écembre 2008 à Bruxelles. (Photo : Jorge Dirkx) |
[19/12/2008 21:21:07] BRUXELLES (AFP) Le gouvernement belge a présenté sa démission vendredi après avoir été accusé de pressions sur la justice dans le cadre des efforts de sauvetage de la banque Fortis, un scandale qui replonge au plus mauvais moment le pays dans une grave crise politique.
Dans la soirée, le souverain Albert II, 74 ans, à qui revient la décision finale, a réservé sa réponse et directement entamé des “consultations” avec les dirigeants des partis politiques.
Après ces consultations, il aura le choix d’accepter l’offre de démission ou de la refuser. Yves Leterme, arrivé seulement en mars au pouvoir, est un habitué des fausses sorties: en juillet dernier, il avait déjà présenté sa démission, faute à l’époque d’avoir pu trouver un compromis au sujet des demandes d’autonomies accrues de la communauté flamande du pays. Mais trois jours plus tard le roi l’avait maintenu en poste.
Cette fois néanmoins, les choses semblent beaucoup plus graves. L’affaire Fortis s’est transformée en quasi-affaire d’Etat.
M. Leterme, 48 ans, a jeté l’éponge après que la plus haute juridiction du pays eut accusé ses services d’avoir tenté d’influer sur les décisions de la justice pour qu’elle valide le montage mis au point par le gouvernement pour sauver la banque Fortis de la faillite en la démantelant.
Le président de la Cour de cassation, Ghislain Londers, a parlé d'”indications importantes” montrant que le gouvernement a tenté de faire pression.
La réprobation dans le pays a été générale. Le cabinet du ministre de la Justice, Jo Vandeurzen, et celui de Premier ministre se sont rendus coupables de choses “impossibles dans un Etat de droit”, où prévaut en principe une stricte séparation entre pouvoirs judiciaire et exécutif, a condamné le chef du parti libéral flamand, Bart Somers.
ège de la banque Fortis à Bruxelles, le 6 octobre 2008 (Photo : John Thys) |
Dans le cadre du plan de sauvetage de Fortis, les activités bancaires belges du groupe, considérées jusqu’à peu comme un joyau national, doivent être vendues au géant français BNP Paribas, alors que l’Etat néerlandais a nationalisé l’essentiel des activités du groupe aux Pays-Bas.
Mais les petits actionnaires de Fortis ont multiplié les recours judiciaires et, il y a une semaine, ont obtenu de la justice un gel du démantèlement en attendant qu’ils soient consultés.
La démission du gouvernement intervient au pire moment pour la Belgique, aux prises comme le reste de l’Europe avec une sérieuse crise économique. Elle replonge aussi le pays dans les turbulences politiques, dont il pensait être provisoirement sorti.
Depuis l’été 2007, le royaume a connu une crise quasi-interrompue en raison des disputes entre Flamands néerlandophones et francophones sur l’avenir du pays, privé de gouvernement stable pendant une période record de neuf mois.
Dès vendredi, les principaux partis politiques ont refusé l’idée d’élections anticipées immédiates. “Dans la situation économique et sociale actuelle, ce n’est vraiment pas le moment”, a estimé la présidente du parti chrétien-démocrate flamand de M. Leterme, Marianne Thyssen.
Le scénario considéré comme le plus probable par les politologues belges est la nomination par le roi d’un gouvernement de transition reprenant pour l’essentiel les formations de la coalition hétéroclite sortante, allant des socialistes aux conservateurs, en passant par les libéraux.
Il nommerait à sa tête un nouveau Premier ministre. Parmi les noms sur lesquels spéculent les médias: Mme Thyssen, le président de la chambre des députés Herman Van Rompuy, membre comme elle du parti chrétien-démocrate flamand, voire le libéral francophone Didier Reynders. A moins que M. Leterme ne soit à nouveau rappelé par le roi.
Cette équipe devrait tenir jusqu’à des élections régionales très attendues en juin 2009, qui pourraient être couplées à ce moment là à des législatives anticipées.