Le secteur bancaire connaît ces dernières années une
dynamique structurelle. Selon une récente étude de l’agence Mac sa, la structure
du système bancaire tend de plus en plus à emprunter le modèle de banque
universelle en matière de taille. Au cours de l’exercice 2007, les ressources
propres des banques ont progressé de +13,7% alors que les emplois n’ont
progressé que de 9,77%. Mac SA explique cette tendance par le fait que plusieurs
banques de la place se sont ont opté pour l’augmentation de capital et le
renforcement de l’assise financière. A fin 2007, les actifs consolidés avaient
augmenté de 10,4%, soit 32,378 MDT.
L’étude montre, également, que la croissance des investissements dans les
divers secteurs, grâce aux réformes du secteur bancaire, a permis d’augmenter
l’offre de monnaie sur le marché, par une hausse des actifs et des passifs
consolidés. La masse monétaire a cru de 13,5% en 2007 contre 12,2% en 2006. Par
ailleurs, la base de financement a augmenté de 13,5% en 2007, soit 41,377 MDT
contre 36,470 MDT en 2006.
L’étude indique également que la part des prêts dans le PIB a atteint 56,8%
en 2007, ce qui est au dessus de la part moyenne observée dans les pays de
l’Europe Centrale (30%) mais au dessous de la moyenne des pays de la zone euro
(109,6%). Le taux de pénétration est encore faible, puisqu’il ne se situe qu’à
50,8% en 2007 si on le compare au Maroc (79,1%), le Koweït (64,1%) et le Qatar
(68,3%). En revanche, Mac SA indique que le taux de bancarisation de la
population demeure encore faible avec 50% en 2007 contre 98% pour la France.
Toutefois, elle précise que la dispersion du réseau des banques constitue un
avantage comparatif pour la diversification régionale et sectorielle afin
d’attirer une clientèle supplémentaire.
Au niveau des ressources, il y a eu une augmentation de 8,9% entre 2002 et
2007. Pour 2007, elles ont progressé de 13,5% contre 7% en 2006. La contribution
des dépôts dans le total des emplois est restée quasi-inchangée à 55,1% avec une
progression de 13,5% en 2007 contre 11,7% en 2006. Ainsi, les comptes d’épargne
ont baissé de 7,2% en 2007, représentant 27% des dépôts, avec une progression de
8% pour les comptes spéciaux d’épargne et 5,5% pour l’épargne logement.
L’encours des crédits en progression
L’encours des crédits a augmenté de 9,8% en 2007 contre 2,4% en 2006 pour
atteindre plus de 27 milliards de dinars. Selon l’étude comparative de Mac sa,
qui a concerné dix banques de la place, ce sont les banques publiques qui ont
accaparé la plus grande part avec 17,3% pour la BNA, 17% pour la STB et 13,7%
pour la BH. Ces établissements ont octroyé 64,2% des nouveaux crédits. Pour les
banques privées, trois d’entre elles affichent des taux de croissance plus
élevés que la moyenne du secteur, à savoir Attijari Bank, BIAT, Amen Bank et ATB.
Entre le 30 septembre 2007 et le 30 septembre 2008, elles ont réalisé plus de
70% des crédits octroyés et plus de 41% des nouveaux crédits octroyés par
l’ensemble des dix banques étudiées par Mac sa. Notons que le secteur bancaire
en Tunisie rassemble actuellement 20 banques de dépôt dont onze sont cotées à la
Bourse de Tunis.
Pour l’ensemble du secteur, les crédits accordés aux professionnels ont
progressé de 9,7% contre 6,7% en 2006, avec une part dans l’encours total
baissant à 78,3% (1,3 point par rapport à 2006) suite au recul des crédits
octroyés aux différents secteurs d’activités. Les crédits aux particuliers ont
progressé de 18,9%, grâce à l’accélération de l’encours des crédits à moyen et
long terme (23,7% en 2007 contre 12% en 2006). Ces crédits ont été généralement
ciblés pour l’acquisition de logement et l’aménagement d’anciens logements
représentant 56% de l’encours des crédits aux particuliers. Les crédits de
l’habitat ont également évolué de 23,8%.
Pour les crédits à court terme, ils ont progressé de 12,4% contre 28,9% en
2006. Mac sa note que «l’expansion des prêts aux particuliers pourrait être
limitée par la BCT dans les années à venir, en raison de la tension
inflationniste ressentie sur le plan national». Car l’évolution moyenne des
prêts aux clients de détail a été de 17% pendant les cinq dernières années.
L’agence ajoute que le taux de transformation a baissé de quatre points pour
atteindre 112% par rapport à 2006. Ce qui contraindrait les banques à faire
appel à d’autres ressources (emprunts, opérations de trésorerie) pour financer
une part de leurs crédits.
