Révolution dans la distribution – Epicerie aux ambitions d’hypermarché

Les grandes surfaces ne «pèsent» encore que 15% de notre commerce intérieur. La
marge de progression est donc énorme, sachant que le taux de croissance annuel
du secteur est de 10%. Décidément, nos épiceries ne sont plus ce qu’elles
étaient. C’est que la grande distribution les a sérieusement malmenés, alors que
le djerbien du coin a toujours été une institution. Une réussite qui s’est même
exportée, puisque dans des pays comme la France, on parle du «Tunisien du coin».
On nous promettait pourtant que les hypermarchés ne visaient pas nécessairement
la même catégorie de clients. Ainsi ils ne permettraient pas le «payement
différé» et autre «carnet». Qu’à cela ne tienne. Voici qu’une nouvelle chaîne
tunisienne de supérettes chamboule la donne. Il s’agit de «2 Pas Hyper proche».
A grand renfort de publicité, avec un affichage sur des bus, et distribution de
brochures dans les boîtes aux lettres. Avec un réseau de boutiques disséminés
dans le Grand Tunis, de Aïn Zaghouan à Ben Arous des Berges du Lac, à la Cité
Ghazela, avec, au passage, un petit saut à Yasmine Hammamet. Qui affichent
toutes pour slogan «2 Pas, supérette el houma». Parce que la superficie plutôt
modeste des boutiques en question leur permet de se placer au coeur même des
quartiers. Mais qu’on ne s’y trompe pas. La qualité des brochures (dans la
dernière distribuée, on trouvera même un sapin de Noël en plastique), les moyens
engagés dans la publicité, démontrent, si besoin est, que nous sommes loin de
l’épicier du coin.

Ces magasins proposent ainsi leurs marchandises à des prix de grandes surfaces,
tout en faisant dans la proximité. Avec un message tout trouvé, décliné sur les
prospectus distribués, rappelé sur le site web : «achetez maintenant et payez à
la fin du mois sans aucun frais». En somme, il s’agit de la conjugaison des
avantages des grandes surfaces, avec des prix bien plus bas que ceux des
épiceries traditionnels, la proximité en plus, et même des paiements différés,
possibles. Une remise au goût du jour du bon vieux «carnet» de l’épicier. Les
boutiques en question, obéissent aux règles du marketing moderne, avec une unité
de ton, et les mêmes couleurs rouge et jaunes que l’on retrouve d’un magasin à
l’autre. Une étude récente a révélé que le Grand Tunis pourrait quatre
hypermarchés sur un total de dix prévus en Tunisie. Une analyse qui ne tient
pourtant pas compte de ce nouveau concept. Combien de nouveaux réseaux
verrions-nous éclore ?

Pendant que les grands hypermarchés se battent à couteaux tirés, un petit malin
tente donc de tirer les marrons du feu sous leur nez. En adoptant une stratégie
radicalement différente. Ils sont grands ? Il sera petit. Ils sont éloignés ? Il
se rapprochera le plus possible. En conservant, en plus, le côté proche de
l’épicerie traditionnel. Un concept novateur, qui risque de donner des idées à
d’autres entrepreneurs tunisiens. Si le modèle économique de l’épicerie
traditionnel paraît bel et bien aux abois, les distributeurs de produits
alimentaires n’ont pas fini de faire preuve d’inventivité. Pour re-distribuer
les cartes d’un secteur en plein chambardement en Tunisie. Il est bien connu que
nos entrepreneurs ont tendance à s’imiter, quel que soit le secteur. Une chose
est sûre, la grande distribution nous réserve encore des surprises.