Les pays importateurs de brut tentés d’arrêter les subventions sur l’essence

 
 
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Une pompe à essence (Photo : Behrouz Mehri)

[14/05/2008 19:05:10] LONDRES (AFP) A 125 dollars le baril de brut, les subventions sur l’essence, en usage dans de nombreux pays émergents, deviennent un fardeau pour les importateurs : à l’image de l’Indonésie, certains veulent les abandonner mais d’autres, comme la Chine, les maintiennent pour éviter grogne populaire et inflation.

Dans nombre de pays émergents, les prix de l’essence sont maintenus à des niveaux artificiellement bas par les gouvernements, qui comblent l’écart entre le prix du baril et les prix à la pompe. Un schéma qui peut surprendre l’automobiliste français, habitué à voir au contraire l’essence lourdement taxée.

Ainsi, en Indonésie, pays importateur net de pétrole, un litre d’essence subventionnée s’achète aujourd’hui seulement 4.500 roupies (un demi-dollar).

Avec le doublement des prix du brut en un an, les subventions sur les carburants sont devenues un fardeau écrasant pour les pays importateurs de brut, qui vendent l’essence à un prix plafonné mais achètent l’or noir au prix fort: autour de 125 dollars le baril à New York actuellement.

Accusée par la Banque mondiale d’y consacrer une part trop importante de son budget, l’Indonésie a ainsi annoncé qu’elle allait limiter ces subsides.

D’autres importateurs de brut se sont engagés dans cette voie. Dès l’été dernier, la Syrie a ainsi annoncé une “hausse graduelle” des tarifs pétroliers. En mars, la Jordanie a elle aussi mis fin aux subventions, ce qui a entraîné une hausse des prix allant jusqu’à 76%. Et en Egypte, un projet de loi prévoyant une augmentation de 40 à 50% était à l’examen la semaine dernière.

L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a toutefois souligné mardi qu’il ne serait “pas facile” d’abandonner ces aides.

Bien qu’elles pèsent de plus en plus sur les finances publiques, celles-ci sont en effet vitales pour les foyers les plus modestes, déjà étranglés par la hausse des denrées alimentaires. Leur abandon partiel ou total est généralement synonyme de troubles sociaux.

En Birmanie, elles ont été à l’origine des manifestations de masse contre la junte l’an dernier.

Mardi, des centaines de personnes ont manifesté en Indonésie pour la deuxième journée consécutive, avec des banderoles affichant: “Augmenter le prix de l’essence est cruel” et “cela fera souffrir encore plus de monde”.

Autre inconvénient, la hausse des prix du carburant nourrit l’inflation, un mal endémique dans les pays émergents, qui cherchent au contraire à la juguler.

Pour ces deux raisons, la Chine, locomotive des économies émergentes, semble partie pour poursuivre sa politique de subventions.

D’une part, des protestations feraient mauvais effet avant les jeux Olympiques, et d’autre part l’Etat risquerait de laisser filer davantage l’inflation, qui a atteint 8,5% en avril, proche d’un record de 12 ans.

En outre, le gouvernement chinois, dont les caisses regorgent de devises étrangères, peut assumer de tels frais, ce qui n’est pas le cas de l’Indonésie.

“La Chine a récemment conforté sa politique de subventions en décidant de compenser les pertes de Sinopec et PetroChina (les raffineurs nationaux, ndlr) par des paiements mensuels”, confirme l’AIE.

Dans les pays exportateurs de pétrole, où l’essence est aussi souvent vendue à des prix inférieurs à celui du marché, la situation est tout autre : la flambée du brut leur procurant des revenus florissants, ils ont les moyens de brader leurs carburants.

 14/05/2008 19:05:10 – © 2008 AFP