Port Financier de Tunis : Les députés adoptent le projet presque sans le discuter


Par Moncef MAHROUG

Le texte est adopté. Nous passons au
projet suivant». A peine M. Fouad Mebazaa, président de la Chambre des
députés a-t-il prononcé ces mots, lors de la séance du samedi 19 juillet
2008, qu’une bonne partie des députés présents –déjà relativement peu
nombreux- se lèvent et quittent l’hémicycle. Comme si la discussion du
projet de loi concernant le projet de «Port Financier de Tunis», promu par
le bahreïni «Gulf Finance House» (GFH) ne les concernait pas.

 

Ce désintérêt va effectivement se
confirmer plus tard lors du débat qui se limitera à l’intervention d’un seul
député, là où plusieurs dizaines de députés étaient intervenus lors de la
discussion du projet de loi ayant trait au projet d’aménagement du Lac Sud
de Tunis par Sama Dubaï. M. Abdallah Chebbi, a pris la parole pour demander
si le «Port Financier de Tunis» va effectivement permettre de donner du
travail aux diplômés de l’université et quelles étaient les spécialités et
les compétences demandées. Ce à quoi M. Mohamed Nouri Jouini, ministre du
Développement et de la Coopération internationale, répondra que ce projet,
qui va être réalisé avec un investissement de 4 milliards de dinars sur cinq
ans et générer 2 autres millions d’investissements par les opérateurs qui
s’y installeront, va générer 15.000 emplois, dont une partie pour des
spécialistes dans différentes disciplines de la finance.

 

Comme Sama Dubaï, GFH obtient
gratuitement les 521 ha sur lesquels cet investisseur va édifier ce projet.
Et bien qu’elle oblige les «contractants initiaux», c’est-à-dire l’Etat
tunisien et GFH, ce dernier a été autorisé –«compte tenu des exigences de
l’organisation financière de l’investissement »- à créer une société de
droit tunisien qui se chargera de réaliser le projet dont GFH sera
l’actionnaire de référence en y détenant une «participation importante d’au
moins 51% du capital, pendant toute la durée de la réalisation du projet».

 

Cette situation pourra évoluer plus
tard «en fonction de la convention de renouvellement» qui sera conclue entre
les deux parties, puisque GFH pourra transmettre tous ses engagements à la
société du projet «à l’exception de ceux dont la nature exige qu’ils
continuent à être assurés par le contractant initial».

 

Comme dans le projet du Lac Sud, les
engagements de l’Etat incluent celui d’amener les infrastructures jusqu’aux
abords du site du «Port Financier de Tunis», dans des délais fixés «en
tenant compte des capacités financières et techniques des services
concernés».

 

De son côté, la société du projet se
chargera de les prolonger à l’intérieur et de transmettre la propriété des
infrastructures réalisées par ses soins à l’Etat, «à l’exception de celles
dont la nature exige qu’elles restent à la disposition de la société».

 

La convention dispose également que
des contrats de concessions pourront être conclues pour permettre à la
société du projet où à ceux qui en dépendent d’exploiter des parcelles
relevant de la propriété publique à l’intérieur du site du projet ou dans la
mer avoisinante.

 

De même, la société du projet et les
institutions opérant en son intérieur se sont vus accorder un «régime de
change spécial, basé sur la souplesse, et conforme à l’orientation générale
nationale évoluant vers la libération des opérations et des échanges
internationaux».

 

Au chapitre des garanties accordées à
l’investisseur, la convention prend en considération «les changements qui
pourraient intervenir dans les données économiques sur lesquelles ses
projections ont été effectuées» et lui accorde de ce fait «le droit de
demander la modification de ses engagements (…) à chaque changement
important et fondamental de ces données». L’investisseur pourra même
demander la suspension de certains engagements, voire leur annulation
lorsque «le cas de force majeure persiste pour une longue durée excédant les
180 jours». La convention peut même être annulée dans sa totalité si
l’investisseur n’obtient pas réparation d’un grand préjudice occasionné par
une initiative de l’Etat.

 

Pour sa part, l’Etat tunisien a
obtenu de pouvoir faire contrôler les budgets et comptes de la société du
projet par un cabinet d’audit international.