L’aide accordée à GM et Chrysler ne dissipe pas le spectre d’une faillite

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écembre 2008 à Detroit (Photo : Bill Pugliano)

[20/12/2008 08:40:47] NEW YORK (AFP) La sévérité des exigences imposées aux constructeurs automobiles américains General Motors et Chrysler, en échange de l’octroi d’une aide fédérale de 13,4 milliards de dollars, laisse penser que le spectre d’une faillite est loin d’avoir disparu.

Le plan annoncé vendredi par le président George W. Bush suit de près les propositions les plus dures avancées au Congrès ces dernières semaines, notamment par le sénateur républicain Bob Corker, élu du Tennessee, Etat du sud où sont implantés plusieurs constructeurs étrangers. Son montant pourrait atteindre 17,4 milliards de dollars, en cas de déblocage d’une deuxième enveloppe de 4 milliards pour General Motors (GM).

Un retour à la “viabilité” d’ici au 31 mars est exigé, faute de quoi les fonds devront être rendus. Le syndicat de l’automobile UAW est sommé de s’aligner sur les conditions faites aux employés de Toyota, Honda ou BMW qui n’emploient dans leurs usines américaines que du personnel non syndiqué.

Les exigences sont telles, et le calendrier si serré, que la menace d’une faillite ne peut être exclue après l’annonce gouvernementale, a souligné l’agence de notation Fitch Ratings dans un communiqué.

L’analyste Himanshu Patel, de JPMorgan Chase, estime pour sa part qu’une faillite de Chrysler est “plus probable qu’auparavant” et conseille la prudence aux fournisseurs du plus petit des trois constructeurs américains.

Mais d’autres experts estiment que l’aide gouvernementale est un ballon d’oxygène, assorti de conditions moins sévères qu’il n’y paraît, et laissant une large marge d’interprétation à la prochaine administration Obama.

M. Patel lui-même souligne que le seuil pour déterminer la “viabilité” est “assez nébuleux”: il faut que la société révèle sa “valeur positive nette actuelle, tenant compte des coûts actuels et futurs”, et qu’elle puisse “entièrement rembourser” le gouvernement.

Pour David Cole, président du centre de recherche sur l’automobile CAR, la période qui s’ouvre jusqu’au 31 mars permettra aux responsables gouvernementaux de se rendre compte que “les constructeurs sont bien plus avancés sur la voie de la transformation” qu’on ne le pense.

Quant aux concessions syndicales, M. Cole estime que l'”UAW est prête à faire tout ce qui est nécessaire”, même si son président Ron Gettelfinger a dénoncé les concessions “injustes” exigées des salariés.

Barack Obama a assuré vendredi que son administration travaillerait avec l’UAW pour veiller à la sécurité des emplois sur le long terme. “Je tiens juste à m’assurer que quand nous aurons un plan final de restructuration, ce ne sont pas les travailleurs qui en porteront tout le poids”, a-t-il déclaré.

Michelle Krebs, analyste du site spécialisé edmunds.com, relève que l’UAW a déjà été “très accommodante sur de nombreux sujets”.

Mme Krebs regrette à ce titre l’ampleur des nouvelles concessions exigées, en droite ligne selon elle avec le discours “antisyndical” entendu au Congrès. C’est d’autant plus injuste, dit-elle, que les conventions d’entreprise des constructeurs étrangers, volontiers cités en exemple au Congrès, sont “très peu transparentes”.

Toyota, note-t-elle, a pour politique de toujours payer ses employés même durant les périodes de chômage technique, alors qu’une telle mesure est désormais interdite à GM et Chrysler.

Pour Mme Krebs, si le sauvetage échoue, ce sera surtout la faute de la conjoncture globale: “ce sauvetage est condamné s’il n’y a pas de plan de relance qui pousse les gens à acheter des voitures”.

Selon Harley Shaiken, professeur à l’Université de Berkeley, le spectre de la faillite est écarté à court terme, au moins pour 2009.

L’aide fournie par l’administration Bush, durement critiquée dans les rangs républicains, permet à General Motors et Chrysler de poursuivre “la restructuration la plus ambitieuse de leur histoire”, souligne-t-il.