C’est une année, a priori , à oublier. Mais ce millésime
violent et impitoyable pourrait nous réserver des surprises de taille. Il a peut
être sonné le glas du libéralisme et rétabli le rôle de l’Etat. C’est l’occasion
inespérée d’une gouvernance mondiale. Enfin, un nouvel ordre mondial à visage
humain
C’est au total une année éprouvante. Elle a démarré par une disette
extrêmement affligeante pour les pays en développement et particulièrement
stressante pour les budgets des pays émergents. Les prix des produits
alimentaires ont flambé. Plus que jamais, on a pris la mesure redoutable de
ce qu’on appelle l’arme verte. L’horreur de « la demande solvable ». La
famine qu’on abat sur des populations à qui on rend la vie impossible.
Quadrupler les cours des matières de base pour affamer des pays entiers,
hélas est encore possible. On pensait que le marché ignorait la pénurie,
tolérait la spéculation mais neutralisait la rente monopolistique. Hélas, on
a déchanté. Le marché est capable du pire.
L’énergie, encore elle. Un pic à 147 dollars au mois de juillet, pour le
prix du brut sans raison. Et un retour à la normale tout aussi inexplicable
au courant de décembre. Encore un mystère qu’il nous faudra bien élucider.
C’est vrai que c’est l’une des rares retombées heureuses de la crise mais
elle n’en reste pas moins une énigme qui entache la « théorie » de
l’efficience du marché.
Heureusement il y a eu la parenthèse des JO. Pendant quinze jours on a
vibré au tempo du fair play. On a oublié, pour un temps, les délires de
l’hégémonisme de superpuissance. Et puis il y a eu cette somptueuse médaille
d’or de Oussama Mellouli, notre icône nationale. Nous étions dix millions à
nager avec lui dans le bassin. Ce come back et cette revanche après un
déclassement durement ressenti, nous a mis du baume au cœur. Et c’était
arrivé l’année où le pays était à l’écoute de sa jeunesse. Oussama, bravo !
Il y a eu aussi le Forum des Young Mediterranean Leaders, ces premiers de
la classe, non découragées par les échecs de tous leurs aînés, décidés à
donner corps à cette utopie pour laquelle on ne saurait baisser les bras :
la Méditerranée. Ils s’obstinent à la faire « autrement ». Même au risque
d’un éventuel naufrage on est prêt à faire le voyage avec eux. Voilà un
radeau pour lequel on accepte de se laisser méduser. Ulysse à l’image du
Messie pourrait faire son retour sur ces rivages fabuleux mais belliqueux.
La partie est jouable. Young Mediterranean Leaders promettent qu’une fois
aux commandes, ils en feront leur priorité. Laissons les réseauter entre
eux. Le jeu vaut la chandelle.
La crise que nous n’avons pas vue
Au changement de saison, la crise nous a surpris. Méchant coup d’humeur
des économistes : Mais on vous a prévenu dés juillet 2007, que n’aviez vous
pris vos précautions. L’on n’a pas vu de crise, mais une vaste escroquerie
aux « subprimes ». Des financiers aux méthodes pour le moins douteuses, ont
englouti l’épargne financière de la planète et ont fait crasher le système
financier international. ‘‘Le marché a merdé’’ voilà l’explication qui nous
a été servie. Heureusement qu’ils sont allés si loin parce qu’ils ont mis la
planète en garde et l’opinion internationale est définitivement vaccinée
contre le libéralisme. Cette crise a rendu définitif le retour de l’Etat
dans les affaires et a rendu inéluctable la supervision de tous les pays par
le FMI. Au lieu de nous précipiter dans les affres de la dépression, la
crise a sonné le retour salvateur du principe de la régulation et du
contrôle du marché. Ce faisant elle a débarrassé la mondialisation de cette
maladie qui la minait de l’intérieur, la globalisation.
Barack Obama a enfin franchi le seuil de la Maison Blanche. Pour que son
rêve se transforme en réalité pour le reste du monde il faudrait qu’il
change tellement de choses. L’inconvénient est que la liste est si longue
qu’on se met à douter. On le jugera très rapidement à sa manière de
poursuivre le programme de lutte contre la crise et le règlement du conflit
israélo-palestinien.
