[01/08/2008 05:22:24] PARIS (AFP)
Le trader Jérôme Kerviel a “abusé de la confiance” d’une hiérarchie “négligente” pour réaliser ses falsifications, selon un rapport de police qui reprend la vision de l’affaire développée dans un rapport interne de la Société Générale. Ce rapport versé au dossier le 2 juillet et que l’AFP a consulté jeudi fait la synthèse des éléments recueillis par les policiers de la Brigade financière (BF) sur commission rogatoire des juges d’instruction. “On ne peut pas accepter que le procès se fasse sur le procès-verbal de la police dont il (Kerviel) conteste la teneur”, a déclaré à l’AFP Me Eric Dupont-Moretti, un des avocats du trader. En six mois d’enquête sur les falsifications qui ont coûté 4,9 milliards d’euros à la banque, ils ont procédé à l’audition de 64 personnes de l’entourage personnel et professionnel du jeune trader, dont quatre en garde à vue. Ils ont également procédé à des réquisitions téléphoniques et bancaires et perquisitionné le siège de la banque et le domicile de Jérôme Kerviel. “Au regard de l’ensemble des éléments recueillis, on peut légitimement penser que l’ampleur du préjudice financier de la banque s’explique par les manoeuvres frauduleuses d’un trader qui (…) a abusé de la confiance de sa hiérarchie en profitant des manquements de celle-ci et de la défaillance des services de contrôle interne”, concluent les enquêteurs. Dans ce rapport, la BF accable le trader: “Jérôme Kerviel a su être convaincant et pertinent pour berner son entourage” et a fait “fi de toute considération éthique et déontologique”. Le trader soutient que sa hiérarchie avait connaissance de ses “positions (…) hors norme” non-autorisées. “Incohérent” pour les enquêteurs, car Jérôme Kerviel “éprouvait la nécessité de les dissimuler, voire même de les travestir par la production de faux documents”. Tout au long des 29 pages du rapport, les policiers reprennent dans ses grandes lignes la vision de l’affaire de la SocGen, développée dans un rapport d’enquête interne le 23 mai. Comme la banque, la BF insiste ainsi sur l’insuffisance des services de contrôle et sur la “défaillance” de la hiérarchie, dont Jérôme Kerviel a “bénéficié et profité” de la “négligence”. Les policiers critiquent l'”absence de curiosité ou de suspicion” de ses supérieurs face aux agissements troubles du trader ou encore le non contrôle du dépassement des limites de prises de risque autorisées. Son supérieur direct a particulièrement “manqué de réactivité et de discernement” selon les enquêteurs pour qui toutefois les manquements sont imputables à “l’ensemble” de sa hiérarchie. Le rapport évoque longuement la piste d’éventuelles complicités, dont celle de Thomas M., son assistant. Mais à la différence de la SocGen, qui relève des “indices de complicité” à son encontre, les policiers ne vont pas aussi loin. Pour eux, “l’enquête n’a pas permis de déterminer si Thomas M. avait pu être abusé ou s’il avait conscience de la nature de l’activité déviante” du trader. Le parquet a cependant requis début juillet sa mise en examen pour complicité. A ce stade, la défense de Jérôme Kerviel considère avoir “besoin d’éclaircissements” pour “connaître toute la vérité”. Pour Bernard Benaïem, l’un de ses avocats, il faut ainsi “savoir s’il y a eu de la part de la banque une complaisance, une ignorance fautive, une complicité par fourniture d’instructions, voire de moyens”. |
||
|