L’Etat dans Commerzbank, un mal nécessaire pour sa survie

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ège de la banque à Francfort, le 3 novembre 2008 (Photo : Thomas Lohnes)

[09/01/2009 18:27:57] FRANCFORT (AFP) Le marché restait sous le choc vendredi après la nationalisation partielle de Commerzbank, considérée toutefois aussi comme un mal nécessaire pour la survie de la deuxième banque privée allemande et le succès de son coûteux rachat de Dresdner Bank.

Les investisseurs prenaient très mal l’annonce la veille d’une participation de l’Etat de 25% plus une action dans le capital de la banque et d’un nouvel apport géant de fonds publics: après avoir perdu plus de 13% jeudi à la Bourse de Francfort et atteint son plus bas niveau historique en cours de séance, le titre Commerzbank poursuivait vendredi sa descente aux enfers.

Il lâchait 9,52% à 4,75 euros à 15h15 GMT, sur un indice vedette Dax en recul de 0,76%.

De nombreux analystes saluaient cependant l’action de l’Etat, jugée indispensable pour permettre à Commerzbank de poursuivre ses activités de crédit, en particulier à destination des petites et moyennes entreprises, et de réussir sa fusion avec Dresdner Bank.

“L’Etat joue le rôle d’une sage-femme pour une naissance douloureuse”, commente pour l’AFP Robert Halver, stratège actions de Baader Bank. L’intervention de l’Etat est “complètement justifiée. (…) Dans le monde entier, l’Etat rentre dans le capital des banques”, rappelle-t-il.

“Des dépréciations de plusieurs milliards d’euros sont attendues au quatrième trimestre” pour les deux banques, souligne Carsten Werle, analyste de Sal Oppenheim.

Commerzbank a toujours l’intention de boucler le rachat de Dresdner d’ici fin janvier pour un coût total de 5,1 milliards d’euros. Les actifs dépréciés qui sommeillent encore dans les comptes de cette dernière pourraient néanmoins rendre l’addition plus salée.

La banque de Francfort (ouest) a déjà eu recours en novembre au fonds fédéral de soutien aux banques, le Soffin, pour 8,2 milliards d’euros de liquidités. Jeudi, elle a annoncé un nouvel apport équivalent de capitaux non placés, ou “dormant”, ne donnant pas de droits de vote à l’Etat.

En revanche l’achat de 295 millions de nouvelles actions ordinaires à 6 euros l’unité permet à l’Etat de détenir 25% plus une action dans le capital de la banque et de détenir une minorité de blocage.

“Il est prévu d’envoyer deux représentants de l’Etat au conseil de surveillance de la Commerzbank”, a déclaré à l’AFP un porte-parole du ministère des Finances, afin “d’assumer notre responsabilité dans la manière dont est utilisé l’argent des contribuables”.

Toutefois “l’Etat n’entend pas intervenir dans les décisions opérationnelles de la banque”, a-t-il assuré.

Une mise en garde que récuse le syndicat Verdi. Dans un communiqué diffusé vendredi, il juge “nécessaire” la “nationalisation partielle” de la banque. Mais il “attend des actionnaires, et particulièrement du gouvernement qu’il exerce son influence sur le directoire pour conserver le plus d’emplois et de sites possibles”, notamment dans le cadre de la fusion avec Dresdner.

L’histoire se répète pour Commerzbank et renvoie aux heures sombres de la Grande Dépression: elle avait déjà été nationalisée par le gouvernement allemand en 1932 pendant cinq ans, rappelle Antje Laschewski, stratège actions de LBBW. “Ce souvenir crée un sentiment très négatif sur les marchés”, estime-t-elle.

Et l’entrée massive de l’Etat dans l’actionnariat “va entraîner une dilution de 20% du bénéfice par action des actionnaires” de Commerzbank, selon Carsten Werle.

La dette va de plus enfler. Selon ses calculs, la totalité des aides publiques accordées à Commerzbank au taux d’intérêt de 9% l’obligera à payer un tribut de 1,5 milliard d’euros par an. En 2007, année record pour la banque, celle-ci avait réalisé un bénéfice net annuel de 1,9 milliard d’euros.