Cyclone Nargis : le cauchemar des riziculteurs de Birmanie

 
 
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Champ de rizuculture, inondé après le passage du cyclone Nargis, près de Kyauktan, le 16 mai 2008 (Photo : Lisandru)

[18/05/2008 12:44:26] KYAUKTAN (AFP) Manian, riziculteur birman de 48 ans, devrait être en ce moment en train de préparer la terre pour repiquer son riz mais, quinze jours après le cyclone dévastateur Nargis, sa priorité est de nourrir et d’abriter sa famille.

La catastrophe dans le Sud birman, qui a fait plus de 133.000 morts et disparus selon un bilan officiel provisoire, a inondé la principale région agricole du pays et a détruit des stocks entiers de riz et de semence.

Des milliers de buffles et d’autres animaux de trait sont morts noyés et des champs à perte de vue sont encore couverts d’eau.

Des pluies saisonnières continuent de s’abattre sur Rangoun et le delta de l’Irrawaddy, région considérée comme le “grenier à riz” de la Birmanie et qui a été de loin la plus sévèrement affectée par Nargis.

Le commissaire européen au Développement Louis Michel, qui vient de se rendre en Birmanie en liaison avec la crise humanitaire immédiate (deux millions de sinistrés), s’est inquiété d’un “risque de catastrophe du niveau d’une famine” à plus long terme, dans un entretien avec l’AFPTV.

“Ma production (de riz) tombera à coup sûr cette année”, explique Manian qui tente de survivre avec ses proches dans le secteur de Kyauktan, au sud-est de la grande ville de Rangoun.

“Si nous pouvions labourer plus tôt, nous pourrions augmenter la récolte mais je dois auparavant trouver à manger pour ma famille et reconstruire ma maison”, souligne cet agriculteur.

“Je dois acheter de nouvelles semences parce que toutes celles que j’ai sont trempées et je ne peux pas les utiliser”, ajoute-t-il en précisant qu’il aurait besoin immédiatement de l’équivalent de 100 dollars pour des graines et des engrais, une somme qu’il n’est pas en mesure de réunir.

Selon l’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) des Nations unies, le gouvernement birman a déclaré avoir besoin de 240 millions de dollars pour acheter des semences et réparer des infrastructures agricoles dévastées par Nargis, alors qu’au moins 22% des rizières ont été totalement détruites.

Vingt millions de dollars supplémentaires seraient nécessaires pour remplacer, abriter et nourrir des animaux d’élevage.

“Le temps presse, c’est une course contre la montre”, avertit depuis Bangkok un porte-parole de la FAO, Diderik de Vleeschauwer.

“Si des semences de riz ne sont pas reçues d’ici 40 à 50 jours, le repiquage ne pourra avoir lieu à temps pour la récolte cette année” et “la sécurité alimentaire du reste du pays sera menacée jusqu’en 2009 inclus”, dit-il.

Selon des experts, le cyclone Nargis a mis en péril l’autosuffisance alimentaire de la Birmanie et a placé ce pays pauvre d’Asie du Sud-Est, gouverné depuis 1962 par des généraux, en situation de devoir importer du riz.

Avant Nargis, la Birmanie prévoyait des exportations pour compenser des pénuries au Sri Lanka et au Bangladesh liées à la crise du marché international des céréales.

“La Birmanie pourrait n’avoir d’autre choix que de se tourner vers des voisins comme la Thaïlande pour des importations de riz”, précise M. de Vleeschauwer.

 18/05/2008 12:44:26 – © 2008 AFP