Depuis
leur implantation dans les environs de Tunis, les magasins de grande
distribution, tels Carrefour et Géant, ont-ils modifié – ou bousculé – les
habitudes du Tunisien ? Ont-ils, surtout, porté de quelque manière préjudice
aux petits commerces ?
Webmanagercenter
a prêté l’oreille aux uns et aux autres. Voici ce qu’il en ressort.
S’il est quelque chose de frappant dans ce qu’il est convenu de désigner par
‘‘Grandes surfaces’’, c’est que, en dépit de l’importance de leurs
superficies marchandes, elles ne désemplissent plus un seul petit moment à
longueur de journée. Sauf, peut-être, à l’occasion du mois saint dont
l’interruption du jeûne impose ‘‘l’évacuation’’ des lieux à tel moment pour
pouvoir rentrer à temps, les clientèles semblent prendre plaisir à lambiner
entre les rayons et les étalages. On y vient, certes, pour acheter,
s’approvisionner, mais d’aucuns y viennent parce qu’il fait si bon s’y
rendre. Les facteurs espace, disponibilité des articles, prix convenables,
organisation et belle présentation des produits exercent un tout autre
attrait sur le ‘‘visiteur’’ qui n’est pas forcément acheteur, ou plutôt qui
n’est plus seulement
acheteur.
Chez
l’épicier du coin, dans une petite supérette où l’on peut se permettre le
self-service comme dans les grands magasins (Magasin Général, Monoprix,
Promogros…), le temps laissé çà et là par le client n’est pas le même. Chez
le premier, on a hâte d’acheter et de s’en aller ; dans la seconde, c’est
juste le temps de se servir soi-même ; dans la troisième catégorie, c’est
plutôt l’espace –plusieurs fois plus important qu’une petite supérette– qui
nécessite de s’y attarder quelques moments. Mais dans tous les trois, on
calcule –sciemment ou inconsciemment– son temps et on s’en va. S’agissant
d’un hypermarché, le temps n’est plus compté, ou, à la rigueur, on le
prévoit assez long, et c’est l’évidence même : on ne va pas dans un
hypermarché tout comme on va chez le boulanger ou l’épicier. C’est pour dire
que l’hypermarché, de par les facteurs cités plus haut, exige tout d’abord
sa part de temps qui, celle-ci, ne peut souffrir, dans la plupart du temps,
d’autres courses à faire ailleurs. L’hypermarché, une fois insinué dans les
habitudes, devient en soi un programme avec bien son corollaire temps et
budget.
Et
nous voilà déjà dans la deuxième exigence : se rendre dans un hypermarché
suppose, non pas une ou deux, mais plusieurs courses à la fois. En raison,
évidemment, du facteur temps, mais surtout parce que de telles surfaces sont
généralement à plusieurs km en dehors de la ville (on ne fait pas une telle
distance pour une baguette de pain et un litre de lait). Ce qui, encore,
suppose, dans la majorité écrasante des cas, la voiture (à tout le moins un
taxi, mais très rarement, sinon jamais, le bus).
Il
est presque permis, d’ores et déjà, de brosser le profil du client d’un
hypermarché : c’est un quelqu’un motorisé (forcément), qui programme ses
courses et ses visites dans lesdites grandes surfaces, qui sait gérer son
budget, et qui, pour tout dire, paraît être très organisé. Eh bien, non. Ce
profil ressemble plutôt à un portrait robot, qui ne dit pas tous les autres
‘‘traits’’ du client.