– Les chantiers mis en route pour réaliser une dizaine de
mégaprojets ont bien progressé, en 2008.
Ces
projets, d’une nouvelle génération, mobiliseront des investissements de plus
de 50 milliards de dollars. Ils ont pour objectif de contribuer à la
création des conditions d’une croissance plus rapide et plus soutenue.
L’enjeu est de taille lorsqu’on sait que la Tunisie est appelée à
réaliser, sur dix ans, un taux de croissance annuel de plus de 6%, à créer,
durant cette même période, un million d’emplois et à doubler le pouvoir
d’achat pour le porter à 8.000 dinars
Ces mégaprojets, qui se répartissent en cinq catégories, répondent à des
priorités nationales en matière de création d’emplois, d’autosuffisance
énergétique, d’extension du réseau autoroutier, de sauvegarde de
l’environnement, de promotion de la culture et de conversion de Tunis en hub
financier international.
De nouvelles villes
Les projets touristico-immobiliers ont pour point commun une vocation
immobilière mais diffèrent par la spécificité de leurs produits. Chaque
projet a pour mission de développer un produit bien déterminé.
La Tunisie, site de production international et destination touristique
confirmée, intéresse désormais plusieurs investisseurs immobiliers des pays
du Golfe, de l’Europe et de l’Asie.
De nouvelles villes sont en construction sur une superficie globale de
2.700 hectares. Parmi ces mégaprojets figurent trois projets prioritaires,
dirigés par de grands groupes émiratis, qui sont en cours de réalisation. Il
y a, tout d’abord, la cité du siècle, baptisée “La porte de la Méditerranée”
du groupe émirati Sama Dubai.
Les travaux de réalisation de la première tranche du projet de cette
ville qui accueillera environ 350 mille habitants, viennent de démarrer et
les bureaux de vente sur plan sont ouverts depuis fin octobre dernier.
Sama Dubaï, société internationale de promotion immobilière et
d’investissement relevant de Dubaï Holding, qui pilote le projet, a obtenu,
en juillet 2008, l’approbation par le gouvernement tunisien du plan
d’aménagement de la nouvelle ville.
Cette cité comprendra des groupements immobiliers et commerciaux, et des
activités de services pour, à terme, devenir une “plateforme internationale
de services et d’affaires”.
Le projet, qui coûtera 25 milliards de dollars sera réalisé, en 14
étapes, sur les Berges-Sud du lac de Tunis.
La première tranche a démarré, fin septembre 2008, autour de l’ancien
port de Tunis. Elle consistera en la construction, sur une période allant de
4 à 5 ans au maximum, de 16 buildings d’une valeur globale de 1,3 milliard
de dollars, entièrement, à la charge de Sama Dubaï.
La clientèle ciblée est universelle et devrait toucher les différentes
catégories sociales. Cette clientèle peut être de Tunisie, du bassin
méditerranéen et maghrébin, et du reste du monde et surtout des pays du
golfe. Les étrangers peuvent acquérir des biens immobiliers sans avoir à en
demander l’autorisation au gouvernement tunisien qui sera, néanmoins, tenu
informé de toute transaction.
S’agissant de l’emploi, la priorité sera accordée aux ressources locales
“autant que possible”. Concernant le financement du projet dont le coût est
estimé à 25 milliards de dollars, il ne sera pas assuré, dans sa totalité,
par Sama Dubaï mais aussi par d’autres investisseurs probablement locaux ou
étrangers. Ces derniers seront traités selon un ordre de priorité.
Le deuxième mégaprojet, à savoir “Sports City”, sera réalisé par l’homme
d’affaires émirati Abou Khater, sur les Berges Nord du Lac de Tunis. Il
s’agit d’une grande cité sportive, composée de neuf centres sportifs de
formation. Le complexe s’étendra sur 255 hectares et sera découpé en trois
zones.
Une première zone de 36 hectares sera consacrée à la formation de jeunes
sportifs tunisiens et étrangers, alors qu’une deuxième zone de 100 hectares
sera réservée exclusivement à l’aménagement d’un terrain de golf de 18
trous. Elle comptera également un complexe immobilier, une académie de golf
et un Club House.
