[13/06/2008 18:32:25] BRUXELLES (AFP)
La Commission européenne a décidé vendredi de fermer prématurément la pêche au thon rouge en Méditerranée au nom de la protection de l’espèce, provoquant des protestations des pays concernés et la colère d’une profession déjà à cran à cause du renchérissement du carburant. Le gouvernement espagnol a “rejetté” la décision “disproportionnée” de la Commission européenne dans un communiqué l’Environnement, de l’Agriculture et de la Pêche . Cette fermeture concerne les thoniers senneurs, de grands chalutiers qui pratiquent une forme de pêche industrielle, et comptent à eux seuls pour quelque 70% des captures totales de ce poisson dans les eaux européennes. Elle s’appliquera à compter du 16 juin pour la Grèce, la France, l’Italie, Chypre et Malte, et à partir du 23 juin pour l’Espagne, selon un communiqué de la Commission. La saison pour eux aurait dû se terminer fin juin, qui est le mois où ils réalisent la quasi-totalité de leurs captures (90%), à raison de 550 tonnes par jour. En revanche, les pêcheurs artisanaux, essentiellement présents dans l’Atlantique Est, pourront continuer s’ils ont encore des quotas de pêcher jusqu’à la fin de leur propre saison, qui s’achève fin novembre. “Les quotas alloués seront bientôt atteints” pour les pêcheurs industriels, s’est justifiée la Commission. “La fermeture est nécessaire pour la protection de cette ressource fragile et pour garantir que le stock (de poissons) puisse se reconstituer”, conformément à ce qui est prévu au niveau international, a-t-elle ajouté. Cette décision a immédiatement été dénoncée par l’Italie et la France, qui comptent parmi les principaux pays de pêche au thon rouge en Europe et sont déjà confrontés à la grogne de leurs pêcheurs depuis des semaines, frappés par l’envolée du prix du gazole pour leurs bateaux. Le ministre italien de la Pêche, Luca Zaia, a réclamé que Bruxelles suspende sa décision, en dénonçant “l’impact économique et social” sur un secteur “déjà en pleine crise”. Son collègue français Michel Barnier a déploré “cette décision prise sans confrontation des éléments techniques et chiffrés de capture” et demandé “en urgence” une réunion d’un comité d’experts de la Commission européenne pour examiner cette décision. Même son de cloche du côté de la profession: la principale fédération de pêcheurs italiens a parlé d’une “décision incompréhensible” qui “jette de l’huile sur le feu” alors que la profession est selon elle aux abois avec le prix du gazole. “Nos efforts pour chercher à calmer les esprits et faire repartir en mer nos pêcheurs sont rendus vains par les mauvais choix de Bruxelles”, a protesté le président de la Federcoopesca, Massimo Coccia. En France, le syndicat des thoniers de Méditerranée a dénoncé une “décision arbitraire”, affirmant que “la flotte des thoniers senneurs français n’a même pas atteint 25% du quota de thon rouge 2008”. “La plupart des armements français se voient acculés à la faillite financière à cause d’une décision injuste”, souligne-t-il dans un communiqué. L’an dernier, les pays européens ont dépassé leurs quotas de pêche de 4.400 tonnes et l’UE avait mis fin totalement à la pêche au thon rouge pour 2007 au mois de septembre. Cette espèce très prisée des consommateurs avec la mode des “sushi”, dont les prix ont fortement progressé ces dernières années, voit ses réserves s’amenuiser dangereusement, du fait d’une importante pêche illégale en particulier. Le Fonds mondial pour la nature (WWF) a pour sa part réclamé vendredi des “mesures encore plus radicales” pour préserver l’espèce, comme une fermeture de la pêche sur plusieurs années et une réduction “drastique” de la flotte. “L’avenir du thon rouge est en jeu en Méditerranée”, a-t-il dit, en dénonçant les prises illégales. |
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