Logo de Thales (Photo : Pascal Pavani) |
[18/11/2008 15:23:50] PARIS (AFP) Dassault Aviation, fabricant du Rafale, va s’emparer de 20,8% de Thales et d’un savoir-faire clef dans l’électronique de défense, avec la bénédiction de l’Etat qui veille au grain sur la réorganisation de ce secteur stratégique.
Alors que le géant européen EADS avait un temps convoité cette participation, le groupe français Dassault Aviation a finalement emporté la mise, sous l’oeil bienveillant du gouvernement qui a salué une “bonne nouvelle”.
Dassault a annoncé mardi être entré en “discussion exclusive jusqu’au 15 décembre” avec l’équipementier en télécommunications franco-américain Alcatel-Lucent pour le rachat de sa part de 20,8% dans Thales.
S’il conclut l’opération, le constructeur des jets d’affaires Falcon et de l’avion de combat Rafale possédera au total près de 26% de Thales, avec les 5,18% déjà détenus par le holding Groupe industriel Marcel Dassault, sa maison mère.
Il deviendrait alors deuxième actionnaire de Thales derrière l’Etat, propriétaire de 27% du groupe.
L’avionneur est prêt à payer 38 euros par action, pour 1,56 milliard au total, soit une prime importante par rapport au cours actuel de Thales, qui évoluait mardi autour de 30 euros.
EADS, qui avait approché Alcatel-Lucent début octobre avec une proposition à 44 euros par action, selon une source proche du dossier, a finalement renoncé à déposer une offre contraignante.
Dassault indique aussi qu’il a engagé des discussions avec l’Etat “en vue de définir les termes de leur partenariat” en tant qu’actionnaires de l’entreprise. Dassault va également demander à l’Autorité des marchés financiers d’être exempté de l’obligation de déposer une OPA.
L’Etat, sans qui rien ne peut se faire, est d’autant plus attentif que Thales est considéré comme un actif stratégique. Ses systèmes sont présents aussi bien dans l’aéronautique civile et l’espace, la sécurité et la défense – depuis les avions de combat Rafale jusqu’aux satellites, en passant par les frégates.
L’Etat, qui nomme des administrateurs et possède une action spécifique (“golden share”) lui donnant un droit de véto, “souhaite absolument conserver sa prédominance au sein de Thales”, a souligné une source proche du dossier au ministère de l’Economie.
“Il y a un pacte dans lequel l’Etat a des droits d’actionnaire privilégié et qu’il compte – quel que soit le scénario – asseoir fermement”, a insisté ce responsable.
Dassault est quant à lui resté mutique sur ses intentions et avare d’explications sur ses revirements: après s’être dit déterminé à sortir complètement de Thales, il a fait part de son intérêt pour la part d’Alcatel à la mi-octobre.
L’opération favoriserait l’intégration verticale autour du Rafale – un avion bourré d’électronique venant de Thales – et permettrait à Dassault de bénéficier de l’internationalisation très poussée du groupe, notent les observateurs.
Pour l’Etat, l’opération avec Dassault est “plutôt une bonne nouvelle parce que ça veut dire qu’on va discuter d’un projet industriel” et que la part d’Alcatel ne sera pas “mise aux enchères sur les marchés”, commente-t-on à Bercy.
Pour Alcatel-Lucent, cette vente est une bouffée d’oxygène financière, après une fusion douloureuse et sept trimestres consécutifs de perte, d’autant que Dassault est prêt à payer un bon prix.
Thales se dit pour sa part “satisfait” de voir que la situation de son actionnariat “est en très bonne voie d’être clarifiée et stabilisée”. La participation d’Alcatel avait plusieurs fois évolué ces dernières années.