Ce n’est qu’au milieu des années 90 que les grandes surfaces ont fait leur
apparition dans le grand Tunis. Dans la foulée, il est signalé que Bonprix a
ouvert 40 points de vente, Promogros a ouvert 2 surfaces, et Carrefour est
arrivé en 2001, suivi, en 2005, de Géant. Mais bien avant l’arrivée de
Géant, la grande distribution représentait 209 unités dont un hypermarché,
116 supermarchés, et 92 magasins de quelque 500 m2 dits généralement
supérettes. Disons-le au passage, la promulgation d’un décret-loi relatif
aux grandes surfaces a eu lieu en décembre 2003.
Selon M. Morched, urbaniste – sociologue, 67% des petits commerces (- 30 m2)
très représentés dans les villes (50% sont à Tunis) imputent leurs
difficultés : aux concurrents dans le quartier même (ils sont 74% à le
dire), au faible niveau de la demande (68%) et à la proximité des grandes
surfaces (59%). De façon générale, il semble que plus de 60 % des petits
commerces trouvent préjudiciable sur leurs activités l’impact des grandes
surfaces.
La question qui se pose dans ce cas serait : l’argument de la proximité des
grandes surfaces est-il vraiment valable ? (lire le cas de Géant), ces
derniers commerces étant généralement à plus de 5 à 6 km des villes.
Pourtant, il faudrait se rendre à une évidence indiscutable : les grandes
surfaces (ou tout simplement les grands magasins tels Monoprix et autres) ne
sont tout de même pas arrivés avec de nouveaux clients. Ils sont arrivés sur
un marché X et ont mordu dedans. C’est d’ailleurs la même chose pour le
marché publicitaire en Tunisie : on l’estime à 10 milliard de millimes, mais
l’arrivée de chaque nouveau média ne peut que grignoter dessus.
Les petits commerces ferment boutique
Aux dires de Morched Chabbi, l’ensemble des grands magasins et des grandes
surfaces font (tous ensemble) un chiffre d’affaires annuel de l’ordre d’un
milliard de dinars. Nous ne savons pas de quel ordre il était aux années 90,
mais il paraît que ce chiffre revenait de fait aux petits commerces et à eux
seuls.
C’est donc pour cela que (nous apprend encore M. Morched) Les commerçants
ont tendance à déclarer être les plus touchés par les grandes surfaces sont
: les épiciers (84%), l’électroménager (70%), l’habillement et chaussures
(60%), les fruits et légumes (50 %) et les boucheries et volailles (43%). Et
l’on a failli, ici, oublier les centres commerciaux qui sont au nombre d’une
vingtaine en Tunisie dont 60% sont à Tunis, et dont la moitié se trouvent
dans les zones résidentielles.
Entre autres impacts négatifs cités par M. Morched, celui du positionnement
de certaines grandes surfaces à l’entrée de petites villes (15 mille à 30
mille habitants), et ce afin d’intéresser la catégorie de population à
pouvoir d’achat moyen, donc motorisée. Selon notre interlocuteur, le petit
commerce subit d’abord une baisse de la demande, et finit tout bonnement par
fermer boutique.
Or, il n’est pas dit que le mouvement d’ouverture des hypermarchés va
s’arrêter en si bon chemin. Notre urbaniste estime que pour chaque
population (tunisienne) va probablement correspondre un nombre
d’hypermarchés. Ainsi, nous serions 11.300.000 âmes en 2010 pour lesquelles
il faudrait 3 hypermarchés ; 12.700.000 habitants en 2020 pour 4
hypermarchés ; et 13.900.000 pour 9 hypermarchés. Sans oublier les
supermarchés dont le nombre pourrait atteindre les 390 unités en 2030.
Simples hypothèses, probabilités, projections dans l’avenir sur bases
scientifiques ou pas, toujours est-il que «ce sont les classes aisées qui
souhaitent ardemment voir plus d’hypermarchés dans le pays», nous apprend M.
Morched.