La BCE surprend en ouvrant la voie à une hausse de taux en juillet (PAPIER GENERAL)

 
 
[05/06/2008 17:00:00] FRANCFORT (AFP)

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ège de la Banque centrale européenne, le 6 juin 2007 à Francfort (Photo : Martin Oeser)

En pleine crise financière mondiale, la Banque centrale européenne a ouvert en grand la voie à une remontée des taux directeurs de la zone euro en juillet visant à combattre l'”ennemi” inflation.

“Il n’est pas exclu que nous décidions de bouger sur nos taux à la prochaine réunion”, a déclaré jeudi son président Jean-Claude Trichet au cours d’une conférence de presse, créant la surprise.

Une légère hausse de taux, probablement d’un quart de point, visant à contrer les risques croissants de surchauffe des prix, est “possible”, a-t-il déclaré, mais “pas certaine”.

Malgré cette précaution d’usage, rarement le Français aura annoncé la couleur de façon aussi claire. “Nous avons pensé qu’il était de notre devoir de vous dire dans quel état d’esprit nous nous trouvons avant la prochaine réunion”, qui aura lieu le 3 juillet.

Le débats a sans doute été serré lors du conseil, qui a décidé plus tôt de garder le principal taux directeur inchangé à 4%, son niveau depuis exactement un an.

Certains membres ont argumenté en faveur d’un tour de vis dès ce jeudi, a-t-il reconnu. Finalement, les gardiens de l’euro ont convenu de prévenir les marchés au lieu de les surprendre et se sont déclarés en “état d’alerte élevé” face aux menaces de dérapage des prix.

Le pétrole cher et les prix des denrées ont propulsé de nouveau en mai l’indice des prix à 3,6% sur un an, un pic depuis le lancement de l’euro en 1999. L’inflation va rester “élevée pour une période plus longue que prévu à l’origine”, selon M. Trichet.

Certes la BCE ne peut pas entraver la flambée des prix du brut ou l’envolée des prix des aliments, liées à une demande mondiale accrue et aussi à la spéculation sur les marchés. Mais elle veut avant tout combattre la menace d’une spirale inflationniste nourrie par des hausses élevées de salaires.

“Les effets de second tour sont bien l’ennemi”, a-t-il martelé.

Les prévisions trimestrielles révisées en forte hausse de l’institut, présentée jeudi, ont illustré ses craintes: +3,4% pour l’inflation en 2008 (contre 2,9% en mars) et 2,4% en 2009 (après 2,1%). Bien au delà de l’objectif de moyen terme de l’institut, soit une inflation légèrement inférieure à 2%.

Dans un tel contexte, la BCE ne peut pas se contenter de crier au loup comme elle le fait depuis des mois, sans agir quand la situation s’aggrave. “C’est aussi une question de crédibilité”, estime Alexander Krüger, économiste à la Banque Bankhaus Lampe.

Il évalue à 65% la probabilité d’un relèvement du principal taux en juillet. “Seules des données conjoncturelles extrêmement faibles pourraient encore la dissuader de prendre cette voie”, estime-t-il. Pour son confrère de la Commerzbank Jörg Krämer, les choses sont claires: le principal taux va monter à 4,25% dans un mois.

La BCE avait dû renoncer à un tel geste, programmé pour septembre 2007, après l’effondrement des crédits immobiliers à risque aux Etats-Unis, qui a conduit à une crise financière mondiale et poussé la première économie mondiale au bord de la récession. Outre-atlantique, le principal taux -aujourd’hui à 2%- a été drastiquement réduit. En Grande-Bretagne, plus légèrement. Seule la BCE n’avait pas bougé, et qu’elle s’achemine finalement vers une hausse de taux peut surprendre.

Mais l’économie européenne, étonnement résistante à la crise jusqu’ici, pourra supporter un léger resserrement des vannes du crédit, estiment des experts, même si il passera mal auprès de certains pays comme l’Espagne, confrontée à une crise immobilière.

La BCE a d’ailleurs quelque peu relevé sa prévision de croissance pour cette année à 1,8% (contre 1,7%), et l’a abaissé à 1,5% (contre 1,8%) pour 2009.

 05/06/2008 17:00:00 – Â© 2008 AFP