Pour ce qui est de la qualité des actifs, Mac sa indique qu’elle reste
problématique puisqu’ils proviennent en partie du financement des projets
d’infrastructure publics à caractère industriel et commercial et aussi d’une
mauvaise gestion prudentielle.
Baisse des créances classées en 2007 et évolution du PNB en 2008
Pour ce qui est de la performance du système bancaire, le taux des créances
classées a baissé continuellement pour atteindre 17,6% en 2007 contre 24% en
2003, selon la BCT. A noter que l’objectif est d’atteindre un niveau de 15% en
2009 et de 12% en 2011, mais qui reste toutefois élevé par rapport à la moyenne
méditerranéenne (5%). En outre, le taux de couverture des créances classées a
augmenté de 53,2% en 2007 contre 49% en 2006, grâce à des efforts en matière de
provisionnement et de réservation d’agios, contre une moyenne escomptée par la
BCT de 70%.
L’UIB présente le risque de crédit le plus élevé avec un taux de créances
classées de près de 45% et un taux de couverture de 45,9%. De même pour la STB
qui subit encore les conséquences de sa participation dans le financement du
tourisme. D’un autre côté, la BT présente un taux de créances classées de 5,5%,
au dessous de la norme de 10% avec un taux de couverture de 100%.
En termes de rentabilité financière, l’étude comparative montre que la BT et
la BH sont en tête avec une croissance respective de 20,1% et 18,8% en 2007,
grâce à la croissance de leurs bénéfices (51% et 79%). De son côté, la BNA a vu
son ROE croître de 4,7% en 2006 à 7,8% en 2007, étant son meilleur taux de
rentabilité financière sur les cinq dernières années. Ceci est dû, selon Mac SA,
au résultat exceptionnel de la banque en 2007, grâce à la plus-value réalisée
suite à la cession de sa participation dans le capital de la société Magasin
Général.
Au troisième trimestre 2008, le PNB cumulé par les banques étudiées a
progressé de plus de 13% par rapport au troisième trimestre 2007 avec une hausse
des crédits de 17,3% et des dépôts de 13,4% sur les neuf premiers mois de
l’année. Au niveau des dépôts, la BIAT présente le total le plus élevé du
secteur et se classe quatrième dans l’octroi des crédits.
Faible impact de la crise financière
Concernant la crise financière internationale, Mac SA a indiqué que la Bourse
de Tunis n’a pas été épargnée par la crise, réalisant une baisse de 10% dans le
TUNINDEX depuis septembre 2008 jusqu’au 2 décembre 2008, en restant haussier par
rapport au début de l’année. L’indice des banques a accusé une baisse de 12,2%
par rapport au pic du 9 septembre 2008, mais il reste en hausse de 18% par
rapport au début de 2008. Ainsi, «la baisse qui a altéré le marché boursier est
plutôt conjoncturelle et non pas structurelle», explique l’agence.
L’impact de la crise reste donc faible, grâce à un secteur bancaire
relativement isolé et faiblement exposé aux capitaux étrangers et soumis à des
contrôles réglementaires stricts sur le change et sur l’investissement dans les
marchés de capitaux étrangers, etc. Ajoutons à cela que les banques off shore
ont une part faible dans le total des actifs bancaires, soit 7% à fin avril
2008. De même, la part des clients étrangers est seulement de 12% du total des
dépôts des clients. Mac sa précise qu’il n’y a pas de dépendance vis-à-vis du
marché de la dette internationale alors que le financement des banques
tunisiennes par les banques étrangères est limité à moins de 10%.
Au niveau des secteurs touchés par la crise, en l’occurrence le textile, le
tourisme et les industries électriques, électroniques et mécaniques, le secteur
bancaire a octroyé 13,8% des crédits aux professionnels au premier, 2,9% pour le
deuxième et 1,3% pour le troisième.
Le premier défi que le secteur devrait affronter est la libéralisation des
services qui devrait encourager les banques étrangères à pénétrer le marché
tunisien. Néanmoins, le secteur bancaire reste encore fragmenté, ce qui
nécessite un rapprochement entre les banques tunisiennes pour affronter la
concurrence mais aussi le maintien de la segmentation égalitaire du système
bancaire, établie par l’Etat. Mac SA souligne que la préparation à l’adoption
des accords de Bâle II par les banques tunisiennes pourrait être une opportunité
de croissance pour le secteur.
Le second défi est le développement hors frontière que l’agence voit comme
une nécessité avec l’ouverture du compte de capital. Elle insiste également sur
l’accompagnement des banques pour les entreprises nationales qui veulent
intégrer le marché international. D’un autre côté, l’agence précise que les
banques tunisiennes feront face à plusieurs impératifs courants parce qu’elles
sont en majorité des banques de dépôt. Ces impératifs ont trait à la
diversification des produits, la modernisation des systèmes d’information, la
gestion des compétences et la réduction des coûts, etc.
M.O.(d’après une étude de Mac sa)