Internet : distribuer des «mails» à cheval ?


Par Oualid CHINE

Voilà 4 heures qu’il est
impossible de se connecter à internet. Une de ces trop nombreuses pannes a
encore sévi. On ne sait jamais exactement à quoi elles sont dues. On se perd
en conjectures. Panne purement technique, liée à des enjeux qui décidément
nous dépassent ? Un technicien aurait-il trébuché sur l’un des fils qui
traînent certainement par terre dans l’un de ces centres de «hautes
technologies» dédié au haut-débit ? Ou aurait-il simplement retiré une fiche
parce qu’il n’a pas été encore payé par ses employeurs ? L’imagination
travaille quand le web prend une pause. Même si l’abonnement devait assurer
une connexion permanente. Mais après tout, un contrat n’a que la valeur que
l’on veut bien lui accorder. Triste réalité.

 

On s’appelle alors, pour
vérifier si notre petite personne est la seule victime de la panne, ou si
celle-ci est généralisée. Il faut bien se rassurer, quand la facture est
d’ores et déjà payée, et elle reste plutôt salée, malgré les baisses
successives affichées. Certains se mettent même à échafauder des théories
brumeuses de sombres complots. Si le net est bloqué, c’est qu’on veut nous
cacher quelque chose. C’est sûr que le web s’arrête pour des raisons pas
nettes. «On» veut nous couper des sources d’information et autres médias
internationaux. En un mot, les esprits s’échauffent, l’imagination carbure à
plein, écornant au passage l’image de marque d’un pays.

 

Le problème avec les
pannes, c’est qu’on ne sait jamais, par définition, à quel moment elles
surviennent. La mention cauchemardesque «impossible d’afficher la page»
s’affiche comme pour nous narguer, remettant en cause notre contrat dûment
signé avec nos fournisseurs d’accès. On se met à taper frénétiquement sur la
touche F5, histoire d’actualiser. Et c’est raté. Comme ce sera le cas lors
de tout cet après-midi mémorable du 10 juin. Pour d’autres, c’est
aujourd’hui même que leur tour est venu. Si on peut envoyer un mail, il ne
sera pourtant pas reçu. La panne fait son petit tour des sociétés
installées.

 

Or le web est aujourd’hui
le gagne-pain de toute une frange de la population. Celle qui se plie en
quatre pour refléter l’image d’un pays high-tech, et pour vous servir sur un
plateau argenté les dernières actualités. Et quand on fait face à une
rupture abusive du réseau, pour de nombreuses entreprises, c’est le chômage
technique imposé. Pour pallier les difficultés du net, on repense désormais
au bon vieux coursier. Pour lui remettre en main propre une disquette,
puisque sans internet, pas de messagerie électronique. Il faudra donc y
aller, à pieds, à cheval ou en voiture, pour remettre l’article retardé. Il
paraît que dans le quartier, quelques rares sociétés ont été épargnées par
la panne de la discorde.

 

Le web-journalisme est
censé avoir une longueur d’avance, avec, comme point fort, son
instantanéité, sa réactivité sans pareil. Et voilà que l’antique message
d’excuses de notre télévision d’antan est recyclé en une version ADSL. «Nous
vous prions d’excuser la rupture due à une défaillance technique». C’était
le bon vieux temps d’avant le numérique. Quand on gardait encore un bon
paquet de bougies pour faire la lumière quand il n’y avait plus
d’électricité. Mais aujourd’hui, les pannes mettent les nerfs à vif, et
c’est l’ambiance qui devient électrique. Se calmer avant de (re)-téléphoner
au service technique. Pour garder des raisons d’espérer.

 


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