LME : des députés sous pression des lobbies pour ou contre une “loi Leclerc”

 
 
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ême nom, le 6 décembre 2007, dans un magasin Leclerc d’Ivry-Sur-Seine (Photo : Martin Bureau)

[31/05/2008 14:06:31] PARIS (AFP) L’examen du projet de loi modernisation de l’économie (LME) se déroulera sous la pression du lobby des grandes surfaces et celui –aux intérêts contraires– de leurs fournisseurs, qui craignent une loi taillée sur mesure pour les grandes enseignes.

“Il suffit que Michel-Edouard Leclerc (patron des centres du même nom) dise que la loi soit bonne pour que tout le monde se méfie de la LME”, soupire le député qui la défendra à l’Assemblée nationale, l’UMP Jean-Paul Charié.

“Le fait que Michel-Edouard Leclerc apparaisse comme le seul soutien apparent à ce projet ne passe pas bien au groupe UMP et dans notre électorat”, ajoute un haut responsable du parti présidentiel.

“C’est normal”, répond Michel-Edouard Leclerc joint par l’AFP. “L’idée de concurrence ou de liberté des prix n’est pas la mieux partagée chez les parlementaires.”

La LME concerne directement les hypers et leurs fournisseurs car elle prévoit que les centrales d’achat des grandes surfaces pourront négocier librement leurs prix avec les grossistes (multinationales, grandes marques, mais aussi PME ou agriculteurs).

“Michel-Edouard Leclerc n’a pas besoin de faire de lobbying puisqu’il parle directement au président de la République et c’est lui qui l’a convaincu d’aller jusqu’au bout de cette loi. On considère que le rapport de force est plutôt en faveur de la distribution”, déplore le président de l’Association nationale des industries alimentaires (Ania) Jean-René Buisson, reçu à l’Elysée il y a quinze jours avec la Fnsea.

M. Leclerc, lui, préfère invoquer l’intérêt général, promettant “une inflation divisée par deux (…) si le gouvernement tient face à la pression des industriels, et si la loi est appliqué à la rentrée”.

Il se réserve d’ailleurs le droit de “publier les augmentations tarifaires de la rentrée” pendant le débat parlementaire, pour faire monter la pression au besoin.

La grande distribution, mais aussi des enseignes du bricolage, les organismes de gestion agréée, des chambres du commerce, les commissaires au compte, les libraires… “Tout le monde fait pression. On reçoit des fax, des mails de la moindre organisation professionnelle de 50 personnes”, lâche le président UMP de la commission des Affaires économiques Patrick Ollier.

Agacés, les députés UMP ont d’ailleurs laisser filtré une lettre d’une enseigne du bricolage aux PME qui la fournissent, pour protester contre une disposition du projet de loi (réduction des délais de paiement aux PME).

“Si le gouvernement décide de raccourcir les délais de paiement, nous vous proposons que vous rachetiez les stocks de votre entreprise présents dans nos magasins (…). Nous espérons, naturellement, que nos efforts conjoints de lobbying auprès des parlementaires et membres du gouvernement porteront leurs fruits”.

“C’est scandaleux, c’est du chantage, du terrorisme commercial!”, s’étrangle le rapporteur Charié (UMP), auteur d’un livre bleu sur le lobbying. “Il faut absolument que nous les députés sortions de cet ensemble d’intérêts particuliers pour servir l’intérêt général. Il faut qu’on ait un peu de courage”.

“Autant le député doit avoir l’humilité d’entendre les experts, autant il ne doit pas se laisser impressionner par la virulence de certains groupes de pression”, ajoute-t-il.

Certains lobbyistes se montrent “un peu trop insistants”, souligne Michel Raison (UMP). “Suivant leur capacité technique, ils nous susurrent ou nous envoient des amendements tout rédigés. Un organisme m’en a envoyé 15. Je n’en ai retenu qu’un”, explique le député de Haute-Saône. “Ils n’étaient pas contents que je choississe…”.

 31/05/2008 14:06:31 – Â© 2008 AFP