ège de la Société Générale, le 7 février 2008 à Puteaux (Photo : Joël Saget) |
[16/10/2008 17:38:45] PARIS (AFP) Le trader de la Société Générale qui a vendu en janvier les positions cachées de 50 milliards d’euros prises par Jérôme Kerviel, enregistrant une perte de 6,3 milliards d’euros, a été entendu jeudi par les juges sur les conditions de ce débouclage.
Cette audition qui faisait suite à celles lundi des commissaires aux comptes de la banque avait été demandée aux juges par les avocats de Kerviel qui espéraient “un tournant” dans ce dossier.
Trader expérimenté, M.K. avait été choisi par la direction de la banque pour déboucler (vendre) en trois jours (entre le 21 et le 23 janvier au soir) sur le marché international les positions hors normes de Kerviel après la découverte de la fraude le 20 janvier.
Ce débouclage, qui s’est déroulé “dans un contexte de mini-Krach”, selon l’expression du PDG Daniel Bouton, avait occasionné pour la banque une perte de 6,3 milliards d’euros, ramenée à 4,9 milliards après la prise en compte d’1,4 milliards de gains réalisés auparavant par M. Kerviel.
A l’issue de l’audition, Me Bernard Benaiem, avocat de Jérôme Kerviel, a indiqué jeudi avoir demandé à la banque de fournir la preuve que les 5 milliards perdus provenaient bien du débouclage des positions de son client. “Cela reste pour l’instant une affirmation de la Société générale”, a-t-il expliqué.
M.K. “a reconnu qu’il n’avait connaissance de rien. Il exécutait des instructions sans savoir ni le pourquoi, ni le comment, ni même le quantum des volumes sur lequel il était en train d’opérer”, a ajouté l’avocat.
“Les positions ont été débouclées trop vite et mal. Elles ont été vendues à la casse. Dans des conditions différentes, la perte aurait été moins importante”, a assuré Caroline Wasserman, autre avocate de Kerviel.
“Le débouclage a débuté avec une bourse américaine fermée, soit un tiers du marché mondial, pour cause de commémoration de la mort de Martin Luther King, et avec une bourse asiatique en chute de cinq points à l’ouverture : avec cela, on ne peut faire que des pertes”, a-t-elle ajouté.
“La banque avait l’obligation réglementaire de déboucler les positions frauduleuses de Kerviel”, a justifié pour sa part Me Jean Reinhart, avocat de la Société Générale. “Ce débouclage est intervenu dans les meilleures conditions possibles”, a-t-il assuré.
Après le débouclage, la banque avait notamment expliqué avoir dû agir dans les plus brefs délais en raison du risque vital que faisaient peser sur elle les prises de positions de Kerviel, supérieures à ses fonds propres.
L’opération a été réalisée dans le plus grand secret avec l’accord de l’autorité des marchés financiers (AMF) et du gouverneur de la Banque de France qui n’a informé le gouvernement que le mercredi pour éviter “tout risque de fuite involontaire”, selon la Banque de France.
“L’idée était de ne pas peser plus de 8 à 10% du marché et d’écouler les positions au fil de l’eau pour ne pas éveiller les soupçons du marché”, avait expliqué une source proche de la banque.
“A l’issue de deux jours de confrontation, il apparaît que les promesses de M. Kerviel de démontrer enfin la vérité ont été totalement démenties”, a estimé Jean Veil, avocat de la banque. “Il apparaît que les commissaires aux comptes ne savaient rien parce que tout était dissimulé et que le débouclage s’est fait dans des conditions optimales”, a-t-il ajouté.
Lundi, les avocats de Kerviel ont réaffirmé leur conviction que la hiérarchie du trader, et notamment les services comptables, était parfaitement au courant des actions de leur client.