[23/06/2008 10:02:36] PARIS (AFP) Les lois Aubry sur les 35 heures, dont le gouvernement propose de s’affranchir avec une nouvelle “réforme du temps de travail”, ne méritent ni excès d’honneur, ni d’indignité, selon des économistes, politologues et juristes. Mesure emblématique des socialistes au pouvoir, qui en espéraient 700.000 emplois nouveaux, les 35 heures ont abouti à la création d’environ 350.000 emplois entre 1998 et 2002, dont 150.000 sans doute dûs aux allégements de charges, selon l’Insee. Elles ont permis aux entreprises des gains massifs de productivité horaire – de 4% à 5% -, tout en imposant la modération salariale, selon l’institut économique. Nicolas Sarkozy les accuse d’avoir “créé la rigueur salariale” et le chef de l’Etat et sa majorité considèrent que le texte qui sera examiné à partir de mardi en commission parlementaire, est “la dernière étape pour réparer les dégâts des 35 heures”. La modulation des horaires de travail en fonction des besoins de l’entreprise pourrait s’amplifier avec la nouvelle réforme, sans assurance toutefois d’un dégel du pouvoir d’achat, puisque tout dépendra des accords conclus, entreprise par entreprise. “Tout ou partie” des heures supplémentaires et des majorations prévues pourrait ainsi, dès la 36ème heure, être remplacé par un repos compensateur. En outre, le coût pour les finances publiques n’est pas prêt de s’alléger, sauf à remettre en cause plus de 20 milliards d’euros d’exonérations de cotisations patronales consenties à l’époque. Pour Jean-François Doridot, de l’institut Ipsos, une “majorité des Français estime que les 35 heures ont été globalement une mauvaise chose” et “ils sont plutôt favorables à un assouplissement, tant qu’on n’aborde pas la question de la suppression des jours RTT”. Mais, déclarait-il à La Tribune, leur remise en cause “pourrait se révéler à long terme dangereuse sur le plan politique si les conséquences annoncées, un surcroît de croissance et de pouvoir d’achat, ne sont pas au rendez-vous”. En fait, explique à l’AFP Eric Heyer, Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), “l’idée de Nicolas Sarkozy qu’on est le pays où l’on travaille le moins au monde est complètement fausse”. “Tous les pays ont réduit leur durée du travail. On est le seul à l’avoir fait par la durée légale, mais les autres l’ont fait par l’incitation au temps partiel”, qui concerne 33% des salariés en Allemagne, 48,5% aux Pays-Bas contre 17% en France, rappelle-t-il. “Historiquement, la durée du travail baisse partout et c’est normal: les gains de productivité permettent de travailler moins pour produire autant”, résume M. Heyer. Combattues par la droite et le patronat et de moins en moins assumées par le PS, les 35 heures suscitent un débat trop idéologique, jugeait dans une interview au Monde Jacques Barthélémy, avocat en droit social. Parler du “carcan des 35 heures” est “exagéré”: “la durée légale n’a été impérative en France qu’entre 1936 et 1938”, souligne-t-il. Pour l’économiste du CNRS Philippe Askenazy, les 35 heures n’ont été “ni une catastrophe, ni un miracle”, de multiple travaux concordant pour juger leur bilan “mitigé”, avec des créations d’emplois et une relance du dialogue social réelles, mais “limitées”. Les 35 heures ont accentué “les inégalités de conditions de travail” pour les salariés et la “flexibilité pour les entreprises”, qui ont pu “substituer au chômage partiel l’usage plus lisse de la modulation du temps de travail et des jours de RTT”, écrivait-il récemment dans Le Monde. La nouvelle réforme permettra dès cet été, et à partir de 2010 dans les PME, d’accroître cette modulation, avec accord des syndicats ou des élus du personnel. |
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