L’Italie, qui avait initié en 2005 sous la pression de lobbies un projet de
règlement sur le marquage des produits textiles importés d’états tiers
dénommé « made in », fait flèche de tout bois pour faire passer ce
règlement, en dépit de son blocage par une forte majorité de pays de l’Union
européenne.
La récente trouvaille de ce pays réputé pour être le « think tank » de la
contrefaçon a été d’instituer récemment, l’étiquette T&F « Traceability &
Fashion ».
Ce nouveau marquage permet de remonter à l’origine de la fabrication du
produit et de garantir sa qualité. C’est une sorte de « bulletin d’état
civil », voire d’une nouvelle carte d’identité du produit textile.
Mis au point par le comité de certification ITF (Italian Textile Fashion),
l’organisme des Chambres de commerce, chargé de la valorisation de la
filière de la mode, ce nouveau label est délivré au terme d’un processus de
certification par un comité de l’ITF, dont font partie toutes les
associations professionnelles des producteurs de mode, du commerce et des
consommateurs.
Le non-dit dans cette affaire c’est que l’objectif principal, pour le
système de la mode italien, consiste à obtenir au niveau de l’Union
Européenne l’obligation pour les marchandises en provenance de pays
extra-européens d’indiquer leur origine. Au final, il s’agit tout simplement
de restituer « le made in » tant souhaité.
La T&F intervient après la tentative de l’Italie de faire cavalier seul et
d’appliquer unilatéralement le règlement « made in ».
En témoigne l’affaire du textilien italien Renzo Guazzini qui a été
présenté, début avril 2008, à la justice pour avoir apposé sur des vêtements
d’hommes, réalisés par des stylistes-modélistes italiens, mais confectionnés
en Tunisie, l’étiquette « made in Italy ». C’est la garde de finance qui l’a
non seulement dénoncé mais osé saisir la marchandise importée de Tunisie.
Un juge averti de Livourne (région de toscane) l’avait, toutefois, acquitté,
estimant qu’il était suffisant que le tissu et le modèle soient italiens
pour pouvoir apposer l’étiquette « made in Italy ».
La France qui avait soutenu l’Italie dans cette affaire a pris ses
distances. Interpellé, il y a un mois et demi, sur la position officielle de
la France qui avait soutenu à un certain moment l’Italie (16 juin 2008), M.
Serge Degallaix, ambassadeur de France en Tunisie, a indiqué que, «dans
cette affaire, les intérêts des tunisiens et des français sont partagés. Les
entreprises textiles des deux pays sont interpénétrées. La Tunisie est le 3ème
fournisseur en habillement de la France et son 4ème client en
textile. La France est le 1er marché de la Tunisie en habillement
et son 2ème fournisseur. Conséquence : tout ce qui pourrait
affecter l’intérêt de la Tunisie affecterait celui de la France ».
Pour mémoire, ce fameux règlement « made in » aux relents protectionnistes
est sévèrement critiqué par plusieurs membres de l’Union européenne. Parmi
les pays qui bloquent ce projet, figurent, désormais : l’Allemagne, la
France, le Danemark, la Grande Bretagne, les Pays Bas et la Suède.
Et pour cause, ce règlement, pour peu qu’il soit appliqué peut avoir des
effets négatifs pour de nombreux industriels européens, détenteurs de marque
et ayant développé des stratégies de partenariat avec la rive sud de la
méditerranée, c’est à dire la quasi- totalité des entreprises européennes du
secteur textile-habillement.
Cette disposition risque de compromettre les implantations en Tunisie de
griffes célèbres telles qu’ Aubade, Lacoste, Benetton, et autres….
Il en sera de même pour les centrales d’achat et hypermarchés qui
s’approvisionnent en produits textiles dans les pays du sud de la
méditerranée en produits textiles à des prix compétitifs avant de leur
greffer leurs enseignes. Ces géants de la grande distribution risquent
également d’être lésés.
Ce projet de règlement concerne, entre autres produits, les vêtements et les
matières textiles importés de pays tiers, à l’exception des marchandises
originaires du territoire des communautés européennes, de Bulgarie, de
Roumanie, de Turquie et des parties contractantes et des parties
contractantes de l’accord de l’Espace économique Européen (Islande, Norvège,
Liechtenstein).
A travers ce règlement, les initiateurs européens de ce règlement se cachent
derrière de nobles principes. Ils entendent s’assurer de la bonne qualité du
produit, de sa non fabrication par des enfants ou des travailleurs forcés,
de son respect des normes environnementales et de sa non-dangerosité.
Il s’agit également pour l’Union européenne d’aligner sa législation de
l’origine sur celle des pays (comme les Etats-Unis, le Canada) et de lutter
contre les fausses origines et la contrefaçon.
Les opposants à ce règlement sont pour la plupart des associés de l’UE au
sud de la méditerranée (pays du Maghreb entre autres). Dans la déclaration
de Tunis (avril 2007), ces pays jugent ce règlement « inopportun » et
estiment qu’outre les surcoûts qu’il généreraient, il ne manquerait pas, une
fois adopté, de pénaliser et de discriminer le Maroc et la Tunisie, de
porter un coup dur à la solidarité euro – méditerranéenne et de doper la
compétitivité de pays concurrents qui en seront exonérés (Turquie, Roumanie,
Bulgarie….).
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