Grande-Bretage : une décennie de satisfaction économique évaporée en un an

 
 
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à Djeddah (Photo : Carl de Souza)

[25/06/2008 10:27:39] LONDRES(AFP) (AFP) Gordon Brown, orgueilleux ministre des Finances pendant une décennie, a vu en un an sous sa direction le Royaume-Uni courir au marasme économique, à cause d’événements internationaux mais aussi d’erreurs internes, au point qu’un épisode de récession n’est plus exclu.

Le temps paraît loin en effet où M. Brown, à chaque présentation du Budget, énumérait emphatiquement les “59, 60, 61 trimestres et plus” de croissance continue sous son égide.

En 2006 et 2007, le Royaume-Uni a fait mieux que ses voisins, avec 2,9% et 3% de croissance du produit intérieur brut (PIB). Mais pour 2008, le ministre des Finances Alistair Darling ne prévoit plus que 2%, et 2,5% en 2009. L’OCDE penche plutôt pour 1,8% cette année et 1,6% l’an prochain.

La Banque d’Angleterre (BOE) elle-même n’a pas exclu, “un ou deux trimestres de croissance négative”. S’ils sont consécutifs, il s’agira d’une récession. Au groupe d’investissement LGIM, d’ailleurs, “l’indicateur de récession est au rouge”, selon l’économiste James Carrick, avec une probabilité de 90%.

Bien sûr, et Gordon Brown ne se lasse pas de le répéter, le ralentissement est mondial, provoqué par la crise des crédits immobiliers américains “subprime” et aggravé par la hausse non maîtrisable du prix des matières premières.

Mais les Britanniques constatent le résultat : touchés au quotidien par la hausse des prix et surtout par le net ralentissement de l’immobilier depuis plusieurs mois, après des années d’excès alimenté notamment par les bonus prodigieux dans la City, ils ont le moral au plus bas et lorgnent vers l’opposition conservatrice. Pendant ce temps, les mouvements sociaux, depuis les années Thatcher très contenus au Royaume-Uni, reprennent ici et là.

Quoique encore bas (5,3% au sens du Bureau international du travail), le chômage a augmenté le mois dernier pour la quatrième fois consécutive, et l’inflation a atteint 3,3%, la BoE ne l’excluant pas à 4% en cours d’année. On dirait un retour aux années 70, peut-on lire partout dans les journaux ces temps-ci, à tel point que M. Darling a explicitement repoussé cette allégation la semaine dernière lors d’un dîner officiel.

M. Brown se donne l’air de prendre les choses en main en multipliant les rencontres avec ses homologues sur les sujets de la finance mondiale et du pétrole.

Mais les gaffes sur le plan intérieur aggravent la mauvaise impression. Ainsi, le traitement par le gouvernement de la quasi-faillite qui a abouti à la nationalisation en février de la banque Northern Rock fait toujours débat. Surtout, il y a eu les revirements désordonnés sur trois projets fiscaux : l’abrogation de la tranche d’imposition la plus faible, l’imposition des plus-values financières, la taxation des non-domiciliés au Royaume-Uni.

A chaque fois le gouvernement avait légiféré très rapidement, ne réalisant visiblement pas que, dans deux cas, il allait pénaliser les contribuables les plus fragiles, et dans le troisième semblant céder à la pression des nantis.

C’est le côté “mauvais Brown”, a souligné mardi le Financial Times, notant qu’il y a aussi le “bon Gordon”, avec une vraie vision de thèmes comme la mondialisation et le développement des pays pauvres. Les Chinois, affirme le journal, estiment qu’il est parmi les seuls dirigeants au monde à bien comprendre ces sujets, qui préoccupent actuellement moins les Britanniques que leur propre sort.

 25/06/2008 10:27:39 – Â© 2008 AFP