Les usines du Nigeria, privées d’électricité, ferment par centaines

Par : Tallel

Des centaines d’usines ont mis la clé
sous la porte depuis quinze ans à Kano, centre industriel et commercial du
nord du Nigeria, qui a ainsi perdu quelque trois millions d’emplois, en
raison d’infrastructures électriques en décrépitude.

 

“Il y avait 500 usines à Kano au
milieu des années 90, mais plus de 400 ont fermé et les employés n’ont plus
de quoi gagner leur vie”, a expliqué à l’AFP Ahmed Rabiu, vice-président de
la Chambre de Commerce et d’Industrie de Kano (nord).

 

“Au cours des quinze dernières
années, plus de trois millions d’emplois ont été supprimés, conséquence
directe ou indirecte des fermetures d’entreprises, en raison principalement
des pénuries d’électricité”, a-t-il poursuivi.

 

Le Nigeria est en proie à une crise
du secteur électrique depuis près de 20 ans, avec des centrales en état
désastreux, autant de conséquences de la corruption et de la mauvaise
gestion au sein de l’unique société nationale productrice d’électricité,
PHCN.

 

Selon une étude du secteur réalisée
par une commission présidentielle spéciale et publiée la semaine dernière,
il faudrait 85 milliards de dollars (54 milliards d’euros) pour que le
Nigeria et ses 140 millions d’habitants bénéficient d’un approvisionnement
“stable”.
Pas moins de 16 milliards ont été injectés dans le secteur depuis 8 ans,
sous l’ancien président Olusegun Obasanjo, mais la situation a empiré, selon
les industriels.

 

Le pays a été plongé dans l’obscurité
totale à deux reprises ces derniers jours.

 

Selon Ransom Owan, directeur de la
Commission régulatrice de l’électricité du Nigeria (NERC), les besoins du
pays s’élèvent à 20.000 mégawatts alors que sa capacité n’atteint que 3.000
mégawatts.

 

Dans la seule agglomération de Kano,
les besoins quotidiens sont de 250 mégawatts, contre 80 mégawatts reçus,
selon des responsables de la PHCN.

 

Moins de 100 usines fonctionnent
actuellement dans cette région, et elles tournent à capacité réduite en
raison des coûts élevés de production et du manque d’électricité, indique
Ali Madugu, à la tête de l’Association des manufacturiers du Nigeria (MAN),
à Kano.

 

Autrefois fleurissantes, les
industries alimentaire, du textile, du plastique ainsi que les fonderies et
les tanneries de Kano sont aujourd’hui dans un état de désolation.

 

Saidu Dattijo Adhama, fabricant de
vêtements, a fermé son usine et licencié 314 travailleurs. Il évoque lui
aussi le manque d’électricité comme raison principale.

 

“Les taux d’intérêt élevés pratiqués
par les banques et la compétition féroce créée par les produits à bas-coûts
venant d’Asie tuent les industries locales, mais ça n’est rien comparé au
coup mortel porté par le manque d’électricité”, estime-t-il.

 

Mi-juin, le président nigérian Umaru
Yar’adua a annoncé qu’il décréterait “le mois prochain” un “état d’urgence”
dans le domaine énergétique, doté de 5 milliards de dollars sur trois ans
pour réhabiliter le secteur.

 

Le gouvernement de l’Etat de Kano
promet depuis cinq ans la création d’une centrale électrique indépendante,
mais les négociations avec une société canadienne et une autre indonésienne
n’ont pas encore porté leurs fruits.

 

Des violences ethniques et
religieuses dans cet Etat du nord du pays ont fait des milliers de morts
depuis 1992.

 

Une commission d’enquête mise sur
pied par le gouvernement de Kano et chargée d’étudier deux journées de
violences ethnico-religieuses en mai 2004, où plus de 1.000 personnes
avaient été tuées, a estimé dans son rapport que des “raisons économiques”
en étaient à l’origine.

(Source :

http://www.romandie.com/ats/news/080701100626.ibpzfzu5.asp
)