D’après les rapports de la Banque mondiale, la région du
Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord est, historiquement, une aire où la
disponibilité en eau est la plus faible au monde. En plus, ces dernières années,
la pluviométrie, dans ces contrées, est en train de baisser fortement, au grand
dam d’un secteur primaire, encore dominant dans les économies locales de
l’ensemble de ces pays, a estimé Madame Julia Bucknall, spécialiste en chef de
la gestion des ressources au sein de cette institution financière
internationale.
D’ailleurs, en raison des changements climatiques en cours dans le monde,
certains analystes évaluent une chute des précipitations, au niveau planétaire,
de 20 à 40%, ce qui va pousser, prédisent-ils, des pans entiers de la population
mondiale à changer radicalement de mode de vie, à essayer de vivre, dans un
proche avenir, avec une bien plus petite quantité d’eau et à réorganiser les
mesures d’irrigation, encore en vogue dans le secteur agricole (dans la région
MENA, 85% de l’eau sont utilisés pour l’irrigation).
Et la Tunisie dans tout cela ? De quelle manière compte-t-elle faire face à son
déficit pluviométrique ? Quelle est la situation réelle de nos nappes
souterraines ?
Etats des lieux
Le taux de pluviométrie de la saison agricole 2006-2007 a enregistré, d’après
certaines sources du ministère de l’Agriculture et des Ressources hydrauliques,
un excédent notable dans la plupart des régions du pays (par exemple 6% à
Siliana et à Gabès 108%), à l’exception des gouvernorats de Jendouba, Béja,
Kasserine et Tataouine où le déficit a parfois atteint 5% par rapport à la
moyenne habituelle, ce qui a réduit le ruissellement vers les barrages du Nord
(-140 millions m3), généralement en état maximal de stockage.
On estime les volumes des eaux extraitesdurant l’année hydraulique passée à
environ 1117 millions m3 dont 932 millions m3 provenant des barrages du nord,
véritable réservoir stratégiquedu pays qui entend rationnaliser, tout au long de
la prochaine décennie, sa consommation, préserver ses ressources souterraines et
accentuer la recharge artificielle des nappes phréatiques tout en développant,
durant le XIème plan, l’utilisation des eaux saumâtres dans le secteur de
l’irrigation conformément aux normes nationales et internationales.
En outre, concernant les eaux souterraines, le Rapport national sur l’état de
l’environnement a relevé une augmentation de la moyenne de la salinité dans les
nappes des régions de l’est en comparaison avec celles de l’ouest en raison de
l’exploitation excessive et de l’intrusion éventuelle de l’eau de mer.
Finalement, la consommation de la population tunisienne est passée, durant les
deux dernières décennies, de 150 millions m3 en 1989 à 211,8 millions m3 en 2005
suite à la mise en œuvre d’une stratégie visant l’intégration des zones rurales
au système d’adduction de la SONEDE qui entend, à l’avenir, s’appuyer encore
davantage sur les stations de dessalement pour faire face, surtout au sud du
pays, à la dégradation qualitative des nappes, à la diminution quantitative des
ressources hydriques et à l’augmentation croissante des besoins en eau dans ces
régions.
Planifier l’avenir
«Afin d’endiguer le déficit pluviométrique du pays et lancer les bases d’un
programme national d’économie d’eau, les pouvoirs publics ont décidé le
développement des ressources hydriques non conventionnelles, l’organisation de
formation à l’intention des agriculteurs pour la maîtrise des techniques
d’irrigation moderne et la consolidation de la gestion participative des
infrastructures hydrauliques», clame Monsieur Slimane Ben Youssef, chargé de la
communication au sein du ministère de l’Environnement et du Développement
durable, qui rappelle la volonté de l’Etat de recourir, avec l’aide des
institutions internationales, aux technologies de télédétection pour déterminer
l’utilisation des ressources en eau au cours des différentes périodes de temps,
estimer les niveaux des ruissellements potentiels et déterminer ainsi les
rendements des nappes phréatiques.
D’après le Rapport national sur l’état de l’environnement, la Tunisie, en
intégrant, dès l’année 2007, le projet régional MED/MAP-UNESCO (regroupement de
13 pays riverains de la Méditerranée) dont l’objectif est la protection des
ressources hydriques et des aquifères côtières du Bassin méditerranéen, s’est
dotée des moyens scientifiques et logistiques adéquats, en adoptant les
meilleurs pratiques internationales dans ce domaine pour faire face à la
salinisation rampante dans certaines régions du pays, à la vulnérabilité
croissante des nappes d’eau et aux changements climatiques persistants,
véritables fléaux endémiques des temps modernes.