[20/11/2008 14:06:41] BRUXELLES (AFP)
à Bruxelles à une réunion pour une modification de la Politique agricole commune (PAC). (Photo : Dominique Faget) |
Moins de subventions à la production, plus de projets environnementaux: l’Europe s’est mise d’accord aux forceps jeudi sur un réaménagement de sa Politique agricole commune (PAC), le premier en cinq ans, en attendant la grande bataille à venir sur son budget.
“Cela n’a pas été facile”, a reconnu jeudi matin, les traits tirés, la commissaire européenne à l’Agriculture Mariann Fischer Boel, au terme de 18 heures de négociations marathon pour accoucher d’un compromis entre les 27 ministres de l’Agriculture réunis à Bruxelles.
“Nous serons assez bien équipés” avec cette adaptation, a-t-elle jugé, en attendant la grande réforme sur le budget de la PAC après 2013, qui représente à lui seul aujourd’hui 40% du budget de l’UE.
Britanniques et Scandinaves fourbissent déjà leurs armes dans cette perspective, dans l’espoir d’obtenir une réduction de l’enveloppe.
Le réaménagement annoncé jeudi vise à amplifier le mouvement d’inspiration libérale lancé avec la réforme de 2003, qui avait rompu le lien entre montant des subventions et des quantités produites.
Les prix et revenus agricoles seront globalement davantage liés à la loi de l’offre et de la demande sur le marché, et moins aux subventions.
Au programme: une réduction accrue des aides à le production agricole afin de pouvoir financer des projets de protection de l’environnement dans le monde rural (économies d’énergie, moindre utilisation de nitrates etc..) et de revitalisation des campagnes.
Pour la première fois, les très grandes exploitations, qui perçoivent plus de 300.000 euros par an de subvention, verront leurs aides diminuer proportionnellement davantage que les petites. “Je suis contente de voir que le principe selon lequel on peut demander davantage aux gros qu’aux petits est accepté”, a souligné la commissaire.
Les agriculteurs allemands vont ainsi perdre 240 millions d’euros par an d’aides, a calculé jeudi la ministre allemande de l’Agriculture, Ilse Aigner.
Berlin a beaucoup hésité avant d’approuver le compromis, adopté “à la quasi-unanimité” (la Lettonie a voté contre), selon le ministre français de l’Agriculture Michel Barnier, dont le pays préside l’UE et qui dirigeait les débats. Il a reconnu que sa collègue allemande avait été “tenace”.
Les négociations ont été aussi très difficiles sur les quotas laitiers, introduits en 1984 pour lutter contre la surproduction.
Certains pays comme l’Italie voulaient les supprimer tout de suite, face à la hausse de la demande mondiale, d’autres voulaient les garder inchangés, redoutant que l’ouverture des vannes fasse chuter davantage les prix et mène certains éleveurs à la ruine.
Au final, les quotas vont être augmentés de 1% par an pendant cinq ans avant leur disparition, déjà acquise, en 2015. “C’est une approche prudente”, a commenté Michel Barnier, confronté en France à la grogne des producteurs, inquiets de la baisse de leurs prix.
L’Italie a obtenu de pouvoir les augmenter de 5% en une fois. Les pays qui s’inquiètent comme l’Allemagne ou la France pourront verser des aides ciblées aux éleveurs dans les zones fragiles de montagne pour les aider à s’adapter à la nouvelle donne.
Le mouvement amorcé en 2003 de suppression ou de réduction des mécanismes de soutien des prix agricoles par les pouvoirs publics va être par ailleurs poursuivi, mais moins que ce que voulait la Commission à l’origine.
“La crise financière démontre le besoin de préserver des régulations et de la gouvernance”, y compris dans la PAC, et celui “d’avoir un secteur agricole productif puissant”, a souligné Michel Barnier.