La zone euro va devoir attendre longtemps sa baisse de taux directeurs

 
 
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ège de la Banque centrale européenne, le 6 juin 2007 à Francfort (Photo : Martin Oeser)

[01/06/2008 10:45:38] FRANCFORT (AFP) L’économie de la zone euro s’essoufle mais l’inflation record empêche une baisse de taux directeurs: la Banque centrale européenne reste prise au piège et semble condamnée à l’immobilisme pour de très nombreux mois.

Les trente économistes sondés par l’AFP et l’agence Thomson Financial News (TFN) sont unanimes: le principal taux directeur de la zone euro –qui détermine le niveau du crédit pour les entreprises et les particuliers– va rester à 4% à l’issue de la réunion du conseil des gouverneurs de jeudi.

Cela fera un an qu’il stationne à ce niveau.

Entretemps, la crise financière liée à la débâcle des crédits immobiliers à risques américains s’est propagée: les Etats-Unis, au bord de la récession, ont plusieurs fois réduit leur taux, la Grande-Bretagne aussi, la BCE non.

Pire, l’institution européenne, qui va aussi célébrer ses dix ans d’existence en grande pompe lundi lors d’une cérémonie à l’Opéra de Francfort, n’hésite pas à menacer implicitement de relever le loyer de l’argent pour combattre les menaces d’une surchauffe inflationniste.

En mai, le pétrole cher a de nouveau propulsé comme en mars l’inflation à 3,6% sur un an, un pic depuis la création de la zone euro en 1999, selon un chiffre provisoire d’Eurostat. Depuis de nombreux mois, les gardiens de l’euro expliquent que cette flambée est provisoire, mais ont dû admettre qu’elle dure plus longtemps que prévu.

Le danger d’une spirale inflationniste –alimentée par des augmentations élevées de salaires– reste à leurs yeux aigu. Un scénario catastrophe pour les banquiers centraux, dont la mission première, inscrite dans le Traité de Maastricht, est de garantir des prix stables.

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Evolution de l’inflation dans la zone euro depuis un an

L’institution doit aussi livrer jeudi ses nouvelles prévisions trimestrielles. Sont attendues une forte révision à la hausse de la projection d’inflation cette année, et une à la baisse des perspectives de croissance pour 2009.

De quoi alimenter “les peurs d’une augmentation des taux directeurs”, reconnaît la banque Helaba dans une étude.

Pour Monika Wohlmann, analyste chez WestLB, c’est toutefois “improbable”, sur fond de “crise financière loin d’avoir été surmontée et de cours élevé du pétrole, qui font grimper l’inflation mais freine l’économie”.

Une réduction de taux n’est pas plus à l’agenda. La majorité des économistes du panel AFP/TFN l’envisage désormais au quatrième trimestre, après avoir longtemps misé sur le troisième.

“L’inflation est toujours élevée et l’activité ne s’affaiblit pas assez vite: il se peut qu’on attende longtemps notre baisse de taux”, juge Stéphane Deo, analyste chez UBS.

En maintenant le statu quo, la BCE freine déjà la croissance, conduisant de facto certains pays comme l’Espagne ou l’Italie au bord de la récession et en menace d’autres, argumente Jörg Krämer, chef économiste à la Commerzbank.

“Aujourd’hui, le niveau restrictif des taux directeurs est généralement considéré comme la raison principale expliquant les performances en dessous de la moyenne de nombreuses économies de la zone euro”, ajoute l’expert. Un tour de vis monétaire pourrait “exacerber la situation et rendre une récession plus probable”, selon lui, et la BCE n’aura sans doute pas à aller jusqu’à cette extrémité.

Les récents indices de confiance en zone euro montrent que “la consommation pourrait devenir le talon d’Achille de la croissance économique”, estime la banque Helaba. Dans le passé, une forte chute de la confiance des consommateurs a suffi à limiter les velléités des commerçants de remonter trop leur prix, ce qui au bout du compte a calmé les craintes des ménages. La BCE va avant toute chose attendre de voir si c’est le cas cette fois aussi.

 01/06/2008 10:45:38 – Â© 2008 AFP