[31/05/2008 08:00:39] ILULISSAT (AFP) Dans la petite station-service anonyme datant des années 60 à Ilulissat, dans l’ouest du Groenland, les 4×4 défilent pour faire le plein d’essence à …3,77 couronnes danoises le litre, c’est à dire 60 centimes d’euros. “Et encore je trouve le prix un peu élevé”, dit Julius Saldgreen, 49 ans, au volant de sa jeep, qui vient de chercher ses deux filles à l’école. Pourtant il ne s’agit ni de promotion ni d’opération coup de poing, mais de prix normaux au Groenland, la plus grande île au monde, peuplée de 57.000 habitants seulement. A titre de comparaison, le litre de sans plomb 95 s’est vendu 1,52 euro en France et 1,49 euro en Allemagne cette semaine. Et le diesel 1,45 et 1,48 euro respectivement. Le gouvernement local du Groenland, territoire danois d’outre-mer qui bénéficie d’une autonomie interne depuis 1979, a décidé depuis longtemps d’avoir le monopole de la distribution d’énergie, détaxant non seulement le super, mais aussi le gazole et le mazout pour le chauffage. “Nous le faisons afin de venir en aide notamment aux chasseurs et pêcheurs qui ont de faibles revenus, et parce que les conditions de vie en Arctique sont difficiles avec de longs hivers très rigoureux”, a expliqué à l’AFP Hans Enoksen, chef du gouvernement local groenlandais.
Pour maintenir ces bas prix hors taxes même dans les coins les plus reculés de l’île, le gouvernement local a signé des contrats longue durée à prix stable avec les compagnies pétrolières et entreposé d’énormes quantités de pétrole dans ses nombreux réservoirs disséminés le long de ses côtes. Une “attitude sage” saluée par les Groenlandais. Mais certains sont mécontents, à l’instar de Jan, l’un des 30 chauffeurs de taxi d’Ilulissat, qui trouve que “le prix du carburant a trop augmenté ces derniers temps”, de 5 oeres (centimes de couronnes) par litre. Per, son collègue ne partage pas cet avis, estimant le prix à la pompe à sa juste mesure. “Mais il ne faudrait pas qu’il atteigne les 5 couronnes comme c’était le cas il y a quelques années, ce qui avait entraîné notamment des protestations des pêcheurs qui ont bloqué l’usine de conditionnement des produits de la mer Royal Greenland afin de l’obliger à augmenter ses prix d’achat du poisson, seul moyen de contrer la hausse du gazole”. “Une augmentation des prix de l’essence conduirait à une hausse des prix de transport, et une relance de l’inflation. Elle pénaliserait les consommateurs, et surtout les pêcheurs et chasseurs déjà touchés par le réchauffement climatique qui menace leur gagne-pain”, explique-t-il. A Ilulissat, ville classée au patrimoine mondial de l’humanité, dans le port de pêche où sont amarrés des bateaux colorés pêchant flétan et crevettes, les pêcheurs paient leur gazole au quai au même prix que l’essence. “Sinon on aura du mal à joindre les deux bouts d’autant que le réchauffement climatique fait reculer le glacier d’Ilulissat”, parmi les plus actifs dans le monde, déversant ses icebergs qui se brisent en mille morceaux et tapissent le fjord, “où on a beaucoup de mal à naviguer en ce moment et placer nos lignes”, explique Knud Kruse, 41 ans, pêcheur depuis l’âge de 19 ans. “Je pense que nos dirigeants comprennent bien qu’on a besoin de carburant bon marché sinon ce serait étouffer ce métier, le premier des insulaires depuis la nuit des temps”, estime-t-il, car “lorsqu’on nous paie le flétan à 6,25 couronnes (90 centimes d’euros) le kilo, la moindre augmentation du gazole nous touche de plein fouet”. |
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