Société Générale : l’audit interne épingle la hiérarchie “défaillante” du trader

 
 
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Détail de la façade d’une des tours de la Société Générale à La Défense, le 7 février 2008 (Photo : Joel Saget)

[23/05/2008 21:56:21] PARIS (AFP) Le rapport final de la Société Générale épingle la hiérarchie “défaillante” de Jérôme Kerviel ainsi qu’un “environnement général” dans son service qui empêchait les contrôleurs d’excercer un “véritable regard critique” sur les opérations du trader.

Ce rapport de 71 pages, réalisé par l’Inspection générale de la banque et rendu public vendredi, relève en outre des “indices de complicité” d’un assistant trader.

Pour l’Inspection, “les manoeuvres et l’habileté du trader à dissimuler ses positions, ses risques et ses résultats” lui ont permis d’éviter jusqu’en janvier 2008 la détection de ses positions.

Mais “la fraude a été facilitée ou sa détection retardée par les faiblesses de la supervision du trader et du dispositif de contrôle des activités de marché”, écrivent les inspecteurs.

“La hiérarchie du trader, qui constituait le premier niveau de contrôle, s’est avérée défaillante dans la supervision de ses activités”, accuse le rapport.

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Jérôme Kerviel, le 18 mars 2008 lors de sa sortie de la prison de la Santé (Photo : Joel Saget)

Le supérieur immédiat de M. Kerviel, qui a été entendu par la justice en qualité de témoin, “a fait preuve d’une tolérance inappropriée à la prise de positions” non autorisées de M. Kerviel sur les marchés.

Dans un rapport intermédiaire publié à la mi-février, l’Inspection avait refusé de se prononcer sur la responsabilité de la hiérarchie directe du jeune homme, arguant que l’enquête judiciaire en cours ne lui avait pas permis de rencontrer tous les protagonistes de l’affaire.

Jérôme Kerviel est mis en examen pour “faux et usage de faux”, “introduction dans un système de données informatiques” et “abus de confiance”, dans cette affaire qui a éclaté le 24 janvier dernier.

Pour l’Inspection, le montant du résultat dégagé par le trader aurait dû alerter sa hiérarchie. Entre 2006 et 2007, il a été multiplié par six, jusqu’à représenter 27% du résultat du “desk Delta One”, le département d’arbitrage sur options pour lequel travaillait M. Kerviel.

Décrit comme manquant d’expérience, son supérieur direct “n’a pas été suffisamment encadré dans ses nouvelles fonctions”, avance le rapport.

Il étaye par ailleurs l’hypothèse d’une complicité interne en révélant que “de nombreuses opérations de nature frauduleuse de Jérôme Kerviel ont été saisies” par un assistant trader. Cet assistant a été entendu en avril comme témoin assisté par les juges en charge de l’affaire.

Dans un rapport séparé, le cabinet d’audit PriceWaterhouseCoopers (PWC), chargé d’un diagnostic sur les “faiblesses” du contrôle interne et d’une analyse critique du plan d’actions élaboré par la banque pour éviter qu’un tel événement ne se reproduise, pointe du doigt la “culture” du desk Delta One qui n’aurait pas aidé les contrôleurs à tenir tête aux traders.

Il note que les moyens affectés aux fonctions de contrôle ont crû moins vite que les volumes d’opérations du pôles actions, le dispositif informatique semblant par exemple un peu dépassé.

Il décrit surtout un desk en “surchauffe”. “Le développement des activités de Delta One et la croissance significative de ses résultats se sont accompagnés de l’apparition de pratiques non autorisées telles que des dépassements fréquents de limites de risque de marché, ou encore le lissage ou le transfert de résultat entre traders”, écrit PWC.

Il évoque enfin un “environnement général”, qui “n’a pas favorisé l’émergence de fonctions de support fortes”. Il en est résulté un “déséquilibre” entre les traders de la salle de marché et le personnel en charge du contrôle qui n’a pas été “en mesure de développer un véritable regard critique inhérent” à son rôle.

 23/05/2008 21:56:21 – © 2008 AFP