, principale richesse agricole du pays, a ainsi augmenté de plus de 25% en mars à 44% la tonne, et surtout, elle augmentera fortement et automatiquement à chaque nouvelle hausse du prix international de cet oléagineux. Ce système “mobile” est jugé inadmissible par les agriculteurs qui dénoncent une mesure anti-économique et une volonté d’extorsion de la part du gouvernement, sans souci de la rentabilité pour le producteur. D’une manière plus générale, ils dénoncent l’interventionisme tout azimuth du gouvernement sur le marché de la viande, du blé ou du lait, dans le souci de maintenir les prix des produits alimentaires le plus bas possible. Les exportations de viande ou de blé sont ainsi bloquées pour augmenter l’offre intérieure et peser sur les prix, au grand dam des producteurs qui ne profitent pas de l’envolée des prix mondiaux. Ces producteurs ont à plusieurs reprises averti le gouvernement des conséquences à long terme de cette politique: des vaches laitières, par exemple, transformées en “hamburgers”, faute de rentabilité suffisante, comme l’a à nouveau déclaré mercredi Eduardo Bussi, président de la Fédération agraire argentine, qui regroupe petits et moyens producteurs. Le gouvernement rétorque de son côté qu’il est inacceptable que les Argentins payent le prix fort pour le pain, le lait ou l’essence, autre produit dont les prix sont sévèremment contrôlés. Mais dans un pays qui exporte du pétrole, l’essence est désormais régulièrement rationné à la pompe, faute de capacités de raffinage et d’investissements suffisants de la part de compagnies qui estiment ne pas trouver leur compte. Et ces contrôles n’empêchent pas l’inflation qui atteint les 25% annuels, selon la plupart des experts, loin des 9% officiels. Le “modèle” argentin prévoit un contrôle des prix négocié secteur par secteur, voire imposé sous la menace de rétorsions de la part du très controversé secrétaire au Commerce Guillermo Moreno, ou obtenu après une descente de militants pro-Kirchner dans les supermarchés comme cela a eu lieu cette semaine. La plupart des économistes et jusqu’au ministre de l’Economie sortant, Martin Lousteau, préconisent pourtant des recettes plus orthodoxes, allant d’une réduction des dépenses publiques à une réévalutation du peso en passant par une hausse des taux d’intérêt. Le couple présidentiel formé de l’ancien président Nestor Kirchner et de son épouse Cristina, qui l’a remplacé à la tête de l’Etat le 10 décembre, refuse toutefois catégoriquement de “refroidir” l’économie. Car il ne fait guère de doutes que le pouvoir est toujours concentré entre les mains de l’ancien président. Cristina est la “figure esthétique d’un pouvoir qui est en dehors de la Casa rosada”, la maison rose, siège de la présidence argentine, a affirmé cette semaine devant des journalistes étrangers, Carlos Pagni, analyste politique au quotidien La Nacion. Cristina Kirchner “disposait d’une énorme opportunité pour corriger quelques erreurs de style et certaines distorsions économiques (forte inflation, économie subventionnée), mais rien ne s’est produit”, a déploré de son côté son homologue du quotidien Clarin, Julio Blanck. |
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