Rien ne vaut un bon roman pour faire passer plus vite les longues heures de
jeûne du Ramadan. Et tant mieux si le bouquin en question ouvre le débat (et
le feu) sur les hautes technologies… aéronautiques. Un thriller, donc, et
bel et bien tunisien. Une première dans notre microcosme littéraire plus
habitué aux récits intimistes (les plus sceptiques diront minimalistes) et
aux langueurs de nostalgie. Avec «Terre promise texane», l’histoire démarre
au quart de tour.
Dans les méandres de notre vieille médina. Qui se retrouve
pour une fois le théâtre d’une rencontre du troisième type. Entre un
universitaire bien de chez nous et un ingénieur israélien…. Au cœur de
l’intrigue, le désastre de l’industrie aérospatiale américaine, avec
l’explosion en plein vol de la navette Columbia.
Les détails troublants concernant «l’accident» de l’engin seraient-ils dus
au pur hasard ? D’autres forces ne seraient-elles pas intervenues pour faire
infléchir secrètement la trajectoire de l’engin jusqu’à provoquer
l’irrémédiable accident ? Les archives de la NASA ne passeraient-elles pas
l’essentiel sous silence ?
Pour vous ouvrir davantage l’appétit, nous vous dirons que l’auteur est
professeur d’économie à l’Institut supérieur de gestion de Tunis. Et que son
histoire, elle, traitera notamment de questions religieuses, quand les
excités de tous bords crient au clash des civilisations et des religions.
Religion ? L’Islam et les textes sacrés du judaïsme seront mis à
contribution pour démêler l’écheveau d’une enquête trépidante, et pourtant
scientifique. Le tout saupoudré de références à la Deuxième Guerre mondiale.
Pour un roman au suspense haletant, aux personnages en quête d’une vérité
qui se dérobe. Pour une réalité cachée sous les faux-semblants d’une
propagande qui ne dit pas son nom.
L’auteur mixe avec brio l’histoire contemporaine et les références à
l’actualité immédiate. Rappelant au passage que la censure n’est pas
l’apanage des Arabes. Mais qu’elle sévit sous des formes plus pernicieuses
sous d’autres cieux que l’on croyait plus cléments. Des intellectuels de la
stature de Finkelstein, radiés de toutes les universités américaines pour
avoir révélé des vérités dérangeantes, sont abondamment cités. Avec en toile
de fond un dialogue interreligieux, menés par des personnages vivant sur les
braises de la Palestine. Proprement ébouriffant.
Sous des dehors anodins, Safieddine Bouali a réussi une véritable acrobatie
romanesque. Mêler la technologie à la religion, l’histoire à la
littérature… Au final, un thriller, brillant et enlevé. Dans un genre qui
fait le bonheur des libraires d’Amérique et d’Europe, mais que nos éditeurs
semblent négliger. Une initiative qui, du moins on l’espère, ouvrira la voie
à d’autres auteurs, et suscitera l’intérêt des professionnels du livre dans
notre pays. Safieddine Bouali en est pourtant à son coup d’essai. Puisqu’il
s’agit de son premier roman, publié à compte d’auteur. On excusera donc
quelques longueurs, quelques dialogues qui s’étirent sur trop de pages.
C’est que l’auteur tenait aussi à faire partager ses convictions. Auxquelles
on adhère, désespérément.
531 pages, Tunis 2008
Prix Public TTC: 17 DT
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