[02/07/2008 08:44:49] KHARTOUM (AFP) Le géant pétrolier français Total a repris pied au Soudan en s’apprêtant à engager l’exploration d’une zone du sud du pays aussi vaste que la moitié du Royaume-Uni. “Ils ont monté une base et y déploient des équipements”, a déclaré à l’AFP le ministre de l’Energie du sud-Soudan, John Luk, tablant sur un lancement des opérations en novembre, après 20 ans de gel. Le directeur des relations extérieures exploration-production de Total, Jean-François Lassalle, basé à Paris, a confirmé à l’AFP qu’une “base était installée” à Bor, la capitale de l’Etat de Jongleï, à 1.000 km au sud de Khartoum. Mais pour le responsable de Total, “la sécurité et le bouclage du nouveau consortium doivent être encore réglés”. Le meilleur scénario est celui d’un lancement des opérations avant la fin 2008 et de grandes découvertes dans les prochaines années. “Nous allons chasser l’éléphant au Soudan, pas les moustiques”, a dit M. Lassalle. Total, quatrième compagnie pétrolière mondiale, est la seule major occidentale à s’impliquer dans ce pays frappé de sanctions internationales, prenant ainsi le risque de problèmes avec les puissants fonds de pension américains. Washington a placé le Soudan, qui hébergea un temps Oussama ben Laden, sur sa liste des pays soutenant le terrorisme. La multinationale française avait obtenu en 1980 un contrat d’exploration d’un bloc dit “B” de 118.000 km2, dans la région de Jongleï. L’activité, qui s’était bornée à des travaux sismiques, avait été suspendue en 1984 en raison de la guerre civile de 20 ans entre le Nord et le Sud qui s’acheva par un accord de paix (CPA) de janvier 2005. Il y a un an, une commission nationale pétrolière formée par le régime de Khartoum et les ex-rebelles du Sud a confirmé Total dans ses droits, recadrés dans un contrat de 25 ans assorti d’obligations de développement durable.
Si la situation s’est apaisée, non sans tensions, entre le Nord, surtout musulman, et le Sud, chrétien et animiste, la guerre civile au Darfour, à l’ouest, depuis 2003, complique la donne pour Total. Les pionniers occidentaux, comme Exxon ou Shell, ont déserté en 1990 le Soudan où la compagnie chinoise publique CNPC s’est taillé la part du lion, suivie par la malaisienne Petronas ou l’indienne ONGC. Quatrième producteur africain, le Soudan produit aujourd’hui 500.000 barils par jour, dont 400.000 sont exportés, à 80 % vers la Chine. Aux côtés de l’opérateur Total dans le bloc B figurait une société américaine, Marathon. Elle a dû se retirer en application du boycottage décrété par Washington. Dans la configuration prévue, Total conservera 32,5 %, la société koweïtienne Kulpec aura 27,5 % (+ 2,5 %), la compagnie nationale soudanaise Sudapet 10 %, une entité sud-soudanaise à créer, Nilepet, devant avoir 10%. Restent 20 % pour un partenaire qui devrait être la compagnie Mubadala Development, société d’investissement du gouvernement d’Abou Dhabi, a appris l’AFP de sources proches du dossier. Pour M. Luk, “une fois l’argent réuni, cela prendra encore quelque mois. Après octobre, ils (Total) commenceront à bouger”, a-t-il pronostiqué. Débutera alors une autre épreuve, celle des fonds de pension américains qui, en vertu du “Sudan Divestment act” adopté par le Congrès fin 2007, pourraient vendre leurs intérêts dans Total, avec un effet négatif sur le cours de l’action. “C’est un souci et nous le traitons dans la transparence”, a dit M. Lassalle. Pour désamorcer les critiques, Total, déjà sur la sellette pour ses opérations en Birmanie, a ouvert un dialogue avec des ONG internationales, en particulier l’active Sudan Desinvest Task Force (SDTF). “Notre présence doit clairement bénéficier aux populations du Sud Soudan qui sortent d’une longue guerre en contribuant à la pacification, au développement, aux droits de l’homme et à la démocratie”, a affirmé M. Lassalle. |
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