Productivité : La Tunisie, champion incontesté en Afrique du Nord… !

Par : Tallel


Par Tallel BAHOURY

On a souvent reproché à Webmanagercenter ‘’de mettre en exergue les points
positifs de l’économie marocaine…’’, pourtant ce genre de comparaison, même
si c’est à la faveur de notre pays, ceci est déjà rentré dans les mœurs de la presse
chérifienne. Pour illustrer notre propos, on prendra pour exemple le compte
rendu fait par notre confrère Aujourd’hui sur le dernier rapport de la
Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED).

Dès l’entame de l’article, une comparaison nettement à l’avantage de
la Tunisie est mise en exergue; est concerne le pourcentage des exportations
d’articles manufacturés dans le PIB dans les deux pays, qui a atteint 14%
entre 2000-2006 au Maroc contre plus de 25% pour la Tunisie. Avec cette
phrase : ‘’Le Maroc a du chemin à faire dans ce domaine’’ (entendez par là
la productivité).

Il est vrai que le rapport du ministre marocain du Commerce extérieur, Abdellatif Maâzouz, récemment présenté n’est pas pour rassurer le moral des capitaines
d’industrie marocains, sans oublier le rapport de la CNUCED sur le développement
économique en Afrique pour l’année 2008, mais également les perspectives peu optimistes
du Fonds monétaire international (FMI), soit trois documents ‘’non
favorables’’ –pour ne pas dire négatifs- sur l’économie marocaine.

Alors, nos confrères marocains mettent souvent le doigt sur les points sur
lesquels la Tunisie dépasse le Maroc, une manière de pousser les entreprises
et l’administration du pays de se secouer… pardon de bouger. Ce qui est
pourtant mal vu chez nous, alors que nous visons le même objectif que les journalistes
marocains, mais à l’envers bien entendu !

Fermons la parenthèse et revenons sur le rapport de l’organisme onusien,
pour dire, comme tout le monde le sait, le dernier document de la CNUCED
accorde une large place à l’exportation après la libéralisation du commerce,
mais également aux tendances, perspectives mais surtout aux produits
manufacturés.

En effet, le rapport de la CNUCED souligne que, en pourcentage du PIB, les
exportations marocaines d’articles manufacturés sont de 10% pour la période
1990-1999 à environ 14% entre 2000 et 2006 (contre seulement 6% entre
1980-1989), ce qui montre une croissance positive et soutenue du pourcentage
des exportations d’articles manufacturés dans le PIB marocain au cours des
dix dernières années. Cependant, ‘’le Maroc reste tout de même loin des
performances tunisiennes’’, écrit le journal marocain, avant d’ajouter :
‘’Entre 2000 et 2006, le pourcentage d’articles manufacturés dans le PIB
tunisien a été de 25,9 %, devançant ainsi de loin le Maroc avec 14% et l’Egypte
avec seulement 2,1%. Au cours des vingt dernières années, les Tunisiens ont su
améliorer leurs capacités à exporter des articles manufacturés faisant ainsi
passer leur pourcentage en PIB de 11,7% entre 1980-1989 à 21,6% entre
1990-1999’’. C’est sans commentaire !

Il faut reconnaître que les héritiers de Carthage ont le commerce dans le
sang, ce qui ne semble pas être le cas de nos amis Marocains. En tout cas,
les analystes de la CNUCED montrent bien que le problème en matière
d’exportation des entreprises marocaines est plus structurel que
conjoncturel. Ainsi, le rapport indique que plus de 75% des entreprises
marocaines qui exportent le font dans les trois premières années de leur
existence, et en déduit que les entreprises anciennes ont moins de chances
de se mettre à exporter, même pour répondre à l’évolution des incitations
macroéconomiques.

«Le fait d’exporter oblige une entreprise à se soumettre aux exigences du
consommateur étranger, c’est-à-dire qu’il lui donne la possibilité
d’apprendre à concevoir des articles dont ce consommateur a envie. Les
données relatives au secteur manufacturier marocain montrent que c’est cette
expérience du marché, et non l’apprentissage de la productivité, qui permet
à ce secteur d’exporter. Cela pourrait s’expliquer par la forte
concentration des exportations marocaines sur les biens de consommation»,
lit-on dans le document onusien. Pour notre confrère marocain, ‘’c’est donc
l’apprentissage de la productivité qui permettra de donner un coup de fouet
aux exportations’’.

Par ailleurs, notons que les analystes de la CNUCED ne se contentent pas que de
constat ou de bilan, parfois leurs diagnostics se révèlent comme de
véritables ‘’solutions pour acquérir un avantage comparatif dans le secteur
manufacturier’’. Hélas, dans certains pays en Afrique subsaharienne, ça n’a
pas toujours été le cas. Mais dans son dernier rapport, la CNUCED accuse de
façon claire les investissements à faible productivité, mais pointe
également le doigt sur la petite taille des entreprises de transformation et
sur l’accès limité aux facteurs de production, particulièrement le crédit.

Mais les experts de la CNUCED vont encore plus loin et risquent même de
provoquer le courroux de leurs homologues de l’OMC (Organisation mondiale du
commerce). En effet, ils émettent un avis dubitatif sur le tout
libéralisme des marchés. «Il est douteux que le seul fait d’élargir encore
la libéralisation du commerce sans renforcer la capacité de production des
entreprises africaines permette d’augmenter sensiblement les exportations
d’articles manufacturés du continent». Voilà qui n’arrange pas les
‘’affaires’’ de l’OMC, embourbée dans son cycle de Doha depuis bientôt 10 ans.

Pour finir, rappelons que dans le même rapport de la CNUCED, l’expérience
tunisienne a été présentée comme un modèle. Le rapport annuel sur le
développement économique en Afrique 2008 de la CNUCED indique notamment que
‘’ce pays (la Tunisie) avait les droits de douane les plus élevés en 2006,
mais il est en troisième position pour le ratio des exportations d’articles
manufacturés en PIB, ce qui montre que les taxes sur les échanges ne sont
que l’un des multiples facteurs qui déterminent les résultats à
l’exportation’’.

Certes en comparaison avec les autres pays du Nord de l’Afrique, on est le
champion incontesté, mais nous pensons que, justement, cela nous donne plus
de challenge, car comme dit le dicton, ‘’qui n’avance pas recule’’.
Autrement dit, il est impératif d’améliorer la productivité de nos
entreprises -ce qui suppose qu’elles engagent des ressources humaines de
qualité-, afin de pouvoir toujours exporter davantage sur les marchés
extérieurs.