Dans la troisième zone, qui sera aménagée sur une superficie de 120
hectares, des unités hôtelières de luxe, des résidences, des centres
commerciaux, des aires de jeux, des écoles privées et des cliniques privées,
seront érigés.
Ce complexe représente un investissement estimé à 5 milliards de dollars.
Le groupe émirati a entamé, en 2008, une campagne de recrutement de
compétences tunisiennes
Le troisième mégaprojet touristico-immobilier n’est autre que “Bled El
Ward” (la ville des roses) du groupe émirati “Al Maabar”. Ce projet sera
réalisé autour de la Sebkha de l’Ariana et aux confins de La Soukra.
Cette nouvelle ville dont les travaux de réalisation ont déjà démarré se
propose, avec ses futurs canaux, de rivaliser avec Venise et Amsterdam. Elle
couvrira une superficie de 5.000 hectares, dont 2.600 hectares de plan
d’eau, et mobilisera des investissements de l’ordre de 10 milliards de
dollars.
“Bled El Ward” comprendra une cité de santé de classe internationale, des
résidences, des espaces touristiques, de loisirs, de commerce et de sport,
ainsi que des parcs et des espaces verts.
D’autres projets touristico-immobiliers importants sont annoncés en
Tunisie. Il s’agit du projet touristique écologique du groupe italien “Preatoni”
qui sera réalisé dans la ville de Hergla, située au Nord-Ouest de la
Tunisie, par le groupe émirati “Emaar”.
Projets d’infrastructure
Au nombre de ces projets figurent, l’aéroport et le port en eau profonde
d’Enfidha, le pont de Radès-La Goulette et l’extension des réseaux
ferroviaire et autoroutier.
L’aéroport international d’Enfidha qui aura, une fois les travaux
parachevés, une capacité d’accueil de plus de 20 millions de voyageurs, est
actuellement en cours de construction sur une superficie de 5.700 hectares.
Le groupe turc TAV, Airport Holding Co, a été sélectionné au terme d’un
appel d’offres international, pour construire, financer et exploiter,
quarante années durant, la concession de l’aéroport d’Enfidha et de celui de
Monastir.
Le projet du pont de Radès-La Goulette est, pour sa part, cofinancé par
la Tunisie et le Japon moyennant un investissement global estimé à 141
millions de dinars. Les travaux de construction de ce pont, qui ont démarré
en août 2004, sont pratiquement achevés. Ces travaux portent sur une
distance de 14,65 Km, dont 12,65 Km de routes urbaines à 2×2 voies, en plus
des ouvrages d’art dont un pont haubané.
L’objectif du projet est d’aménager une liaison permanente, rapide et
directe entre les banlieues Nord et Sud de la capitale. Ce projet permettra
également de décongestionner le trafic routier, au niveau des entrées Nord
de la capitale et des villes du Kram et de La Goulette, et d’établir une
liaison entre les ports de Radès, La Goulette et la voierie structurante.
Pour ce qui est du Port en eau profonde d’Enfidha, un appel d’offres
international pour la réalisation de cet ouvrage est lancé. Quelques 8
sociétés internationales, parmi les plus connues dans le domaine du
transport maritime, ont manifesté leur intérêt pour ce projet.
Le bureau d’études hollandais “Royal Has-Koning” est chargé, avec le
concours d’un partenaire tunisien Development Consultants (IDC), de l’étude
de faisabilité technique du projet.
Les travaux d’aménagement, qui devront démarrer d’ici fin 2008, prévoient
la construction d’un port en eau profonde et d’une zone d’activités
logistiques, s’étendant sur 3.000 hectares, qui devraient offrir des
services de transport maritime des marchandises de qualité et au moindre
coût, tout en tenant compte des critères de sécurité et de la préservation
de l’environnement.
Ce port, qui sera cédé selon la technique de concession (50 ans non
renouvelables) pour un coût global de 1400 millions d’euros, sera doté, dans
une première étape, de 800 mètres de quai et, dans une seconde étape, de 1,5
km de quai.
