Mobilisation sur tous les fronts contre la récession, Wall Street replonge

[21/10/2008 22:26:07] WASHINGTON (AFP)

photo_1224624149201-9-1.jpg
La Bourse de New York, le 20 octobre 2008 (Photo : Spencer Platt)

Sous pression, l’Europe et les Etats-Unis se sont mobilisés mardi sur tous les fronts pour contrer les menaces de récession, mais Wall Street a repiqué du nez au vu de résultats d’entreprises peu encourageants.

Alors que Washington mettait le cap sur un nouveau plan de relance, les pays de l’Union européenne ont commencé à annoncer, en ordre dispersé, de timides mesures de soutien de leurs économies, toujours plus fragilisées par la crise.

Signe des craintes pour la résistance de l’économie européenne, l’euro est passé sous 1,31 dollar pour la première fois depuis début 2007. Le billet vert revient en grâce, les cambistes tablant sur un deuxième plan de relance américain.

La Maison Blanche s’est dite ouverte à la possibilité d’un tel plan, après celui de 168 milliards de dollars mis en place au printemps. L’idée avait été avancée la veille par le président de la Réserve fédérale, Ben Bernanke.

Le temps presse, car “l’économie américaine est déjà en récession”, a jugé la Banque centrale du Canada en abaissant d’un quart de point son taux directeur pour tenter de stimuler la croissance de l’économie, qui a commencé à donner des signes d’essoufflement.

Trois Américains sur quatre pensent que leur pays traverse une récession qui durera au moins six mois, mais la majorité d’entre eux ne croient pas à une crise similaire à celle de 1929, selon un sondage.

Après son rebond de la veille, Wall Street a dévissé, la première bourse mondiale s’inquiétant de résultats d’entreprises qui semblent confirmer le scénario d’une récession profonde. L’indice Dow Jones a perdu 2,50%.

Les investisseurs se sont concentrés sur les prévisions “mitigées ou négatives” données par la plupart des entreprises, a souligné l’analyste Art Hogan, de Jefferies.

photo_1224612472493-9-1.jpg
évolution de l’euro face au dollar depuis deux ans

La Bourse de Buenos Aires a plongé à la clôture avec une baisse de 10,99%, à la suite de la décision du gouvernement argentin de nationaliser le système des retraites.

La tendance avait été hésitante sur les autres marchés financiers. Londres et Francfort ont perdu respectivement 1,24% et 1,05%. Portée par les valeurs bancaires, la place de Paris résistait mieux, terminant en hausse de 0,78%. En Asie, Tokyo a gagné 3,34% mais Hong Kong a cédé 1,8% et Shanghai 0,78%.

“Même si les marchés financiers paraissent se stabiliser, le retournement de l’économie ne fait que commencer”, a analysé Paul Dales de Capital Economics à Londres.

Les Européens, qui écartent pour l’heure tout plan de relance global, continuent d’agir de manière isolée.

Le président français Nicolas Sarkozy a prôné au Parlement européen un plan de relance coordonné, écarté par les dirigeants des Vingt-sept lors de leur sommet la semaine dernière.

“Cela ne veut pas dire qu’on va vider les caisses, faire de la relance en dépensant l’argent qu’on n’a pas. Mais est-ce que ça ne mériterait pas qu’on en parle entre nous pour construire une réponse coordonnée?”, a-t-il plaidé.

En France, le gouvernement a annoncé l’injection de 10,5 milliards d’euros dans les six plus grandes banques privées, afin de rouvrir le robinet du crédit et contrer la récession qui menace. Dopés par cet apport d’argent frais, les titres des grandes banques françaises se sont envolés, Crédit Agricole gagnant près de 15%, Société Générale plus de 10% et BNP Paribas plus de 8%.

La France a recensé 11.400 défaillances d’entreprises au troisième trimestre, du jamais vu depuis 1997.

photo_1224590219424-9-1.jpg
ésident français Nicolas Sarkozy, le 21 octobre 2008 au Parlement européen à Strasbourg (Photo : Dominique Faget)

En Allemagne, la banque régionale BayernLB, en grande difficulté, va demander une aide financière de l’Etat à hauteur de 5,4 milliards d’euros, a annoncé le ministre bavarois des Finances Erwin Huber. Elle devient la première banque du pays à faire usage du plan de soutien au secteur, d’un volume de 480 milliards d’euros.

Le gouvernement est prêt à lancer un nouveau programme pour faciliter l’accès au crédit des entreprises et éviter une contagion de la crise financière à l’économie réelle, selon la presse allemande.

Au Royaume-Uni, le gouvernement a dévoilé un plan pour aider les petites et moyennes entreprises alors que le moral des industriels n’arrête pas de se dégrader. Il envisage aussi d’augmenter ses dépenses publiques et de les recentrer sur le logement et l’énergie.

La confiance est cependant revenue peu à peu sur le marché interbancaire qui a continué à se détendre sous l’impulsion des actions conjuguées des gouvernements et des banques centrales.

Passée l’urgence d’endiguer la panique sur les marchés financiers, les divergences d’approche sur les questions de fond sont apparues au grand jour.

Nicolas Sarkozy a ainsi osé une pique à l’encontre des Etats-Unis, implicitement accusés d’avoir vécu à crédit sur le dos du reste du monde.

“Peut-on continuer nous (en Europe) à porter les déficits de la première puissance mondiale sans avoir un mot à dire ? La réponse est clairement non”, a-t-il déclaré devant le Parlement de Strasbourg.

A Paris, dix-sept pays réunis à l’initiative de l’Allemagne et de la France ont demandé à l’OCDE de “réactualiser” sa “liste noire” des paradis fiscaux non coopératifs d’ici mi-2009. Berlin a souhaité mettre la Suisse à l’index.

photo_1224607646322-9-1.jpg
étaire d’Etat américaine Condoleezza Rice à Washington, le 21 octobre 2008 (Photo : Tim Sloan)

Pour les Etats-Unis, une des solutions pourrait venir du commerce mondial.

La secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice a appelé à conclure les négociations de Doha sur la libéralisation des échanges dans le cadre de l’OMC afin d’envoyer un “signal fort” à l’économie mondiale.

En Amérique latine, dix pays se réuniront lundi au niveau ministériel et des banques centrales à Brasilia pour discuter des moyens de faire face à la crise financière internationale, a annoncé le ministère brésilien des Affaires étrangères.

Contrairement à l’UE, les pays de la région n’ont encore pris aucune mesure coordonnée face à la crise.

Le prix du pétrole, qui est reparti vers le bas sur fond de baisse de la consommation, pourrait également faciliter un rebond de la croissance. A New York, le baril a fini à 70,89 dollars, en baisse de 3,36 dollars par rapport à la clôture de lundi.

Inquiets des conséquences de la crise, les grands argentiers des six monarchies arabes du Golfe ont d’ailleurs décidé de se réunir samedi à Ryad.