érieure de la boutique Vuitton le 29 septembre 2005 à Paris (Photo : Damien Meyer) |
[21/12/2008 09:11:40] PARIS (AFP) Ventes en berne, stagnation des prix, ouvertures de magasins reportées, le luxe, resté longtemps un havre de prospérité, commence à son tour à pâtir de la crise même si les entreprises annoncent des marges encore importantes dans les mois à venir.
“La crise est la plus dure qu’a connu le secteur depuis des décennies”, selon Annie Girac, conseillère chez l’assureur-crédit Euler Hermes SFAC.
“En une année, des groupes pourtant très solides comme le suisse Richemont (Cartier, Montblanc…) ou le français LVMH (Vuitton, Gucci…) ont perdu 40% de leur valeur. Nous n’avions jamais vu cela”, souligne un analyste d’une banque d’affaires parisien, précisant que “la situation s’est dégradée depuis le mois d’octobre”.
Le joaillier italien Bulgari s’attend à un recul de ses profits en 2008, tandis que l’américain Tiffany a averti qu’il pourrait être amené à réduire ses effectifs à cause de la baisse de son activité au troisième trimestre.
Les poids lourds ne sont pas épargnés: la croissance du numéro un mondial, LVMH, a été divisée par deux au troisième trimestre par rapport aux deux premiers trimestres de l’année.
Après avoir connu quatre années euphoriques avec plus de 10% de croissance par an, le marché devrait voir ses ventes reculer de 4% en 2009, selon la banque d’affaires américaine JPMorgan. L’allemande Deutsche Bank table même sur une baisse de 10 à 15% pour certaines marques.
Le luxe va toutefois moins pâtir de la crise que d’autres secteurs et ses marges, même si elles se réduisent, vont rester très élevées: celles de Richemont et de LVMH devraient tourner autour de 18% en 2010 contre 21% en 2007, tempère le cabinet japonais Nomura.
Par ailleurs, “la crise n’affecte pas tous les pays et tous les produits de la même façon”, explique Emmanuel Bruley des Varannes, analyste à la Société Générale, “le marché japonais est particulièrement touché car le pays est entré en récession”.
Au Japon, les ventes de LVMH ont chuté de 7% sur les neuf premiers mois et le groupe a été contraint d’abaisser ses prix pour lutter contre la crise, mais aussi pour les adapter aux variations de l’euro qui s’est déprécié face au yen. Dans ce contexte, le géant du luxe a renoncé cette semaine à ouvrir à Tokyo l’une des plus grande boutique Vuitton au monde.
Certains segments sont davantage frappés: “l’horlogerie souffre beaucoup plus que la maroquinerie”, souligne M. Bruney des Varannes. En novembre, les exportations horlogères de la Suisse ont reculé de plus de 15% et les plus importants marchés, Hong Kong et les Etats-Unis, accusent des chutes encore plus sévères.
Le champagne, longtemps une valeur sûre à l’exportation pour la France, est également touché, particulièrement aux Etats-Unis où les ventes sont en baisse de 17%.
“Pour se protéger les marques réduisent les projets d’ouverture de magasins, gèlent les recrutements, ferment certaines boutiques et se recentrent sur leur métier d’origine”, souligne M. Bruley des Varannes.
“Nous allons moins fabriquer au premier semestre afin de ne pas avoir trop de stock. Nous n’allons pas non plus augmenter nos prix contrairement aux autres années”, explique Julien Rousseau, directeur marketing de Christofle, spécialisé dans les arts de la table.
Mais, si l’inflation –qui a touché fortement les prix du luxe ces dernières années– marque le pas, les grandes marques ne peuvent pas, contrairement à d’autres secteurs, casser leurs prix car “cela affecterait leur image”, selon l’analyste de la Société Générale.