à Fort McMurray dans l’Alberta (ouest des Etats-Unis) en juin 2007 (Photo : David Boily) |
[17/12/2008 12:07:37] MONTRÉAL (AFP) La crise financière et le ralentissement des principales économies occidentales ont donné un brutal coup de frein au développement des sables bitumineux dans la province occidentale d’Alberta, deuxième réserve mondiale de pétrole derrière l’Arabie Saoudite.
L’industrie pétrolière canadienne fonctionnait à plein régime depuis la hausse des cours du brut à l’été 2005, créant une véritable ruée vers l’or noir des sables bitumineux de l’Alberta, une réserve de 173 milliards de barils de pétrole lourd, onéreuse à exploiter.
Mais au cours des dernières semaines, un chapelet d’entreprises pétrolières ont réduit, gelé, voire abandonné d’importants projets liés à l’extraction et à la transformation de ce bitume en pétrole de synthèse.
Le géant norvégien StatoilHydro a abandonné son projet de raffinerie et Pétro-Canada a amputé du tiers son programme d’investissements, reporté la décision sur l’avenir de son ambitieux projet de Fort Hills, Shell a suspendu l’expansion de projets.
Les investissements dans les sables pétrolifères “passeront de 20 milliards de dollars en 2008, à 16 milliards l’an prochain, une baisse de 20% en une seule année”, estime Greg Stringham, vice-président de l’Association canadienne des producteurs de pétroles (CAPP).
“La progression des investissements et le développement anticipé sur les prochaines années sera limité en raison de la crise financière et du faible prix du pétrole brut sur le marché”, explique Joseph Doucet, professeur spécialisé dans les politiques énergétiques à l’université d’Alberta, à Edmonton.
La crise financière complique l’accès aux prêts bancaires et au capital boursier pour les entreprises devant à présent financer ces projets colossaux à même leur fonds de trésorerie.
L’assèchement du crédit met aussi des bâtons dans les roues des projets de rachat d’entreprises. Le géant français Total, très actif dans les sables bitumineux depuis quelques années, envisage une offre d’achat de 16 milliards de dollars sur le groupe canadien Nexen mais juge les conditions du marché défavorables pour l’instant, indiquait récemment une source proche du dossier.
La contraction des principales économies, et a fortiori celle des Etats-Unis, premier client du pétrole canadien, a tiré vers le bas le cours du baril de pétrole au grand dam de l’industrie des sables bitumineux du nord de l’Alberta où le coût de production est très élevé.
Une sorte de mélasse de terre, d’eau et de bitume est extraite du sol. Le bitume est ensuite isolé et valorisé en pétrole synthétique avant d’être acheminé dans des raffineries au Canada ou aux Etats-Unis.
Le groupe canadien Connacher a annoncé cette semaine qu’il réduirait “temporairement” sa production dans les sables bitumineux en raison “de la détérioration récente du marché”.
Si le cours du baril recule au prix plancher de production, “plusieurs entreprises pourraient faire comme Connacher et dire qu’elles diminuent leur production”, estime M. Stringham, en fixant autour de 30 dollars ce prix.
La production dans les sables bitumineux de l’Alberta, une des rares régions du monde politiquement stable pouvant augmenter sa production, était en moyenne de 1,2 million de barils par jour (bpj) cette année et devait avoisiner 3 millions bpj vers 2016-2017, mais l’industrie a repoussé de deux ans cet objectif, dans un rapport publié cette semaine par l’Association canadienne des producteurs de pétrole.