Le réseau autoroutier du pays sera étendu de 220 kms. En 2008, le réseau
a été renforcé par l’aménagement du nouveau tronçon autoroutier de M’Saken-Sfax
d’une longueur de 98 kms.
Il intervient après l’ouverture, en juillet 2005, de l’autoroute
Tunis-Medjez El Bab-Oued Zarga et porte, ainsi, le réseau autoroutier à 364
km. Aujourd’hui, la Tunisie dispose d’autoroutes réparties en trois tronçons
Tunis-Sfax sur 238 kms, Tunis-Bizerte sur 53 km et Tunis-Oued Zarga via
Medjez El Bab sur 67 Km.
Une fois réalisé dans sa totalité, soit sur une longueur de 850 kms, vers
2016, cette autoroute sera raccordée, dans les délais, au mégaprojet
autoroutier régional, à savoir “la Transmaghrébine”, qui sera d’une longueur
de 7.000 kms.
Energie : Raffinerie et centrales électriques de seconde génération
Trois mégaprojets méritent d’être signalés: il y a d’abord la centrale
électrique tuniso-italienne (1200 mégawatts) qui sera réalisée, à Haouaria
et qui a été confiée à la société Tunisienne de l’électricité et du Gaz
(STEG) et à l’Entreprise Italienne de transport d’électricité (TERNA) qui
ont déjà fixé le calendrier d’exécution. D’un coût de 2 milliards d’Euros
(près de 4 millions de dinars), le projet a pour objectif d’assurer
l’échange de l’énergie électrique entre les deux pays, de maîtriser le coot
sur le marché énergétique et de renforcer les réseaux tunisien et italien.
Le deuxième mégaprojet, en cours de réalisation, consiste en la
construction d’une seconde raffinerie à Skhira. Le marché a été remporté par
Qatar Pétroleum International (QPI). Cette nouvelle raffinerie devrait être
opérationnelle en 2010. La compagnie qatarie bénéficiera, également, de son
exploitation, durant 30 ans. Coût du projet, 2 milliards de dinars.
Le projet consiste, en effet, en la construction d’une raffinerie de
pétrole, d’une capacité journalière de 120 mille barils au minimum, soit 6
millions de tonnes de pétrole raffiné, avec toutes ses composantes, à savoir
des unités de traitement et de raffinage, des bâtiments administratifs,
magasins, ateliers, routes, parkings et clôtures de sécurité, et ce dans le
site du terminal pétrolier de la Skhira.
Toujours au rayon de l’énergie, il est à signaler la centrale électrique
de Ghannouch. Ce marché a été remporté par le Groupe français Alstom. Le
contrat, clé en main, a été signé, début juillet 2008 avec la société
tunisienne d’électricité et de gaz (STEG). La centrale, totalement intégrée,
à cycle combiné, aura une capacité de 400 MW. Le montant du contrat s’élève
à 335 millions d’Euros (environ 616,4 millions de dinars).
Tunis, hub financier régional
Le Port Financier de Tunis, qui a fait l’objet, en juillet 2008, d’un
projet de loi, adopté par le parlement, est un mégaprojet de développement
économique, promu par la “Gulf Finance”, banque islamique leader dans la
région du Golfe. Il s’agit du premier centre financier offshore d’Afrique du
Nord.
Ce projet, dont le montant d’investissement s’élève à 3 milliards de
dollars, s’étendra sur 450 hectares dans la Zone de Hassiène à Raoued (Nord
de Tunis). Il comprendra un “Center”, un centre d’investissement bancaire et
de conseil, un centre d’assurances et un centre de transactions.
A ceci s’ajouteront une “marina” et un complexe commercial et
résidentiel. Les travaux devraient s’achever en 2010.
Le projet du Port Financier de Tunis permettra de hisser la Tunisie au
rang de “hub financier régional’’.
