Page d’accueil du site web YouTube en 2007 (Photo : Nicholas Kamm) |
[19/11/2008 13:28:55] TEHERAN (AFP) Les autorités iraniennes ont interdit d’accès plus de cinq millions de sites internet qualifiés d'”immoraux et anti-sociaux” et accusés de saper “l’identité religieuse” des Iraniens, a annoncé un responsable de la justice, cité mercredi par le quotidien modéré Kargozaran.
“Plus de cinq millions de sites internet sont interdits d’accès (…). La plupart ont des contenus immoraux et anti-sociaux”, a déclaré Abdolsamad Khoramabadi, conseiller du procureur général.
“Les ennemis utilisent l’internet pour attaquer notre identité religieuse”, a-t-il affirmé.
Les autorités obligent depuis plusieurs années les fournisseurs d’accès à placer des filtres dans leurs systèmes interdisant l’accès aux sites pornographiques étrangers mais aussi à des sites politiques basés en Iran et à l’étranger.
Ces filtres, régulièrement mis à jour et fonctionnant avec des mots clés ou l’adresse des sites interdits, affectent aussi des sites inoffensifs mais contenant des termes prohibés.
Parmi les sites les plus célèbres fermés il y a YouTube et les réseaux sociaux Facebook et Orkut, très utilisés par les jeunes internautes iraniens.
Autre exemple, les sites de la poupée Barbie sont également interdits notamment parce qu’ils contiennent le mot +girl+ (qui signifie fille en anglais) ou +woman+ (femme).
De nombreux sites politiques sont également interdits, notamment les sites des mouvements féministes mais aussi les sites des groupes étudiants modérés ou réformateurs.
Pour contourner ces filtres, les internautes utilisent des programmes permettant d’accéder indirectement aux sites interdits, et les créateurs de ces derniers en modifient fréquemment l’adresse.
Selon le vice-ministre des Télécommunications, Mohammad Khajepour, l’Iran compte 21 millions d’utilisateurs internet sur une population totale de 70 millions.
Pour sa part, Sobhe Sadegh, le magazine des Gardiens de la révolution, l’armée d’élite du régime islamique, a dénoncé dans son dernier numéro le “cyber-impérialisme” qui vise “les cultures des pays du tiers-monde”.
L’hebdomadaire dénonce “le rôle de l’internet, des télévisions par satellite et des SMS dans les révolutions de velours en Serbie, en Ukraine et en Géorgie”.
Il met en cause une série de médias étrangers comme les agrégateurs de contenus Yahoo et Google, les télévisions CNN et BBC, ou encore des agences de presse comme “Reuters, Associated Press, UPI, AFP et DPA”, comme étant des “outils d’une diplomatie médiatique” .
Le magazine accuse aussi l’Union européenne de mener des efforts “pour développer (les sites) internet anti-iraniens”, notamment en soutenant les blogueurs interdits par le régime.
Outre l’internet, dont l’utilisation se développe rapidement, les Iraniens regardent des chaînes satellitaires, en particulier d’information en persan, émettant depuis l’étranger comme la Voix de l’Amérique (VOA), financée par les Etats-Unis.
Les autorités s’inquiètent du prochain lancement d’une chaîne de télévision en persan par la BBC.
Le ministère de la Culture a prévenu début novembre que toute collaboration d’un Iranien avec ce média sera considérée comme une “action contre la sécurité nationale”.
Le président du Parlement, Ali Larijani, a demandé quant à lui aux députés de ne pas donner d’interview aux médias en persan émettant depuis l’étranger.
Récemment, le président de la télévision d’Etat avait affirmé que “30% des Iraniens regardaient les chaînes satellitaires”. Mais on estime généralement que le chiffre est bien plus élevé.