Facebook est «indisponible». Certains évoquent une «panne
technique». Puisqu’il paraît que la fameuse erreur 404 n’apparaît pas chez tous
les amateurs tunisiens du plus célèbre des réseaux sociaux. Facebook qui a donné
une image chic et branchée des Tunisiens. Facebook, qui a permis de rehausser
l’image étincelante et virtuelle de notre pays. Nos jeunes seraient si
dynamiques, si connectés, qu’ils envahissent la sphère virtuelle. Certains
évoquent des solutions, des ersatz, pour continuer à se brancher contre vents et
marées à ce portail si populaire. Et par-là même si décrié. Etonnamment,
l’adresse http://fr.www.facebook.com/ fonctionne encore. Tout comme
www.www.facebook.com, d’ailleurs. Gageons qu’il s’agit là d’une faille qui sera
corrigée dans les plus brefs délais.
Mais après tout, on pourrait pour une fois voir le bon côté des choses. Les
relations humaines, quand elles se «virtualisent» à ce point, elles perdent de
leur chaleur naturelle. Si les Tunisiens ne parlent plus à leurs voisins, s’ils
ne se lèvent plus pour les personnes âgées dans les bus bondés, c’est sûrement,
en partie, de la faute de Facebook. Il faudrait d’ailleurs peut-être envisager
sérieusement à nous ôter «Google» du paysage. C’est qu’après tout, le moteur de
recherche qui porte ce nom n’apporte pas que des bienfaits. Les nouvelles
générations s’en servent pour tricher. Il suffit de taper n’importe quel mot
dans la barre de recherche pour trouver une foule d’informations. Et ces petits
malicieux peuvent ainsi à bon compte «copier-coller» sans vergogne le contenu de
leurs exposés à l’école. Mauvais, donc, pour l’enseignement et l’éducation
nationale. Google permet d’ailleurs aussi aux journalistes de bâcler leur
travail, en allant tout droit aux sources d’informations. Or ces informations en
question, délivrées par des sources étrangères parfois douteuses et
malintentionnées, peuvent desservir la cause de notre économie nationale. Les
responsables chargés de veiller sur notre bien-être virtuel devraient donc
sérieusement envisager à nous débarrasser de la grotesque calamité «Googlesque».
Et honnêtement, depuis qu’il y a des mails, les relations épistolaires ne
sont plus ce qu’elles étaient. Mais peut-on encore imaginer les lettres
amoureusement cachetées de Madame de Sévigné à l’ère des e-mails ? Le style,
l’élégance de la calligraphie, les pleins et les déliés… Que de beauté
abandonnée. Les jeunes d’aujourd’hui ne s’expriment plus que par des
onomatopées, des abréviations barbares, mélangeant allégrement chiffres et
lettres pour de lamentables messages au contenu décevant.
Il faudrait donc, peut-être, penser à limiter drastiquement l’usage des
e-mails aux seuls professionnels. Mieux : on pourrait ouvrir des bureaux
spécialisés où des écrivains assermentés enverront à notre place les missives
les plus urgentes. De quoi créer des emplois et résorber le chômage des diplômés
d’arabe et de français. Aucune mesure ne doit être épargnée pour rallumer la
flamme de l’amour des Belles Lettres. Que l’on sacrifie toute la Toile du net
mondial, s’il le faut, si notre sérénité est à ce prix.