On baigne dans l’huile
Dans cette tourmente la bourse de Tunis, et quoi qu’on en dise, fait
malgré tout noble figure. Elle n’a pas vacillé dans la tempête. Elle est
dans le tout petit peloton de tête, avec le Ghana et l’Equateur, qui réussit
le miracle de préserver une performance positive à deux chiffres, qu’est ce
que vous dites de çà ? Elle a essuyé le départ de certains fonds de pension,
soit 4 à 5 % de sa capitalisation et elle n’a pas manqué de liquidités. Très
vite deux fonds communs de placements publics totalisant une capitalisation
de100 millions de dinars, le premier pour les banques publiques, le deuxième
pour les compagnies d’assurances ont procuré un appoint salvateur de
contrepartie empêchant les cours de s’effondrer. Dans la foulée la Bourse a
doublé la durée de la séance de marché et a acquis la nouvelle plateforme V
900 laquelle entre autres avantages fonctionnels la prédispose à se mettre
en réseau avec des bourses étrangères et surtout à aborder le marché des
dérivés. Que la bourse ne perd pas confiance redonne d e l’espoir.
Un bonheur n’arrive jamais seul la campagne oléicole s’annonce
prometteuse. Les huileries tournent à plein régime et la cueillette en ce
temps de sécheresse passagère se déroule bien. En 2008 l’huile d’olive a vu
son plan stratégique se mettre en place. Il prévoit à horizon de 2011 le
conditionnement de 10 % de nos exportations avec comme objectif de doubler
purement et simplement les recettes de nos exportations. Ça baigne.
Le plus puissant savaté
Montazar a « savaté » l’homme le plus puissant de la planète qui s’est
vite empressé de récupérer l’évènement à son avantage. « W » y voit un signe
manifeste de la démocratie en Irak même s’il en a fait les frais. Le même «
W » a affirmé qu’il s’est trompé dans cette guerre. Le monde le savait et le
lui a fait savoir mais il est passé outre. Ces excuses « sincères » il va
sans dire arrivent après celle de Colin Powell, celui-là même qui a fabriqué
de fausses preuves pour s’auto leurrer. Elles arrivent aussi après celles de
Tony Blair. Mais enfin tout ce beau monde qui se trompe, pincez-moi je rêve
à moins que tous trois nous prennent pour autre chose que ce que nous
sommes. Des trois c’est « W » qui a reçu des coups de tatane de Montazar. On
peut comprendre le geste de désespoir. Il est vrai que les images de la
torture à Abou Graïb ou Guantanamo feraient sortir n’importe qui de ses
gonds. Fallait-il y aller avec ses gros sabots ? Montazar me renvoie à cet
autre héros Jan Palach, qui ne supportant l’invasion de son pays la
Tchécoslovaquie en août 1968 à la suite du printemps de Prague par les chars
de l’armée rouge s’est immolé par le feu, à force de désespoir. Montazar est
devenu très vite le héros de certaines factions des masses arabes. Qu’un
journaliste dégaine en se servant de ses chaussures c’est se tromper d’arme
et de projectile. Albertine Sarrasin, romancière française de circonstance,
voulant régler son compte avec la société et ses injustices déclarait que «
son bic lui servait de flingue ». A moins de passer pour des ploucs mais il
ne faudrait pas que l’exutoire des chaussures nous fasse oublier la
nécessité de militer pour que la classe politique américaine renonce à la
thèse des « néocons » et abandonne le droit d’ingérence et la guerre
préventive. Sinon on « aurait marché à côté de nos pompes ».
Cette fois c’et la guerre de trop. Israël, veut donner une légitimité au
Hamas. Elle y sacrifie des centaines de civils, sans pitié. Mais c’est en
vain qu’elle a lancé ce dernier baroud qui est totalement contreproductif.
Ultime carte. Erreur stratégique et faillite politique. Les opinions arabes
n’ont pas été dupes du manège, extrêmement coûteux en vies humaines. Elles
ne basculeront pas du côté de l’extrémisme jihadiste. Non seulement le
manège est si maladroit que c’est son opinion qu’Israël risque de piéger.
L’arroseur arrosé. Israël pense agiter la rue arabe et possible retour de
bâton, c’est la rue israélienne qui pourrait se soulever. Game is over. La
solution politique est inévitable. Israël est à court de munitions et peut
être même en panne de projets pour l’avenir.
Enfin on ne saurait occulter la sortie de ‘Thalathoun’ film phare d’une
Tunisie qui sous le joug colonial a trouvé suffisamment de ressort pour
engager une dynamique de modernité et d’émancipation. Quatre individualités
sans se concerter ont vu leurs projets converger preuve tangible de cette
noblesse populaire, notre acquis le plus précieux.
Bonne et Heureuse année 2009 à tous nos lecteurs et à tous nos annonceurs
