à D: le Premier ministre français François Fillon, le Président de la Commission européenne José Manuel Barroso et le président français Nicolas Sarkozy le 16 octobre 2008 à Bruxelles (Photo : Dominique Faget) |
[18/10/2008 17:28:33] PARIS (AFP) Face à la tempête boursière qui ébranle la planète, l’Europe s’efforçait samedi de convaincre les Etats-Unis de la nécessité d’une refonte du système financier mondial, à l’instar des accords de “Bretton Woods”.
Conviés à la résidence présidentielle américaine de Camp David, dans le Maryland, le président français Nicolas Sarkozy, président en exercice de l’Union européenne, et le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, devaient débattre de ce sujet avec George W. Bush samedi.
Objectif des Européens, à l’avant-garde du combat contre la crise : réunir un sommet pour fixer les règles du jeu d’un nouvel ordre financier international, comme ce fut le cas dans la bourgade américaine de Bretton Woods en juillet 1944.
Les Européens ont déjà rallié à leur cause le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, qui a souhaité samedi la tenue d’un sommet international “au plus tard début décembre”. Il a proposé qu’il ait lieu à l’ONU à New York.
La réunion de Camp David intervient après une semaine de yo-yo sur des marchés financiers totalement “maniaco-dépressifs”, selon les termes du prix Nobel d’économie 2008, Paul Krugman.
Malgré ces montagnes russes, les principales places boursières européennes ont progressé sur la semaine : Paris a regagné 4,8%, Londres 3,3% et Francfort 5,2%. Et elles ont fini la séance de vendredi sur une note positive, signant de nettes hausses.
Le tableau est plus mitigé pour la Bourse de New York : incapable de confirmer son rebond de la veille, le Dow Jones a cédé vendredi 1,4%, dans un marché très volatile. Sur la semaine, l’indice a toutefois gagné 4,7%.
à son arrivée au sommet de la Francophonie le 17 octobre 2008 à Quebec (Photo : David Boily) |
En pleine tourmente financière, le directeur du Fonds monétaire international (FMI), le Français Dominique Strauss-Kahn, a été rattrapé par une possible affaire de népotisme : il fait l’objet d’une enquête interne sur un cas de favoritisme présumé lié à des relations intimes avec une subordonnée.
En 2007, le président de la Banque mondiale, Paul Wolfowitz, avait dû quitter ses fonctions après avoir été accusé d’avoir demandé l’avancement de sa compagne, également employée par la Banque mondiale.
M. Strauss-Kahn avait jugé début octobre que la crise financière était “un échec de la croyance que le marché peut se régler tout seul”. Mais il s’était montré sceptique sur l’organisation d’un nouveau Bretton Woods.
L’idée d’un sommet international fait cependant son chemin. Pour Nicolas Sarkozy, il devrait réunir les pays du G8, élargi au G5, c’est-à-dire les cinq pays émergents que sont la Chine, l’Inde, le Brésil, le Mexique et l’Afrique du Sud, ainsi qu’à “un pays arabe”.
Optimiste, M. Sarkozy a déclaré vendredi au Québec avoir “l’impression” que “le principe” d’un tel sommet avant la fin 2008 était “acquis”.
La Maison Blanche a toutefois laissé entendre qu’il ne fallait pas trop attendre des discussions de Camp David. “Je peux vous assurer que je ne crois pas qu’on réécrira Bretton Woods” à Camp David, a plaisanté sa porte-parole.
ésident américian George W.Bush à Washington, le 17 octobre 2008 (Photo : Mandel Ngan) |
M. Bush a admis vendredi la nécessité d’une réforme du système. Mais, à trois mois de quitter la Maison Blanche, il a ajouté que cette tâche incomberait à son successeur.
Dans une allocution à la radio, il a rappelé samedi croire “fermement en la liberté des marchés”.
En attendant une refonte du système, les marchés financiers restaient nerveux. Ainsi la Bourse saoudienne, la plus importante du monde arabe, a connu un mauvais début de semaine, clôturant samedi en baisse de 5,2%.
Objet de gigantesques plans de sauvetage de part et d’autre de l’Atlantique, le secteur bancaire continue, lui aussi, à montrer des signes de fragilité.
La Caisse d’Epargne, gestionnaire des économies de 27 millions de Français, a annoncé vendredi la perte de 600 millions d’euros à cause des risques inconsidérés pris par trois de ses traders en plein krach boursier.
Samedi, le patron de la banque mutualiste française, Nicolas Mérindol, a récusé, dans un entretien à l’AFP, toute “dissimulation” ou “fraude”, refusant implicitement toute comparaison avec l’affaire de la Société générale.
La crise à la Caisse d’Epargne n’est “pas acceptable” et “les responsables doivent en tirer les conséquences”, a réclamé Nicolas Sarkozy.
En Allemagne, la chancelière Angela Merkel et ses ministres doivent se réunir lundi pour peaufiner les détails d’un plan d’aides publiques aux banques.
Dans le sillage de la crise bancaire, les craintes d’une récession économique durable s’amplifient en Europe.
L’Irlande est déjà en récession et l’Italie pourrait la rejoindre, avec une baisse du produit intérieur brut de 0,2% attendue pour 2008 par le patronat local. Quant à l’Allemagne, elle compte au mieux sur une croissance de 0,2% en 2009.
Mais les dirigeants européens ont exclu pour l’instant un grand plan coordonné de relance économique, comme celui adopté pour le secteur bancaire.
Le Premier ministre belge Yves Leterme a annoncé samedi travailler à “un plan pour amortir le choc de la crise” financière sur l’économie.
à Bruxelles, le 15 octobre 2008 (Photo : John Thys) |
Les dirigeants hongrois cherchaient samedi une issue à la crise financière lors d’un “sommet national” à Budapest. La Hongrie a été placée sous assistance respiratoire par la Banque centrale européenne avec un prêt de 5 milliards d’euros.
Quant à l’Islande, elle décidera cette semaine si elle sollicite ou non une aide du FMI, ce qui serait une première pour un pays occidental depuis 1976.
Le gouvernement russe accordera des aides publiques aux entreprises des secteurs frappés par la crise financière, a annoncé samedi le Kremlin. Mais aucun montant n’a été avancé.
Aux Etats-Unis, on évoque déjà un plan de relance économique pour “reconstruire l’Amérique”, d’un montant de 150 milliards de dollars, qui pourrait être adopté avant même l’entrée en fonction du prochain président le 20 janvier.
Signe du ralentissement de la conjoncture mondiale, la chute des cours du pétrole, divisés par deux depuis l’été à environ 70 dollars face à une baisse de la demande. Un plongeon qui a poussé l’Opep à avancer de trois semaines, au 24 octobre, sa prochaine réunion.
Après le Venezuela, l’Iran et l’Algérie ont plaidé samedi pour une réduction de la production de l’Opep pour défendre le prix de l’or noir.