ège de la société du groupe français de cosmétiques L’Oréal à Clichy (Photo : Daniel Janin) |
[31/10/2008 15:09:38] PARIS (AFP) Affecté par la réduction des dépenses de produits de beauté des consommateurs, le numéro un mondial des cosmétiques L’Oréal a renoncé à dégager une croissance à deux chiffres de ses profits en 2008, pour la première fois en 24 ans.
“Croissance la plus faible de la décennie passée, très décevante”, “détérioration des tendances”: les ventes de L’Oréal au troisième trimestre, dévoilées jeudi soir, ont largement déçu les investisseurs, avec une petite croissance de 3,4% contre 8% sur l’ensemble de 2007.
Le groupe français a en plus abaissé son objectif de ventes pour 2008, pour la deuxième fois de l’année, et reconnu qu’il ne parviendra pas à enregistrer une croissance à deux chiffres de ses profits, comme il avait pourtant l’habitude de le faire depuis bientôt 24 ans: celle-ci sera de 7 à 8%, contre près de 16% en 2007.
Pire: il n’y a “pas d’espoir de reprise à court terme”, estime Shamina Bhaidjy, analyste chez Natixis Securities.
Conséquence: l’action L’Oréal reculait de 4,14% à 58,29 euros vendredi vers 15H15, dans un marché parisien stable.
“Le monde et les conditions de marché ont énormément changé entre fin août et fin octobre”, a justifié le directeur général Jean-Paul Agon jeudi lors d’une conférence téléphonique.
L’Oréal Paris, Cacharel, Biotherm, The Body Shop, Maybelline, Giorgio Armani, Redken ou Vichy: cette kyrielle de marques de soins, maquillage et parfums, présentes sur tous les continents, était censée protéger le groupe des turbulences économiques.
Mais avec l’accélération de la crise depuis septembre, les achats des consommateurs des pays émergents ne suffisent plus à compenser la baisse d’activité aux Etats-Unis et en Europe.
Pour preuve, le ralentissement progressif du marché mondial des cosmétiques: de 4% fin juin, sa croissance est passée à 3% fin septembre, notent plusieurs analystes.
En Europe de l’Ouest et aux Etats-Unis, la crise s’accompagne d’une “baisse de fréquentation des salons de coiffure et des grands magasins”, explique Shamina Bhaidjy.
Pour L’Oréal, la situation est particulièrement difficile en France, a reconnu M. Agon: ce marché, qui représente un peu plus de 10% des ventes de L’Oréal, est aujourd’hui “stable”.
Selon le cabinet NPD, la tendance était même à la baisse (-2,3%) des volumes vendus fin août par les groupes de cosmétiques dans les grands magasins français et les chaînes spécialisées, comme Nocibé, Sephora ou Marionnaud.
Les nuages s’accumulent sur le secteur: l’américain Estée Lauder, qui s’attend à ce que “le ralentissement de l’économie mondiale ait un impact” sur sa croissance, vient lui aussi d’abaisser ses prévisions. Et le japonais Shiseido a annoncé un repli de son chiffre d’affaires sur son marché intérieur entre avril et septembre, en raison de la morosité ambiante.
Chez L’Oréal, la crise force à prendre des décisions quasi-historiques: pour “la première fois depuis de très nombreuses années”, le groupe va fermer deux usines européennes, une à Monaco et l’autre au Pays-de-Galle, qui emploient au total 458 salariés, pour regrouper certaines activités sur d’autres sites ouest-européens, a annoncé M. Agon.
Déterminé à réduire ses coûts, L’Oréal va “étudier toutes les opportunités”, a-t-il ajouté, sans donner d’autre précision ni se risquer à annoncer des prévisions pour 2009: ce serait “imprudent et déraisonnable”.
Or, “étant donné le ralentissement attendu de certains marchés émergents, les nouvelles prévisions de ventes de L’Oréal ne sont pas sans risques”, juge Harold Thompson, de Deutsche Bank.