Doté d’une infrastructure moderne et futuriste, il intégrera la sphère
financière internationale et permettra au pays d’accroître sa notoriété
financière en développant des services financiers offshore de pointe.
Le port aura pour composantes : une marina, un complexe commercial et
résidentiel de villas, des locaux commerciaux et des bureaux professionnels,
un golf et un stade. Le projet comprend également une “Business School” de
classe internationale. Il s’agit, en fait, d’un projet d’université
étrangère qui sera implantée en Tunisie, après son approbation par décret,
promulgué, au début du mois d’aout écoulé.
Mégaprojets à vocation écologique
Il y a le projet Taparura à Sfax qui a pour vocation de réconcilier les
sfaxiens avec la mer. Il s’agit de dépolluer la côte-Nord de Sfax, sur une
longueur de 3 kilomètres et à gagner sur la mer une superficie égale à une
fois et demie la superficie de Sfax-El Jadida et à 3 fois la superficie de
la médina.
Les travaux, qui sont actuellement à un stade assez avancés (plus de
80%), consistent à extraire 6 millions de m3 de sable de la mer et à
apporter 1 million de m3 de sable de terre, pour remblayer une partie de la
côte et, partant, rendre la plage profonde propre à la baignade. Selon les
projections, les Sfaxiens pourront, dans exactement neuf mois, se baigner et
faire leurs randonnées piétonnes, du côté de Taparura. Le phosphogypse,
matière non biodégradable qui s’est accumulé dans cette zone des années
durant, sera isolé et contenu sous une chape de béton, puis recouvert d’un
immense espace vert.
La Banque européenne d’investissement (BEI) contribue au financement de
ce projet à hauteur de 34 millions d’Euros, soit environ 52 millions de
dinars.
L’autre mégaprojet à vocation écologique sera réalisé à Gabès. Ce projet
concerne l’évacuation et la mise en terril contrôlé des déchets du
phosphogypse rejetés par les industries chimiques dans le golfe de Gabès. La
BEI cofinance ce projet à hauteur de 54 millions d’Euros pour dépolluer le
golfe de Gabès.
La Cité de la culture, un des plus grands centres culturels du Bassin méditerranéen
La culture n’est pas occultée. Une grande maison de la culture sera, en
effet, édifiée à Tunis. Il s’agit du plus grand centre culturel du pays et
de la région.
Cette maison est déjà visible au niveau de l’avenue Mohamed V de la
capitale. Cet édifice prométhéen est tout simplement imposant. Erigée sur
une superficie de 9 hectares, cette grande réalisation architecturale et
culturelle, dont le coût est estimé à 70 millions de dinars, comportera un
ensemble de spectacles scéniques, dont un Opéra de 1800 places, une salle de
théâtre expérimental de 300 places et 7 studios de production de musique, de
théâtre et de danse. Le projet est réalisé par l’entreprise tchèque “Geosan’’.
La cité, composée d’une médiathèque, d’une galerie d’art et d’exposition,
de locaux dédiés aux commerces en rapport avec la culture, ainsi que d’un
musée des civilisations, sera réalisée en deux tranches. La première sur une
superficie de 48836 m2 et la deuxième sur 22000 m2. cette dernière inclut
essentiellement un musée national des civilisations. Le projet a démarré en
février 2006.
Les travaux devraient durer 900 jours. Cette grande réalisation se
développera autour de cinq thématiques différentes retraçant l’histoire de
la Tunisie. Il s’agit d’un musée sans collections, ni pièces authentiques,
où le visiteur devrait pouvoir voyager à travers une scénographie
muséologique basée sur des moyens audiovisuels et informatiques.
Au-delà de cet état des lieux, la Tunisie représente, aujourd’hui, un
véritable chantier à ciel ouvert. Partout, des mégaprojets sont mis en
route. Un triple objectif est recherché. Le premier vise à booster
l’activité économique et à accroître l’attractivité du pays, le second à
créer des emplois tandis que le troisième tend à convertir les grandes
villes du pays en mégapoles capables de rivaliser avec des métropoles
méditerranéennes, telles que Marseille, Rome et Barcelone.